« L’idée d’“accommodement” est porteuse d’une hiérarchie implicite : celui qui accorde à l’autre des accommodements se trouve en position de pouvoir », dit celle qui est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en diversité religieuse et changement social à l’Université d’Ottawa.
Les dernières recherches de Lori Beaman portent sur ce qu’elle appelle « l’égalité profonde », vue comme solution de rechange à la tolérance et aux accommodements. Cette approche novatrice lui a valu en 2017 le prestigieux prix Savoir du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), qui a salué « l’envergure, la profondeur et l’originalité de ses travaux. »
« L’égalité profonde oblige à négocier la différence », explique la chercheuse. « Elle a à voir avec la façon dont les gens se débrouillent pour que les autres se sentent valorisés et inclus. Il s’agit moins de vivre ensemble que de bien vivre ensemble. »
Souvent, les problèmes et les conflits nous intéressent davantage, alors que les gestes pratiqués quotidiennement par les gens ordinaires pour négocier les différences culturelles et religieuses retiennent rarement l’attention. Il y a pourtant là des récits de réussite qui méritent d’être racontés, plaide Lori Beaman, parce qu’ils nous éclairent sur l’égalité profonde en tant que modèle de choix par rapport à la tolérance et à l’accommodement.
Afin de trouver ces récits, Lori Beaman a dépouillé les 900 mémoires soumis à la commission Bouchard-Taylor de 2007, qui s’est penchée sur les accommodements raisonnables consentis aux communautés minoritaires au Québec, et elle a analysé des centaines d’entrevues réalisées auprès de jeunes immigrants adultes partout au Canada, ainsi qu’auprès de musulmans à St. John’s et à Montréal. Elle a aussi examiné des milliers d’affaires judiciaires, de livres et de films.