Madeleine Meilleur, infatigable femme d’action

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Madeleine Meilleur
Figure de proue de la francophonie ontarienne, Madeleine Meilleur (LL.L. 1983) a eu pendant 25 ans une carrière formidable en politique municipale et provinciale. Armée de son désir d’améliorer la condition humaine et d’une audace à toute épreuve, elle a fait bouger les choses partout où elle est passée.

La liste des réalisations de Madeleine Meilleur est impressionnante. D’abord infirmière, puis avocate, elle est élue conseillère municipale de Vanier en 1991, conseillère régionale en 1994, rôle qu’elle a conservé dans la ville fusionnée d’Ottawa en 2000. En 2003, elle fait le saut en politique provinciale dans la circonscription d’Ottawa-Vanier sous la bannière libérale, où elle sera élue à quatre reprises. « Mon défi à chaque élection, c’était d’augmenter ma majorité. Je voulais bien représenter les citoyens, être à l’écoute. J’ai adoré être à leur service, j’aimais travailler avec les gens, leur donner une voix. »

Au fil des ans, elle a été tour à tour ministre de la Culture, ministre des Services sociaux et communautaires, puis ministre de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels sous le gouvernement de Dalton McGuinty. Quand Kathleen Wynne lui offre d’être procureure générale de l’Ontario, poste qu’elle occupera jusqu’à son retrait de la vie politique en 2016, c’est la consécration. J’ai dit à la première ministre : « Quel beau cadeau! J’accepte le poste au nom des francophones et des femmes », raconte-t-elle au moment de sa nomination en 2014, dans JUSTE, le magazine de l’Association du Barreau de l’Ontario.

« Ma plus grande réalisation en francophonie? La création du Commissariat aux services en français, qui soutient la communauté francophone ontarienne en veillant à l’application de la Loi sur les services en français », affirme celle qui a été aussi ministre des Affaires francophones pendant près de 13 ans. Dans le domaine de la francophonie, Madeleine Meilleur a également travaillé à la création d’une politique sur le bilinguisme à Ottawa et adopté une définition inclusive du terme francophone pour mieux refléter la diversité de la communauté francophone de l’Ontario. Elle a milité contre la fermeture de l’Hôpital Montfort, obtenu le financement nécessaire à l’établissement de trois maisons pour femmes francophones victimes de violence, et plus encore. En tant que procureure générale de l’Ontario, elle a notamment fait du bilinguisme l’un des critères de nomination à des postes du système judiciaire. 

Un père féministe
 

Madeleine Meilleur est née en 1948 dans le village de Kiamika, dans les Hautes-Laurentides, dans une famille aimante de sept enfants – six filles et un garçon. Son père, propriétaire d’une scierie et organisateur politique dans le village, est en avance sur son époque : il tient à ce que ses filles fassent des études, apprennent l’anglais, soient indépendantes et n’aient peur de personne. À 17 ans, sa fille Madeleine choisit de suivre une formation d’infirmière à l’Hôpital Montfort à Ottawa, celui-là même qu’elle contribuera à sauver une trentaine d’années plus tard.

Bien qu’elle soit venue à Ottawa pour apprendre l’anglais, c’est le français qui deviendra le cheval de bataille de la future politicienne. « Quand j’ai commencé à travailler en politique, j’ai été témoin de toutes les luttes de la communauté franco-ontarienne et de sa persévérance pour garder sa langue », souligne-t-elle. « La valeur du français, je l’ai comprise ici. » Alors qu’elle est infirmière à Montfort, elle participe à la création du syndicat des infirmières de l’Ontario, puis elle décide de retourner aux études en droit. « J’ai toujours dit que l’Université d’Ottawa a changé ma vie. Mes études en droit m’ont donné beaucoup de confiance, elles ont été un tremplin. »

Un flot d’hommages
 

En 2016, après une carrière politique de 25 ans, l’annonce de son départ crée une onde de choc, la communauté francophone ontarienne est en deuil. Les hommages viennent de partout, de l’ancien conseiller municipal Mathieu Fleury (B.Sc. 2008) qui la considérait comme sa mentore et admirait sa capacité à rassembler, à France Gélinas, députée et ancienne porte-parole aux Affaires francophones au NPD de l’Ontario, qui estimait qu’elle était francophone avant d’être libérale. De son côté, l’avocat franco-ontarien de renom, Me Ronald Caza (LL.B. 1987), avait exprimé toute son admiration pour le travail extraordinaire de Mme Meilleur.  Tous ses succès lui ont valu de nombreuses distinctions prestigieuses, dont l’Ordre du mérite de la Section de droit civil de l’Université d’Ottawa, l’Ordre d’Ottawa et le titre de chevalière de la Légion d’honneurde la République française.

Une fois retraitée de la vie politique, elle est demeurée très active. Membre de plusieurs conseils d’administration, dont le comité consultatif de l’Institut de recherche LIFE de l’Université d’Ottawa, elle a présenté aussi des conférences et offert des formations en gouvernance publique et en leadership auprès d’acteurs du monde politique en Irak et en Afrique, particulièrement des femmes. Comme son père, Madeleine Meilleur est assurément une grande féministe. « Je crois fermement que la paix dans le monde passera par les femmes à la tête des pays, et j’encourage toujours les femmes à aller en politique et à prendre des postes de responsabilité. » 

Encore et toujours, la francophonie…
 

À l’automne 2020, à 71 ans et en pleine pandémie, elle accepte de devenir directrice générale du Muséoparc Vanier, seule institution muséale francophone à Ottawa, qui exploite aussi une authentique cabane à sucre au cœur d’une érablière urbaine. Quatre ans après l’arrivée de Madeleine Meilleur, l’endroit est transformé : on y présente une nouvelle exposition permanente, Vanier. Notre place, qui met en lumière l’histoire de la francophonie ontarienne et plus particulièrement celle de Vanier, et la cabane à sucre qui avait été incendiée en 2020 est reconstruite. 

Madeleine Meilleur a brisé son lot de plafonds de verre. Elle en a rencontré des intimidateurs, des réactionnaires, mais elle a poursuivi ses objectifs en travaillant d’arrache-pied et en sachant bien s’entourer, sans jamais tomber dans le cynisme ni l’amertume. Quelle femme inspirante!