Projet de recherche sur la discrimination et le soutien en santé mentale pour les élèves noirs en Ontario

Recherche
Santé mentale
Médecine
Éducation
Interconnectome Cœur-Cerveau
Antiracisme
Communauté noire
Mois de l’histoire des Noirs
Aly Julien
Docteur Aly Julien | Crédit image : C. L. Cusack
Tôt dans sa carrière, le docteur Aly Julien s’est intéressé au fonctionnement du cerveau, car des membres de son entourage souffraient d’épilepsie et de schizophrénie. « J’ai été témoin des effets dévastateurs de ces troubles sur la vie de ces personnes et de leur famille », explique-t-il. « Dès le début de mon parcours en médecine, j’ai cherché toutes les occasions d’étudier le cerveau. C’est pourquoi mes projets de recherche portent presque exclusivement sur le cerveau, les troubles neurologiques et la santé mentale. »

C’est avec ces expériences en tête qu’Aly Julien a ensuite voulu étendre la portée de ses recherches à l’exclusion sociétale des jeunes personnes neuroatypiques et racisées.

Cette entrevue avec le docteur Julien a eu lieu dans le cadre de la série Les universitaires en éducation. Son projet de recherche est financé, en partie, par le programme Interconnectome cœur-cerveau.
 

Parlez-nous de vous et de votre formation.

J’ai obtenu mon doctorat en médecine de l’Université d’État d’Haïti avec mention très honorable. Ma thèse portait sur le profil épidémiologique de l’épilepsie dans mon pays. Mes recherches m’ont poussé à m’intéresser de près au fonctionnement du cerveau. Pendant mes études en médecine, j’ai également pris part à des projets communautaires en organisant des activités liées à la santé et des campagnes de sensibilisation pour favoriser l’inclusion des enfants neuroatypiques. J’ai toujours été sensible aux causes qui viennent en aide aux personnes issues de groupes minoritaires victimes de discrimination comme les personnes noires et les jeunes ayant des troubles cognitifs. J’ai ensuite pratiqué en tant que Médecin généraliste pendant environ deux ans avant d’arriver au Canada en vue d’obtenir un diplôme de maîtrise en enseignement aux professionnelles et professionnels de la santé de l’Université d’Ottawa. Je suis également membre du Laboratoire d’étude du cerveau et du comportement, dirigé par ma directrice de recherche, la professeure Tracy Vaillancourt.

Quel est le sujet de votre projet de recherche?

Peu d’études portent sur l’expérience de la discrimination chez les élèves noirs des écoles ontariennes. À l’heure actuelle, les recherches s’appuient principalement sur des méthodologies qualitatives et de petits échantillons, ce qui restreint leur portée. Je vais mener une analyse quantitative des répercussions de la discrimination sur la santé mentale des élèves noirs de la 4e à la 12e année en Ontario. J’examinerai ensuite le soutien que leur apportent leurs pairs, leurs enseignantes et enseignants ainsi que les spécialistes en santé mentale. Mes recherches s’appuient sur des théories relatives à l’identité sociale et à la résilience, qui servent de cadre pour mieux comprendre comment ces élèves composent avec la discrimination et mettent en place des mécanismes d’adaptation. Les conclusions de mon étude pourraient nous aider à mieux comprendre l’expérience vécue de ces élèves et à mettre en place des politiques et des interventions scolaires mieux adaptées aux besoins des élèves noirs.

Qu’est-ce qui vous a incité à mener ces recherches?

En tant que professionnel de la santé ayant étudié l’épilepsie en Haïti, je sais qu’il importe de comprendre les facteurs sociaux et culturels qui influencent la santé. En tant que personne noire, je suis conscient des conséquences de la discrimination sur le bien-être mental et physique de chaque personne. C’est en travaillant avec la professeure Vaillancourt sur son projet Health and Peer Relations Study (HPRS) à titre d’assistant de recherche que j’ai découvert qu’un grand volume de données a été recueilli sur les élèves noirs. Ce projet de recherche, financé par le programme de recherche interdisciplinaire Interconnectome cœur-cerveau de l’Université, fait partie d’une étude longitudinale accélérée sur les relations entre les pairs et la santé des élèves dans douze commissions scolaires de l’Ontario. Puisque ces données s’inscrivent dans le cadre de mes recherches sur les groupes minoritaires noirs dans les écoles, j’ai choisi de fonder ma thèse sur celles-ci. 

À qui voudriez-vous que vos travaux profitent?

J’espère que les conclusions de mon étude seront utiles pour plusieurs groupes de personnes. Tout d’abord, elles profiteront aux élèves noirs en exposant au grand jour leur réalité en milieu scolaire et en proposant des solutions pour améliorer leur bien-être. Elles permettront également aux spécialistes de la santé mentale en milieu scolaire – conseillères et conseillers pédagogiques, psychologues, travailleuses sociales et travailleurs sociaux, personnel infirmier, etc. – de mieux comprendre les besoins de ces élèves et d’adapter leurs interventions en conséquence. Le personnel enseignant et les directions d’école pourraient aussi tirer profit de mes travaux pour instaurer un environnement scolaire plus inclusif où chaque élève sent qu’on le valorise et qu’on le respecte. Enfin, mes conclusions pourraient servir à l’élaboration de politiques et de programmes plus équitables dans les écoles de l’Ontario en éclairant les décisionnaires du secteur de l’éducation et les autorités gouvernementales.

Parlez-nous d’un livre ou de nouvelles connaissances qui ont approfondi votre réflexion au cours de vos études supérieures.

Il y en a beaucoup ! Un bon exemple est le livre L’audace d’espérer dans lequel l’ancien président américain Barack Obama expose sa vision plus inclusive et optimiste des États-Unis. J’ai également étudié certaines théories, comme la théorie des intelligences multiples, du socioconstructivisme et de la résilience, qui m’ont permis de mieux comprendre la dynamique pédagogique et humaine. Le soutien de mes professeures et professeurs a également joué un rôle très important dans mon parcours universitaire. Enfin, c’est surtout ma directrice de recherche et les autres chercheuses et chercheurs de son laboratoire qui m’inspirent par leur passion pour la recherche sur le harcèlement et la santé mentale des communautés marginalisées.

Pourquoi avez-vous choisi l’Université d’Ottawa?

Puisque je parle trois langues, soit le créole haïtien, le français et l’anglais, j’ai opté pour l’Université d’Ottawa pour son multiculturalisme et son statut unique d’université officiellement bilingue. Prendre part à des initiatives communautaires qui me tiennent à cœur me permet d’évoluer tant sur le plan des connaissances que personnel. Par ailleurs, l’Université d’Ottawa est reconnue pour son engagement envers la diversité, l’inclusion et l’excellence universitaire, et ces valeurs concordent avec mon parcours et mes aspirations. Le fait que des chercheuses et chercheurs de renommée mondiale, comme ma directrice de recherche, exercent à cette université a également été un facteur déterminant. 

En savoir plus sur le Dr Aly Julien.

Le docteur Aly Julien est titulaire d’un doctorat en médecine de l’Université d’État d’Haïti et étudie à la maîtrise en enseignement aux professionnelles et professionnels de la santé à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa. Il est assistant de recherche au Laboratoire d’étude du cerveau et du comportement de l’Université d’Ottawa. Découvrir plus en détail des recherches et les publications d’Aly Julien.