Gwen Madiba :
Bienvenue à uOCourant, un balado informatif, inspirant et divertissant produit par l’Université d’Ottawa.
Bonjour, je suis Gwen Madiba, animatrice de l’émission et fière détentrice de deux diplômes de la Faculté des sciences sociales et je suis aussi présidente de la fondation Equal Chance.
Le but d’uOCourant est de vous faire connaître des chercheurs, chercheuses et diplômé(e)s à l’avant-garde de leur domaine et d’avoir avec eux des discussions stimulantes sur les sujets du moment.
La troisième saison de uOCourant se concentrera sur l'industrie du divertissement avec des conversations sur le cinéma, la musique, la télé-réalité, les tendances technologiques et plus encore. De Montréal à Toronto, en passant par la Californie et au-delà, nous parlerons à des diplômé(e)s qui sont au cœur de l'industrie du spectacle.
Notre invitée d’aujourd'hui, Tanya Lapointe, est une diplômée en communication et lettres françaises. Elle est productrice exécutive sur Dune, réalisé par Denis Villeneuve avec qui elle a également travaillé sur Arrival et Blade Runner 2049. Elle est la co-fondatrice des Productions sur le toit, et a produit et réalisé Lafortune en papier qui a gagné le prix du public au Whistler Film Festival en 2020. Tanya a également écrit plusieurs livres en français et en anglais dont The Art and Soul of Dune. La sortie de son prochain livre, The Art and Science of Arrival est prévue pour le début de l’année 2022.
Alors Tanya, merci de nous rejoindre aujourd’hui de Montréal. Alors pour commencer la conversation d’aujourd’hui, j’ai une question un peu philosophique pour vous en tant que réalisatrice. Qu’est-ce que le divertissement signifie pour vous ?
Tanya Lapointe :
Bien, c’est une excellente question, puis je pense que quand j’étais enfant, le divertissement c’était tout ce qui me permettait de m’évader de mon quotidien. J’ai regardé beaucoup de télévision, trop selon mes parents. Ils me disaient d’aller jouer à l’extérieur avec mes amis. Mais je pense que le divertissement a ouvert mes horizons, nourrit mon imaginaire puis en grandissant, j’ai développé mes goûts pour d’autres types de divertissement. Donc pas seulement la télévision, évidemment.
Puis en fait, le divertissement pour moi c’est un terme très large qui englobe beaucoup de choses. C’est autant la télévision, le cinéma, aller voir des sports c’est du divertissement, la lecture. Mais pour moi, le divertissement au fur et à mesure que la vie a évolué, c’est recentré vers, à la fois la télévision et le cinéma.
C’était de raconter des histoires et ce qui est formidable, c’est que justement à l’Université d’Ottawa, j’ai étudié en communications, en lettres françaises mais à chaque occasion que je pouvais, quand il y avait un cours qui était offert en lien avec le cinéma je prenais ce cours là. Et je me suis rendu compte que un divertissement ce n’est pas seulement quelque chose qui nous permet de nous évader mais quelque chose qui peut être aussi source de réflexion sur notre société, une source d’analyse intellectuelle. Et donc pour moi, le divertissement, oui ça peut être justement cette chose qu’on se dit : « ah je mets mon cerveau à OFF » comme on peut souvent se dire, ou un divertissement qui nous ouvre vers d’autres réalités, vers d’autres mondes qui… c’est un peu philosophique ma réponse comme vous avez dit, mais qui ouvre le cœur aussi. Donc, ça peut avoir plusieurs, plusieurs facettes et plusieurs avantages.
Gwen Madiba :
Merci de partager ça et puis de partager votre parcours aussi à l’université parce que c’est… ça fait toujours plaisir d’entendre que vous avez pris ces cours là, en cinéma, à l’université. Je suis sur qu’ils ont pu quand même vous servir, n’est-ce pas ?
Tanya Lapointe :
Oui, absolument ! Je garde un très bon souvenir. Puis, j’ai eu des professeurs mémorables : Gary Evans qui avait écrit un livre sur l’Office national du film. J’étais impressionné que quelqu’un puisse écrire un tel ouvrage. C’est devenu un peu mon mentor. Et même si d’abord en avant tout je ne suis pas allée en cinéma mais en télévision, je pense que ce n’est pas un hasard si aujourd’hui je travaille dans le monde du cinéma.
Gwen Madiba :
Absolument ! Et récemment vous avez effectué une tournée de promotion internationale pour Dune. Le film hollywoodien qui a pris l’affiche le 22 octobre. Ces dernières années vous avez également fait la promotion de vos deux premiers documentaires.
Après votre parcours universitaire en communication à l’Université d’Ottawa et 15 ans à Radio-Canada, RDI et CBC, quel effet cela vous fait-il d’être passée du rôle d’interviewer à celui d’interviewée ?
Tanya Lapointe :
Et bien je dois dire que je suis reconnaissante que mon parcours m’ait permis d’apprendre à être de votre côté en fait, du micro, d’être intervieweuse parce que quand on comprend ce que l’on cherche quand on pose des questions, bien on est mieux outillée pour répondre aux questions. Donc, moi ce que j’ai compris dans mon parcours, j’ai interviewé des milliers de personnes, c’est vraiment, pour moi en tout cas, c’était une quête d’authenticité, et aussi d’enthousiasme selon le sujet, mais ces 15 années mon préparées aujourd’hui à parler de mes propres projets.
Je pense que c’est plus facile pour moi de parler de mes projets que de poser des questions, parce que quand on pose des questions, on ne connait pas forcément toutes les réponses. Donc on est dans une quête alors que, et bien quand vous me poser des questions sur mes projets, je sais que je possède toutes les réponses. Donc, il y a un certain soulagement je dirais à répondre aux questions plutôt que de les poser.
Gwen Madiba :
En parlant de vos projets, parlons d’abord de votre premier long métrage documentaire en français que vous avez réalisé : Lafortune en papier qui a obtenu le prix du public lors de sa première mondiale au festival international du film de Whistler en 2020. Ce documentaire sur Claude Lafortune l’animateur d’émissions de télévision pour enfants explore la marque qu’il a laissé dans notre culture populaire, un peu comme Fred Rogers aux Etats-Unis et Mr. Dressup de la CBC.
Alors on y découvre son talent extraordinaire à créer des personnages et des décors utilisant uniquement du papier, des ciseaux et de la colle. Claude Lafortune est malheureusement décédé au printemps 2020 avant la sortie de votre film, mais j’ai été très émue par l’hommage que vous avez partagé en ligne. Pourquoi c’était important pour vous de raconter son histoire et la partager avec un public plus large au Canada, à l’étranger et en particulier en dehors de la communauté franco-canadienne ?
Tanya Lapointe :
Bien, merci beaucoup pour ces bons mots au sujet du film. C’est un projet qui était très près de moi. D’abord, le désir de faire ce documentaire, c’était une curiosité… je dirais nostalgique parce que moi quand j’étais enfant, je regardais Claude Lafortune à la télévision et quand je l’ai rencontré plus tard dans la vie, je me suis rendu compte qu’il y avait peut-être plus que ce que l’on voyait à l’écran.
Donc j’ai voulu savoir qui était cet artiste derrière les personnages de papiers qu’il créaient et qui m’émerveillaient quand j’étais enfant. Et donc quand je lui ai demandé de faire ce documentaire en 2018, il n’a pas accepté tout de suite parce qu’il disait : « Mais moi je ne suis pas Céline Dion, je ne suis pas très Glamour », j’ai dit : « Claude je pense qu’on peut trouver une façon de faire un documentaire à ton image » et rapidement je me suis rendu compte que cet homme là qui avait 81 ans au moment ou on a commencé le documentaire et le tournage, il n’était pas reconnu à sa juste valeur d’artiste et que même qu’il était en train de tomber dans l’oubli. Et puis moi je trouvais ça… je voyais là une certaine… je ne sais pas si je peux dire injustice mais en tout cas moi ça m’attristait et je me suis investie d’une mission de faire connaitre Claude Lafortune parce que je trouvais que c’est quelqu’un qui faisait du bien, c’était quelqu’un qui était… dont les œuvres et dont les productions télévisuelles étaient empreintes de bonté. Et je trouve que dans notre société on a besoin de bonté et de douceur. Et je trouvais que son message était important, donc à partager.
Alors au moment où… c’était en décembre 2020, et je devais décider ou j’allais présenter le film et le festival de film de Whistler, le programmateur Paul Gratton m’appelle et me dit : « moi je ne viens pas du Québec, je ne connaissais pas Claude Lafortune, j’adore ce personnage et donc j’aimerais présenter le film à Whistler ! ». Et j’étais vraiment reconnaissante, car comme vous dites, ça permettait non seulement de faire parler de Claude Lafortune auprès d’un public qui le connaissait, qui avait grandi avec lui à Montréal au Québec, au Canada français aussi, mais d’ouvrir vers un public plus large. Et ce que je me suis rendue compte grâce à cette opportunité là d’être à Whistler, c’est que, qu’on le connaisse ou pas Claude Lafortune, son histoire fait éco à l’histoire de plusieurs personnes, donc un peu comme vous disiez, Fred Rogers, Mr. Dressup. Qu’on soit en Hongrie ou qu’on soit en France, il y a eu des animateurs jeunesse qui ont marqué l’enfance de tout le monde. Alors à mon plus grand bonheur, l’histoire de Claude Lafortune justement est sortie de nos frontières et a été présentée récemment en Afrique, en Asie et en Europe, alors… je dirais que la mission de faire connaitre Claude Lafortune, bien, c’est réussi ! Même si c’est moi le dit.
Gwen Madiba :
Félicitations ! C’était vraiment un beau projet. Merci beaucoup à vous !
Alors votre plus récent long métrage : l’adaptation du roman de science-fiction de Franck Herbert, Dune, sur lequel vous avez travaillée à titre de productrice exécutive aux côtés de votre conjoint, le réalisateur québécois Denis Villeneuve, est un véritable accomplissement. Vous avez d’ailleurs publié un livre d’accompagnement : The Art and Soul of Dune. J’ai particulièrement apprécié la façon dont vous avez fait référence à Dune sur Instagram en disant à la blague que « c’était le petit projet sur lequel je travaille depuis 2018 ».
Au moment de cet enregistrement, Dune a déjà rapporté 300 millions de dollars aux guichet international. Le film a reçu une ovation de 8 minutes lors de sa première mondiale au Festival international du film de Venise avec des critiques exceptionnelles et des acteurs vedettes comme Timothée Chalamet, Zendaya et Oscar Isaac.
Comment un projet de cette envergure prend-il vie et comment vie-t-il avec vous ? En quoi ce projet vous a-t-il changé en tant qu’artiste ?
Tanya Lapointe :
C’est un projet, quand on résume la carrière du film jusqu’à présent, c’est quand même… c’est des chiffres impressionnants. Et c’est vrai que j’ai commencé à travailler sur ce film en 2018 mais Denis Villeneuve qui justement a réalisé le film et avec qui je partage ma vie a mentionné aux journalistes en 2016 que le projet de sa vie…le rêve de sa vie ce serait de réaliser Dune : un livre qu’il avait lu quand il était adolescent.
Donc à partir de ce moment-là, la nouvelle a eu un effet boule de neige parce qu’il y a un studio qui a su que Denis avait dit ça, et qui l’a invité à une rencontre et bien ensuite, comme on dit en anglais : « The rest is history ! ». Denis a été embauché pour réaliser le film et on a passé, enfin on est en 2021 maintenant donc ça fait 5 ans que ce film, habite, ce projet, cette histoire habite nos vies. Donc je dirais que c’est une leçon de persévérance en tant qu’artiste, parce que non seulement il y avait toute la production de Dune- Faut comprendre que quand on fait un film de science-fiction comme celui-là, c’est qu’il n’y a aucun détail qui est laissé au hasard parce que tout doit être inventé. L’histoire se déroule ce 10 191 donc un accessoire aussi banal qu’une poignée de porte ne ressemble pas à une pougnée de porte de 2021. Alors chaque élément doit être inventé. Alors c’était un travail de précision, de s’assurer que la vision de Denis et que chacun de ces détails là étaient portés à l’écran comme lui il l’imaginait.
Et puis ensuite, comme vous l’avez dit, j’ai écrit le livre The Art and Soul of Dune qui a été très difficile à écrire parce que j’ai commencé l’écriture au moment ou la pandémie de la Covid-19 commençait. Et une partie de moi qui voulait tout abandonner, j’étais distraite, j’étais bouleversée comme tout le monde et j’arrêtais pas de dire à mon éditeur : « mais non, il faut repousser, il faut repousser » parce qu’il y a une partie de moi qui ne voulait pas s’investir. Je n’avais pas la concentration, mais je n’avais pas le choix. Parce que même si le film ultimement a été poussé d’un an parce que les salles de cinéma étaient fermées et tout ça, il fallait quand même respecter l’échéancier parce qu’on ne savait pas à l’époque comment les choses allaient évoluer. Et finalement, j’ai commencé à écrire le livre ou moment ou Claude Lafortune décédait. Donc j’ai écrit ce livre là à travers beaucoup de bouleversements de société, émotifs, personnels, mais je suis fière aujourd’hui que le livre soit sorti parce que il a été terminé à temps dans les délais prévus, il a pu être traduit dans 7 langues. Donc, vraiment en rétrospective, je me rappelle de l’émotion, des difficultés mais je me rends compte aussi que quand on persévère, au final il peut y avoir un sentiment de satisfaction donc c’est ça. Pour moi, j’ai écrit 5 livres jusqu’à présent mais celui-là, ça aura été le plus difficile mais peut-être celui dont je suis le plus fière parce que j’ai failli l’échapper et pas l’écrire.
Gwen Madiba :
Quel beau message de persévérance et je suis qu’il y a plusieurs personnes qui nous écoutent aujourd’hui et qui seront inspirées par votre parcours, par votre histoire et puis on a toujours besoin de pousser, on a toujours besoin d’entendre des histoires des autres pour nous, nous motiver et la votre est très motivante. Merci beaucoup !
Tanya Lapointe :
Merci, merci ! Je pense que quand on voit des gens qui, justement quand on parle de 300 millions de dollars au Box-Office, tout à l’air facile mais c’est pas tout facile donc je pense qu’il faut raconter ces difficultés la pour justement que l’on soit solidaire dans, dans nos parcours !
Gwen Madiba :
Absolument ! Alors j’ai une autre question sur Dune que j’aimerais aborder sous un angle différent : Celui de la technologie, de l’évolution et de la manière dont notre société s’engage dans les formes de divertissement. Vous avez partagé en ligne : « a word of advice, see it in Theaters on the biggest screen possible ». Denis Villeneuve a également exprimé l’importance de l’expérience cinématographique en salle. Il a été très franc à ce sujet et a été déçu de Warner Brothers n’ai pas attendu pour diffuser le film en streaming sur HBO Max. Pourriez-vous nous parler davantage de cet amour du cinéma et de l’importance de voir les films en salle avec un public ?
Tanya Lapointe :
Je pense que, je parle beaucoup de mon enfance, mais parce que je pense que c’est quand même l’enfance nous donne du recul par rapport à l’existence humaine. Puis-moi si je repense au premier film que j’ai vu au cinéma, je ne sais pas si je peux dire si c’est un grand chef-d’œuvre, c’est un film d’animation, j’avais 6 ans mais je me souviens très clairement. Alors, j’ai 6 ans d’être assise dans une salle et de regarder le film Bambi au grand écran. Et de vivre cette expérience a un peu inusité, car c’est la première fois évidement, mais çà a laissé sa trace.
Je ne me souviens pas de la première émission que j’ai regardé à la télévision, ça n’a pas le même impact, c’est dans notre quotidien, c’est plus routinier mais il y a quelque chose de la cérémonie, du rituel d’entrer dans la salle de cinéma, dans cette salle noire, les lumières s’éteignent, on éteint nos cellulaires, on laisse de côté toutes les distractions pour se laisser porter dans un… un état homérique. Dans le fond on s’abandonne à un rêve qui n’est pas le nôtre, mais un rêve, une histoire. Puis, je pense que l’on ne peut pas vivre ça justement de la même façon qu’en streaming.
Evidement le streaming, nous à tous et toutes sauvés à travers la pandémie, j’ai consommé de manière boulimique des séries, des films mais il y a quelque chose de l’expérience qui se dit, qui est aussi vrai par rapport à des spectacles musicaux. On peut écouter un album sur une plateforme de streaming ou sur vinyle ou on peut aller le vivre en salle avec d’autres gens, avec des humains, sur la… il y a quelque chose, une chimie humaine qui s’opère dans un évènement qu’on partage avec d’autres.
Gwen Madiba :
Wow ! Merci beaucoup. Alors nous avons une question pour vous aujourd’hui de la part de Kenya-Jade Pinto qui a obtenu un Juris Doctor du programme de Common Law à l’Université d’Ottawa. Elle est cinéaste, photographe, documentariste et avocate indo-kényane-canadienne basée à Toronto. Cinéaste en résidence au Refugee Law Lab de l’Université York, elle travaille à la réalisation de son premier long-métrage documentaire. Elle nous rejoint aujourd’hui depuis la Grèce.
Kenya-Jade Pinto :
Alors merci beaucoup et bonjour Tanya ! Il n'est pas facile de naviguer simultanément entre le récit et la non-fiction ? J'aimerais en savoir plus sur les compétences que vous avez réussi à apporter de votre carrière de journaliste à des projets tels qu’Arrival (l'un de mes films préférés !) ? Et même question mais inversée - quelles compétences apportez-vous de votre pratique de la narration à la réalisation de documentaires.
Merci beaucoup pour d’avoir pris le temps de répondre à ma question et félicitations pour tout votre travail et votre succès.
Tanya Lapointe :
Merci beaucoup Kenya-Jade ! Et cela me fait plaisir de vous rencontrer. Et puis c’est une question intéressante. Entre les films de fiction et le documentaire, moi ce qui m’a surpris, c’est à quel point il y a des liens à faire entre les deux. Parce que dans les deux cas, on raconte des histoires. Et donc je dirais que, d’abord de mon parcours de journaliste à documentariste, j’avais une rigueur, une rigueur de… et une éthique pour poser des questions, pour aller chercher dans la réalité, des éléments qui vont émouvoir. Parce qu’autant en télévision, journalisme qu’en documentaire on cherche à raconter l’histoire de quelqu’un qui va susciter l’intérêt, la curiosité, des questions d’un public. Donc je pense que cette curiosité là a été très riche pour moi et cette curiosité là permet aussi d’aller creuser au-delà des questions superficielles. Et c’est ce que j’aime faire avec le documentaire, c’est que, c’est d’approfondir, c’est de prendre le temps. Parce que quand j’étais à Radio-Canada je faisais des reportages de 2 minutes en une journée. Et mon dernier documentaire je l’ai fait sur 2 ans et il dure 78 minutes. Donc c’est vraiment, je dirais une extension, de ce que je faisais… c’est ça, d’approfondissement mais aussi de… le temps nous permet de réfléchir. Car on à pas toujours le temps quand on a un échéancier à tous les jours à 18 h, aux nouvelles.
Maintenant, pour la question inverse, ce que la fiction a amenée au documentaire. En fait, c’est que les deux communiquent parce que même sur le plateau de Dune, moi je suis à côté de Denis qui est réalisateur à chaque jour de tournage puis je regarde l’image, puis s’il il y a quelque chose je me dis mais ce n’est pas, ce n’est pas réaliste ou il y a quelque chose qui cloche, ou… je vais le dire parce que j’ai l’habitude de regarder la réalité des images qui racontent, qui sont tirées de la réalité. Alors j’ai vraiment, je pense un regard critique qui permet de nourrir ce qu’on fait en fiction. Mais la fiction, moi ce qui m’a beaucoup marqué, surtout avec Denis Villeneuve, c’est que, c’est quelqu’un qui parle beaucoup à travers la poésie des images. Comme journaliste documentariste, j’ai un peu l’instinct de dire les choses, d’expliquer les choses. Puis en cinéma, la philosophie de Denis, je ne sais pas si ça s’applique à tous les réalisateurs, réalisatrices mais c’est de laisser vivre, que ce soit un silence… de laisser vivre une image sans mettre de mots pour que en tant que public on reçoive cette image là puis qu’on essaye de l’interpréter, pour… je ne veux pas dire faire travailler le public mais de… de le laisser tirer ses propres conclusions plutôt que de toujours essayer de lui dire quoi penser. Donc moi c’est ça qui nourrit le parcours, puis d’aller chercher l’émotion. Arrival c’est un de mes films préférés aussi, même si j’ai travaillé dessus, mais il y a quelque chose dans cette émotion profonde là qui nous prend un peu par surprise à la fin du film. Je l’ai vu des dizaines fois, chaque fois je pleure, c’est immanquable. C’est une émotion profonde, c’est pas juste de la tristesse, c’est quelque chose qui rejoint l’humanité en moi, puis je pense que ça que j’essaye de faire aussi maintenant avec les documentaires. Je pense que le documentaire a cette, cette force là de raconter des histoires qui peuvent nous émouvoir.
Gwen Madiba :
Bien merci beaucoup Tanya d’avoir répondu à la question de Kenya-Jade ! J’aimerais terminer la conversation d’aujourd’hui par une petite question que nous poserons à tous nos invités cette saison : Que-ce qui vous divertit en ce moment ?
Tanya Lapointe :
Ah ça c’est une bonne question ! Il y a beaucoup de choses qui me divertit, qui me divertissent plutôt. Je commence par quoi ?... On dirait que je manque de temps pour consommer tout ce que je veux voir, il y a des séries… En ce moment c’est Squid Game, j’ai commencé à regarder çà. J’ai regardé Lawrence d’Arabie au cinéma à Toronto il y a quelques semaines. Ce m’a complètement soufflé. C’est un film de 1962 qui est un chef-d’œuvre qui a d’ailleurs inspiré Denis dans la création de Dune parce que ça se passe dans le désert et ça porte un regard très critique sur le colonialisme. Et, j’ai aussi le privilège de côtoyer des amis, des collègues, des connaissances qui écrivent des livres. Et j’ai une bonne amie à moi qui a écrit, Emilie Perreault, qui a écrit Service essentiel, qui est un livre qui justement s’intéresse à la santé culturelle. C’est-à-dire, on parle souvent de la santé mentale, de la santé physique, mais elle, elle dit mais oui, et si on pensait à notre santé culturelle ? Est-ce qu’on ne devrait pas se dire je vais lire un livre par… 30 minutes par jour ou est-ce que je ne devrais pas aller une voir une pièce par mois. Donc je trouve que ce sont des questions qui sont en fait dans son livre, qui sont basées sur la science, à savoir les avantages prouvés de la culture et du divertissement sur nous. Donc c’est un livre que, que je trouve très intéressant et je tiens à dire que j’ai un ancien professeur de l’Université d’Ottawa Denis Bachand qui a écrit un livre sur la Nostalgie que je lis aussi en ce moment que je trouve très intéressant parce que ça parle de nostalgie et j’ai fait un documentaire sur Claude Lafortune qui forcément est venu titiller ma propre nostalgie de ce que je regardais quand j’étais enfant à la télévision, alors Je dirais qu’il y a toutes ces choses, je pourrais en nommer bien d’autres, mais ce sont les œuvres essentielles en ce moment dans ma vie.
Gwen Madiba :
Bien merci beaucoup pour toutes ces recommandations ! Et je suis sûr que moi-même d’ailleurs je vais aller chercher quelques-uns des livres que vous avez mentionnés. Puis, regarder peut-être Squid Game, parce que je n’ai pas encore regardé.
Merci vraiment Tanya, mais pourriez-vous dire à nos auditrices et auditeurs où ils peuvent vous trouver en ligne ?
Tanya Lapointe :
Oui, absolument ! Ben merci d’abord pour cet entretien. Ça a été vraiment un plaisir de vous rencontrer, de rencontrer Kenya-Jade, puis de pouvoir me sentir encore en connexion avec l’Université d’Ottawa qui a été très importante dans mon cheminement, dans mon parcours.
Donc pour où on peut me trouver, je suis sur Twitter @tanyalappointe ; Instagram c’est la même chose et je commence, je suis à mes balbutiements sur TikTok. Si vous êtes sur TikTok, suivez-moi, écrivez-moi ! J’essaye de trouver une façon de communiquer avec les gens et je suis pas du tout experte alors s’il y a des gens qui veulent me suivre sur TikTok c’est @tanyalapointedune.
Gwen Madiba :
Bien merci beaucoup Tanya de nous avoir rejoint sur uOCourant, c’était un plaisir de discuter avec vous aujourd’hui et de découvrir votre parcours dans l’industrie du divertissement. Merci infiniment !
Tanya Lapointe :
Merci, au plaisir !
Gwen Madiba :
uOCourant vous est présenté par l’équipe des Relations avec les diplômés de l’Université d’Ottawa. Il est produit par Rhea Laube avec un thème musical par le diplômé Idris Lawal. Cet épisode a été enregistré avec le soutien de Pop Up Podcasting à Ottawa, en Ontario. Nous rendons hommage au peuple Algonquin, gardien traditionnel de cette terre. Nous reconnaissons le lien sacré de longue date l’unissant à ce territoire qui demeure non cédé. Pour la transcription de cet épisode en anglais et en français, ou pour en savoir plus sur uOCourant, veuillez consultez la description du présent épisode.