Triple diplômée de l’Université d’Ottawa, Renee St. Germain (B.A. 2011, B.Éd. 2013, M.Éd. 2016), membre de la Première Nation Rama, est directrice de l’éducation et des langues à l’Assemblée des Premières Nations (APN). Elle siège également au conseil des diplômées et diplômés autochtones de l’Université d’Ottawa, soucieuse, dit-elle, de « redonner à la communauté et tisser des liens ».
Cet esprit d’entraide et de solidarité est une constante dans sa vie.
Lorsqu’elle était enfant, sa dyslexie lui causait des problèmes d’apprentissage à l’école, au centre-ville de Toronto où elle a grandi. C’est un membre du personnel enseignant au secondaire qui l’a encouragée à poursuivre des études universitaires. Elle a arrêté son choix sur le campus du centre-ville de l’Université d’Ottawa, pour sa relative proximité de Toronto et son programme d’études en éthique et société.
Elle avait déjà réalisé l’importance de pouvoir compter sur le soutien de l’environnement d’apprentissage. « On m’a souvent dit à l’école que mes difficultés d’apprentissage seraient toujours un handicap, se rappelle-t-elle. Avec le recul, je me rends compte que je dois ma réussite aux enseignantes et enseignants qui, au contraire, m’ont poussée à persévérer. Et je voulais suivre leur exemple. »
Après l’obtention de deux baccalauréats de l’Université d’Ottawa, elle a entrepris une maîtrise en éducation le jour même où elle commençait à travailler comme éducatrice de la petite enfance au Makonsag Aboriginal Head Start. Ce centre, l’un des rares services de garde d’Ottawa dirigé par des Autochtones, était en forte demande pour son programme culturel.
En plus de s’occuper d’enfants de deux à six ans, elle s’est trouvée à travailler de près avec les familles et les personnes ayant la garde des enfants : « Les familles autochtones ont besoin d’aide, surtout en milieu urbain, soutient-elle. Bien souvent, elles ne peuvent plus compter sur le réseau qu’elles avaient là d’où elles viennent. »
Renee estime que le volet culturel de Head Start est essentiel pour créer un esprit communautaire et faciliter la transition des enfants vers le système d’éducation public. C’était aussi un bel apprentissage pour elle. « Cette expérience a renforcé mon identité de membre d’une Première Nation et m’a rapprochée de ma culture, dit-elle. Comme j’ai grandi loin de ma communauté, j’apprenais tout autant que les enfants. »
Son emploi à Head Start a aussi influencé l’objet de sa maîtrise. Après sa journée de travail, elle enchaînait sur la recherche de solutions sociétales pour faciliter le parcours scolaire des Autochtones. À leur tour, les résultats de sa recherche lui servent encore aujourd’hui dans son travail à l’APN.
De la pratique à l’élaboration de politiques
Après l’obtention de sa maîtrise en 2016, Renee St. Germain a décroché l’emploi de ses rêves : un poste d’analyste de politiques en matière d’éducation à l’APN.
Elle n’aurait pas trouvé meilleur moment pour démarrer sa carrière, car le gouvernement fédéral venait d’affecter 2,6 milliards de dollars à la transformation du système d’éducation pour les Premières Nations. Renee faisait partie de l’équipe qui a proposé une nouvelle approche du financement du système d’éducation dans les réserves des Premières Nations, au terme d’une année de consultations auprès de groupes nationaux et régionaux d’un bout à l’autre du pays.
« Participer à la transformation du système d’éducation des Premières Nations, c’est ce qui m’inspire la plus grande fierté, confie-t-elle. Maintenant, ces communautés peuvent négocier avec le gouvernement fédéral des ententes de financement qui correspondent à leurs besoins en matière d’éducation. Ce n’était pas possible avant. »
Elle mentionne d’autres changements de politiques, comme l’injection de fonds supplémentaires pour la revitalisation des langues et la culture des Premières Nations, ainsi que la possibilité de mettre en place des programmes de maternelle à temps plein.
Malgré ces avancées, elle souligne qu’il reste beaucoup de travail à faire et de besoins financiers : « Ce n’est pas toujours facile de travailler dans la sphère politique. Nous avons apporté de grands changements, mais leur application concrète au sein des communautés, c’est une autre paire de manches. Il faut du temps, mais de nombreuses générations futures en bénéficieront. »
Aujourd’hui directrice de l’éducation et des langues à l’APN, elle entend y rester encore plusieurs années pour apporter d’autres changements de politiques, en particulier dans l’enseignement postsecondaire. Son action au sein du conseil des diplômées et diplômés autochtones de l’Université d’Ottawa s’inscrit dans le prolongement de cette mission qu’elle s’est donnée.
« Une bonne partie de notre travail dans le domaine de l’enseignement postsecondaire tourne autour des cercles de soutien, ces structures essentielles à la réussite des étudiantes et étudiants autochtones, qui doivent souvent quitter leur communauté pour aller en ville, explique-t-elle. C’est ce qui nous intéresse à l’APN, et je pense que mon implication à l’Université peut nous être utile. »
Renee affirme que l’éducation sera toujours un élément central dans sa vie : « Même si je travaille dans les politiques et la gestion, c’est important pour moi de maintenir un lien avec le monde de l’éducation, quel que soit mon parcours de vie. J’y tiens beaucoup. »