Évelyne Jean-Bouchard a été coopérante volontaire en Haïti et dans plusieurs pays d’Afrique pendant ses études universitaires.
« Je suis tombée dans la soupe », a-t-elle dit pour expliquer son engagement à l’égard des populations vulnérables. Son père a travaillé toute sa vie en développement international et déménageait la famille là où le travail l’appelait.
C’est toutefois aux côtés des femmes autochtones en 2008 qu’elle s’est rendu compte de la complexité de certains enjeux sociaux. Elle en est venue à la conclusion que des études doctorales s’imposaient pour trouver des solutions.
« J’avais le goût d’aiguiser mon esprit d’analyse et mes méthodes de recherche. Le doctorat est en effet un moment privilégié pour lire, sonder le terrain et réfléchir de façon indépendante. »
Elle a décidé de s’inscrire à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa après un colloque du Centre de recherche et d’enseignement des droits de la personne (CREDR). Elle accompagnait alors la présidente de l’Association des femmes autochtones du Québec, qui avait été invitée par la professeure Lucie Lamarche, directrice du Centre à l’époque.
« Le directeur de recherche joue un rôle extrêmement important dans la démarche intellectuelle. Je cherchais quelqu’un avec qui j’allais pouvoir bien travailler. Cette personne, c’était la professeure Lamarche. Elle partageait mes convictions sur l’importance de travailler directement avec les populations. »
Évelyne estime que le CREDR a facilité son intégration à la Faculté de droit en lui offrant un espace de travail, un appui intellectuel pour ses travaux et un environnement propice à la collégialité. Cela l’a amenée à codiriger l’Association des étudiants diplômés en droit pendant deux ans.
Le Centre a aussi favorisé l’obtention de bourses qui se sont avérées cruciales pour sa thèse intitulée : Le rapport des Congolaises au droit et à leurs droits: participer aux processus de changements normatifs à l’est de la RDC.
Elle a décroché la Bourse du Centre de recherche en développement international du Canada et la prestigieuse Bourse d’études supérieures Vanier du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada soulignant le leadership des étudiants.
« C’est grâce à ces bourses que j’ai réussi à faire une recherche aussi approfondie sur le terrain. J’ai passé neuf mois à l’est du Congo où l’État était quasiment absent. »
Évelyne a analysé les enjeux liés aux droits des femmes du point de vue de l’anthropologie juridique.
« On pense que les coutumes africaines sont fondamentalement patriarcales et que les femmes sont victimes de leur propre culture. Mais quand on y regarde de plus près, on découvre qu’au niveau coutumier, les chefs locaux appliquent un ordre négocié et non pas imposé. »
Elle a notamment identifié les stratégies mises de l’avant par les associations de femmes pour obtenir des chefs locaux une parcelle de terre et permettre aux filles mères de subvenir à leurs besoins.
« À travers leurs réseaux, les femmes sont en mesure de mobiliser du capital social et de le transférer au niveau communautaire afin de revendiquer leurs droits. »
Évelyne est de retour auprès des femmes autochtones pour mener une recherche postdoctorale sur les droits des femmes.
« Il y a beaucoup d’enjeux de pouvoir et d’accès aux ressources, que ce soit au Canada ou en Afrique. Mais on se rend compte que ces communautés, malgré leurs spécificités, vivent généralement les mêmes problématiques. »