Les enfants non-binaires et transgenres | par Claudia Guertin
À la naissance, les enfants se font imposer non seulement un prénom et nom, mais également un sexe. Ce sexe leur impose un genre. Un genre qui, parfois, ne reflète pas leur réelle identité.
En effet, le sexe et le genre sont deux concepts différents. Le sexe est basé principalement sur les organes génitaux à la naissance, tandis que le genre réfère au genre auquel la personne s’associe intimement. Ce faisant, le genre peut différer du sexe assigné (Statistique Canada).
L’identité de genre se développe au cours de l’enfance en trois étapes. Les enfants agiront de façon dite féminine ou masculine tout dépendamment du genre auquel ils/elles s’associent. Il y a également les enfants qui ne s’associent à aucun genre, ou même ceux qui s’associent aux deux.
À la suite de ce développement, les enfants peuvent vouloir changer de sexe ou vouloir changer de genre ou se dissocier de tout genre afin de refléter qui ils/elles sont intimement. Respectivement, il s’agit d’enfants transgenres et d’enfants non-binaires.
Jugement historique
Le 28 janvier 2021, le juge Moore de la Cour supérieure du Québec rendait un jugement portant sur les droits des personnes non-binaires et transgenres. Celui-ci invalide certains articles qui portent atteinte au droit à l’égalité des personnes non-binaires et transgenres (Centre for Gender Advocacy c. Attorney General of Quebec, 2021 QCCS 191).
En premier lieu, en vertu du code civil du Québec, l’acte de naissance doit contenir le sexe de l’enfant, c'est-à-dire féminin ou masculin afin de pouvoir identifier la personne (Gouvernement du Québec, 2021). Cette obligation peut créer de la confusion ou de la souffrance à l’enfant non-binaire ou transgenre une fois qu’il/elle a déterminé son identité de genre qui pourrait ne pas correspondre au sexe assigné à la naissance.
Également, la désignation du sexe sur l’acte et sur tout autre document officiel est un rappel constant qu’un enfant non-binaire ou transgenre n’est pas légalement qui il/elle est et que sa véritable identité n’est pas reconnue. Souvent, ces enfants doivent dévoiler à des inconnus pourquoi leur document les désigne d’un tel sexe, alors que la personne leur mentionne qu’elle est du sexe opposé. Ainsi, un élément intime qui devrait être leur choix de dévoiler ou non, devient connaissance de tous. De plus, pour un enfant, une telle explication peut être difficile à faire à une personne en autorité. L’enfant ne voudra pas non plus être traité différemment par ses pairs, il/elle voudra être vu dans le genre qu’il/elle s’identifie.
Par conséquent, l’intérêt supérieur de l’enfant est brimé dans son développement et dans la protection de son identité (Convention relative aux droits des enfants, 1989). Il faut également empêcher toute discrimination reliée au sexe et au genre, ce qui peut arriver lorsque les gens ont accès à l’information de transgenre ou de non-binaire de l’enfant (Convention relative aux droits des enfants, 1989).
En second lieu, afin de pouvoir changer leur genre sur les documents gouvernementaux, les enfants de moins de quatorze ans ne peuvent déposer eux-mêmes une demande; leurs parents doivent remplir un formulaire. Quant aux enfants de plus de quatorze ans, ils/elles peuvent déposer eux-mêmes une demande ou leurs parents. Dans tous les cas, pour un tel changement chez un mineur, la demande doit être accompagnée d’une lettre d’un professionnel de la santé déclarant avoir évalué l’enfant. Une telle lettre n’est toutefois pas demandée pour un majeur (Gouvernement du Québec, 2021).
Ces obligations peuvent créer des difficultés pour les enfants non-binaires et transgenres. En effet, si leurs parents refusent de reconnaitre le genre auquel s’associe l’enfant, il/elle peut en subir des séquelles psychologiques sur le long terme et avoir de la difficulté à affirmer leur véritable identité. Les études démontrent même que les jeunes sont plus enclins au suicide lorsque leurs parents ne les soutiennent pas dans leur démarche.
De plus, une lettre d’un professionnel de la santé peut être difficile à se procurer pour les enfants. Les coûts engendrés peuvent également être un obstacle supplémentaire, surtout s’ils/elles ne sont pas supportés par leurs parents. Une telle obligation est discriminatoire envers les enfants, car seulement eux/elles peuvent savoir leur identité, non pas un professionnel et certainement pas une variété de tests.
Conclusion
Grâce à ce jugement, les articles problématiques du Code civil du Québec seront changés. L’objectif est de donner la légitimé tant aux enfants non-binaires que transgenres, de supprimer toute discrimination et de promouvoir l’inclusivité totale.
Permettre à ces enfants de mettre le genre qui les représente sur les actes officiels, est leur donner l’égalité et les inclure tels qu’ils/elles sont. Cette reconnaissance, celle d’avoir finalement les mêmes droits que tous les autres, leur permettra de faire partie intégrante de la société.
Références
Centre for Gender Advocacy c. Attorney General of Quebec, 2021 QCCS 191.
Statistique Canada, Variables du genre et du sexe, [en ligne] : https://www.statcan.gc.ca/fra/concepts/definitions/variable-genre-sexe (consulté le 1er octobre 2021).
Gouvernement du Québec – Directeur de l’état civil, Changement de la mention du sexe, [en ligne] : http://www.etatcivil.gouv.qc.ca/fr/changement-sexe.html (consulté le 29 septembre 2021).