Le 6 septembre 2019, le professeur Thomas Burelli a soutenu sa thèse : Ni vues, ni connues : étude des contributions des acteurs des milieux autochtones et universitaires à l’encadrement de la circulation des savoirs traditionnels au Canada.
Voici le résumé qu’en fait le professeur Burelli : « La circulation des savoirs traditionnels constitue une problématique juridique qui a fait l’objet de nombreuses réflexions et développements au sein de différents forums depuis les années 1990. Il est ainsi possible d’observer l’émergence de nombreux principes et mécanismes à l’échelle internationale. Au niveau national, un nombre restreint d’États ont néanmoins adopté des dispositions relatives à la protection et l’utilisation des savoirs traditionnels. Au-delà des évolutions du droit international et des législations nationales, très peu d’attention a été portée sur les contributions normatives des acteurs des milieux universitaires et autochtones. Les Autochtones et les chercheurs figurent pourtant parmi les acteurs sociaux qui sont les plus directement concernés par la problématique de la circulation des savoirs traditionnels et potentiellement les plus conscients des enjeux dans ce domaine. Leurs contributions demeurent toutefois dans beaucoup de cas largement sous-estimées et méconnues. C’est le cas en particulier au Canada où plusieurs contributions majeures sont facilement identifiables, laissant présager un fort dynamisme de la part des acteurs canadiens dans ce domaine.
Sans pour autant remettre en cause la pertinence de cadres nationaux, l’ignorance ou le peu d’intérêt qui entourent les contributions développées ou mobilisées par les Autochtones et les chercheurs constituent selon nous un gaspillage d’expériences du point de vue de la diversité sociale et normative de nos sociétés. En effet, ces contributions normatives pourraient notamment être utilisées par d’autres au Canada ou ailleurs dans le monde, comme source potentielle d’inspiration ou de modèle.
Nous sommes parvenus à identifier 121 instruments parmi lesquels 62 cadres généraux (49 cadres développés ou relayés par les institutions autochtones et 13 issus du monde de la recherche) et 59 contrats (22 sont des contrats négociés (6 accords de collaboration et 16 formulaires de consentement) et 37 sont des contrats modèles (32 développés ou relayés par les institutions autochtones et 5 par le milieu de la recherche)). À partir de ce corpus, nous avons recensé les différents types d’acteurs autochtones et universitaires ayant produit ou mobilisé des instruments d’encadrement de la circulation des savoirs traditionnels observables au Canada. Nous avons également procédé à une analyse minutieuse du contenu de chacun des instruments identifiés ce qui nous a permis de dégager les thèmes abordés au sein de notre corpus. »
À qui ou à quoi servira cette thèse? « Aux chercheurs et aux communautés pour développer des cadres éthiques. Pour prévenir les actes de bio piraterie. Au gouvernement canadien pour respecter les cadres autochtones. Aux organismes et institutions qui ont développé des cadres (puisque j’analyse de manière critique les cadres existants). »
Fait intéressant et légèrement inusité : le professeur Burelli a fait son doctorat en cotutelle sous la supervision des professeurs François Féral, de l’Université de Perpignan et de Sophie Thériault, de l’Université d’Ottawa. Comme la défense a eu lieu à Ottawa (où il enseigne déjà), ce sont plus d’une dizaine de collègues, parents et amis qui sont venus l’entendre et le soutenir pour l’occasion et ils n’ont pas été déçus puisque Thomas, orateur hors pair, a brillamment exposé ses idées et répondu aux commentaires et questions du jury avec justesse et finesse, les faisant même rire lorsque pour illustrer un exemple, il a fait une comparaison avec les Pokémon… Probablement une première dans l’histoire des défenses de thèses!
Le jury était composé des professeurs Hugo Asselin, de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, Karine Gentelet, de l’Université du Québec en Outaouais, Konstantia Koutouki, de l’Université de Montréal et de Florence Galetti et Mathieu Doat, tous deux de l’Institut de recherche pour le développement en France (IRD) et de l’Université de Perpignan. La présidence de la séance a été assurée par Susan Spronk, professeure à la Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa.
Le professeur et docteur en droit Thomas Burelli remercie le Conseil de recherche en sciences humaines (CRSH) pour la Bourse Joseph-Armand-Bombardier.
Sarah Berger Richardson, nouvellement professeure à la Section de droit civil, est elle aussi devenue docteure en droit après avoir brillamment soutenu sa thèse à l’Université McGill, le 20 septembre dernier. Pour l’occasion, le jury était composé des professeurs Jaye Ellis, Nandini Ramanujam et Vrinda Narain, toutes trois de l’Université McGill, de même que la professeure Geneviève Parent de l’Université Laval.
La thèse de la professeure Berger Richardson, Is Safe Food Good Food? Looking beyond safety to regulate good food systems, examine la réglementation du risque en droit agroalimentaire, particulièrement en ce qui concerne la sécurité sanitaire et l’abattage des animaux pour la viande. Partant du principe que la salubrité ne s’évalue pas dans l’abstrait, cette thèse examine les facteurs qui influencent les déterminations du risque dans la production de la viande. En effet, étant donné que l’élimination totale des risques dans nos systèmes alimentaires est impossible, les politiques et règlements de salubrité visent à maintenir un niveau de risque acceptable. Or, la détermination de ce qui est acceptable résulte souvent de délibérations sur comment prioriser les spécificités locales, qu’elles soient d’ordre social, culturel, moral ou économique. Ce projet s’intéresse aux régimes juridiques dans trois régions du Canada et des États-Unis : l’Ontario, le Québec et le Vermont. Par le biais d’entretiens avec des éleveurs, des employés d’établissements d’abattage et de transformation, des restaurateurs, des bouchers, et des décideurs publics, cette étude de terrain examine comment la détermination du risque acceptable pour assurer la sécurité des consommateurs implique des jugements de valeurs relatifs à la manière dont les animaux destinés à la consommation humaine devraient être élevés et abattus.
Le projet établit un dialogue entre les textes législatifs et réglementaires, les fonctionnaires qui les appliquent et les acteurs de l’industrie qui doivent les respecter.
L'objectif de l’investigation est double. Premièrement, la thèse de Sarah Berger Richardson cherche à problématiser la perception selon laquelle la gouvernance de la sécurité sanitaire des aliments est plus objective, ou moins subjective, que les autres domaines du droit et des politiques agroalimentaires. Ce faisant, elle conteste l'opinion selon laquelle les règlements fondés sur des données probantes qui favorisent la santé et le bien-être général de notre société échappent à tout examen éthique. Deuxièmement, au-delà de décrire les règlements sur la salubrité des aliments tels qu'ils sont, le projet avance un argument sur la forme que ces règlements devraient prendre et sur la façon d'y parvenir.
Pour la diriger dans la rédaction, Sarah a pu compter sur le professeur Hoi Kong qui enseignait à McGill jusqu’en 2018, avant de joindre le corps professoral de l’Université de Colombie-Britannique.
Madame Berger Richardson s’est vu octroyer trois bourses doctorales : la Bourse de doctorat du Center for International Governance Innovation (2014-2015), la Graduate Dean’s Award de l’Université McGill (2014-2017), ainsi que la prestigieuse Bourse Joseph-Armand Bombardier BESC du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) pour la période 2015 à 2018. Elle tient aussi à souligner l’appui de la communauté de juristes en droit agroalimentaire au Canada, notamment Don Buckingham, ancien professeur à l’Université d’Ottawa, maintenant directeur de L’Institut canadien des politiques agroalimentaires (ICPA) et Luc Bélanger*, président de la Commission de révision agricole du Canada.
Très heureuse de pouvoir maintenant mettre la soutenance de thèse derrière elle, la professeure Berger Richardson a très hâte de poursuivre son projet de recherche ici-même, à Ottawa : « C’est vraiment un privilège […] je suis agréablement surprise par l’enthousiasme de mes collègues pour mes projets de recherche et de découvrir toutes les possibilités de collaboration qui se présentent. De plus, je remercie sincèrement les personnes qui ont accepté de participer aux entrevues qui faisaient parties de ma recherche; j’ai hâte de maintenir ces relations et d’en développer de nouvelles avec des producteurs dans la région d’Ottawa-Gatineau. »
La Section de droit civil félicite ses deux nouveaux docteurs en droit, à qui elle souhaite une longue et fructueuse carrière en enseignement et en recherche!
Pour en savoir un peu plus sur nos deux nouveaux docteurs en droits et leurs travaux, lisez ces deux articles récemment publiés dans notre site Web:
Apprentissage en cours! La formation des étudiant.e.s en droit par le jeu (Thomas Burelli)
La Section de droit civil amorcera l’année avec quatre nouveaux professeurs réguliers! (Sarah Berger Richardson et al.)
*Me Bélanger est diplômé de la Section de droit civil (1999). Lisez l’article que nous avions publié lors de sa nomination à la présidence de la CRAG : https://droitcivil.uottawa.ca/fr/nouvelles/diplome-luc-belanger-nomme-president-commission-revision-agricole-du-canada