La Revue générale de droit (RGD) de la Section de droit civil de l’Université d’Ottawa a été fondée en 1970. Elle publie deux numéros par année et un numéro hors-série, majoritairement en français, mais également dans la langue de Shakespeare. Les écrits d’autrices et d’auteurs aguerris y côtoient ceux de la relève et s’intéressent au phénomène juridique, entendu dans son sens large, selon des approches scientifiques diversifiées. Ainsi, onze autrices et auteurs ont signé les huit articles du volume 51 numéro un dont voici un aperçu.
Certains peuples autochtones du Québec revendiquent des droits ancestraux sur le territoire visé par la Convention de la Baie-James et du Nord québécois alors qu’ils ne sont pas signataires de cette dernière. Or, la loi adoptée par le Parlement du Canada en 1977 pour donner effet à la Convention prétend éteindre les droits et les revendications territoriaux de « tous les Indiens et de tous les Inuit » dans le territoire « conventionné », et non seulement ceux des Cris et des Inuit qui sont parties à la Convention. Dans cet article, le professeur à la Section de droit civil et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les peuples autochtones, Ghislain Otis, évalue la conformité de cette disposition extinctive avec la Déclaration canadienne des droits. Il conclut qu’elle viole la Déclaration en privant, de manière injustifiée, les membres des peuples non signataires du droit de ne pas faire l’objet de discrimination raciale dans la jouissance de leur bien.
Angela Campbell est professeure titulaire à la Faculté de droit de McGill. Elle effectue ses recherches et enseigne dans les domaines du droit de la famille, du droit de la santé, du droit pénal, du droit des successions et des études juridiques féministes. Avec l’article Vulnerability and Volition in the Testamentary Law of Undue Influence and Captation, elle émet l’hypothèse que les contestations de testaments fondées sur l’influence indue et la captation se produiront le plus souvent lorsque le testateur est âgé ou en situation de handicap au moment de l’exécution des volontés testamentaires. La jurisprudence de la common law et du droit civil québécois sera ici examinée afin d’évaluer cette thèse.
La pandémie de COVID-19 a bousculé nos habitudes et dans tous les domaines, les façons de faire ont énormément évolué en peu de temps. Le virtuel a bien souvent supplanté le présentiel obligeant les notaires à se questionner sur l’un des aspects le plus important de leur profession : comment accomplir le devoir d’authentification personnelle lorsque les parties ne se rencontrent pas physiquement en présence des notaires? Voilà le sujet sur lequel se penche Naivi Chicok Barreda, professeure à la Section de droit civil, dans l’article : De la COVID-19 à l’acte électronique à distance : réflexions sur les enjeux de l’authenticité dématérialisée.
Hélène Piquet, dans un texte intitulé Des enjeux des audiences à distance, s’est pour sa part intéressée aux orientations quant aux audiences en mode semi-virtuel que la Cour du Québec a publiées le 30 novembre 2020 et qui s’inscrivent dans un courant mondial de réflexion sur la dématérialisation de la justice. La Cour du Québec a axé son travail sur deux enjeux indissociables : le premier a pour objet une rectification des représentations que les justiciables se font de la justice dans le contexte des audiences à distance; le second vise à assurer que l’audience à distance en est une de qualité. L’autrice est professeure titulaire au Département des sciences juridiques de l’UQAM.
Shana Chaffai-Parent est doctorante en cotutelle à l’Université de Montréal et à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Catherine Piché est professeure titulaire, vice-doyenne à la recherche et aux affaires internationales à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Ensemble elles signent l’article La primauté de l’efficacité dans l’administration d’une justice en crise : solutions judiciaires dans une perspective nord-américaine, où elles rappellent que la pandémie de COVID-19 a entraîné un ralentissement des activités de la société civile, de l’économie et de la justice. Les tribunaux ont ainsi été ralentis, sinon paralysés, en plus de devoir mettre en place une justice d’urgence par processus hybrides ou spéciaux. Dans un tel contexte, la recherche de mesures d’efficacité devient vitale. Le présent article contribue donc à la réflexion entreprise sur l’efficacité du système judiciaire en temps de pandémie et de post-pandémie.
Les enjeux juridictionnels de la future Agence canadienne de l’eau est un article rédigé par un tandem d’auteurs constitué de la professeure à la Section de droit civil, Marie-France Fortin et d’Alexandre Lillo, co-titulaire de la Chaire de recherche en innovation pédagogique et professeur à temps partiel à la Section de droit civil. Ils sont respectivement chercheure principale et chercheur postdoctoral au sein du projet « Forum sur le droit et la gouvernance de l’eau » de l’Université d’Ottawa. Dans le cadre des consultations publiques menées en début d’année 2021, Environnement et Changement climatique a récemment publié un document de discussion intitulé « Vers la création de l’Agence canadienne de l’eau », dont les premiers éléments révélés demeurent à la fois larges et généraux. La généralité du document de discussion permet aux deux auteurs d’explorer les scénarios juridiques éventuels de la future Agence canadienne de l’eau, ainsi que leurs possibles assises juridictionnelles.
Employee Participation Rights During Company Restructuring : Lessons Learned from the “Capability for Voice” in British Law, de l’avocate et docteure en droit Migen Dibra, est une étude utilisant la méthode du droit comparé et, comme cadre théorique, la « capacité de pouvoir s’exprimer » (concept mis au point par Amartya Sen), comme moyen pour évaluer les conséquences et la pertinence des lois reconnaissant des droits élargis aux salariés en matière de participation dans les décisions économiques de l’entreprise. Le cas du Royaume-Uni est particulièrement intéressant pour le Canada et le Québec, puisqu’au départ, tout comme en Amérique du Nord, ce pays avait une approche de laissez-faire collectif en matière de droit de participation des salariés lors des restructurations et ce n’est qu’en raison des directives de l’Union européenne sur le sujet qu’il s’est doté de procédures d’information et de consultation.
Le dernier article de ce numéro de la Revue générale de droit est de Félix Mathieu et David Guénette. Le premier est professeur adjoint au département de science politique à l’Université de Winnipeg et le second est chercheur postdoctoral à la Faculté de droit de l’Université McGill, rattaché à la Chaire Peter MacKell sur le fédéralisme. Ils sont tous deux chercheurs associés à la Chaire de recherche en études québécoises et canadiennes. Les coauteurs se demandent comment les sociétés fragmentées parviennent à incorporer le consociationalisme – aussi appelé démocratie de concordance – et ses principes à leur système juridique. Dans De la mobilisation du consociationalisme par le droit : Comprendre les systèmes juridiques des sociétés fragmentées à la lumière de leurs trajectoires sociopolitiques, ils se penchent sur le cas de trois démocraties et consociatives occidentales : la Belgique, l’Irlande du Nord et le Tyrol du Sud (Italie). L’objectif des chercheurs est double : mieux comprendre le contexte dans lequel les acteurs politiques de ces sociétés ont entrepris d’introduire des mécanismes de partage du pouvoir et, par ailleurs, être en mesure de saisir comment le consociationalisme a pu y être mobilisé par le droit.
Tous les articles soumis à la Revue générale de droit font l’objet d’un processus rigoureux d’évaluation qui en assure la qualité. Les textes sont évalués anonymement par des universitaires experts du domaine traité. La RGD est dirigée par Michelle Giroux, professeure titulaire à la Section de droit civil, assistée de Diane Gagnon, adjointe aux publications, ainsi que du Comité facultaire, du Conseil scientifique de la Revue, de même que de plusieurs étudiantes et étudiants inscrits, après sélection, au cours d’assistanat à la revue offert dans le programme de licence en droit à la Section de droit civil.
Largement diffusée, la Revue générale de droit est disponible en version papier chez Wilson & Lafleur et en version électronique sur les plateformes de recherche HeinOnline et Soquij, de même que sur celle du consortium Érudit, aujourd’hui l’une des plus importantes banques de recherche interdisciplinaires francophones au Canada et ailleurs.