Dans le cadre du Mois national du génie, nous avons organisé un panel de la série Innovations uOttawa lors duquel Darren Sutherland, agent d’engagement communautaire autochtone à l’Université d’Ottawa, s’est entretenu avec Colin Rennie et Joseph Wabegijig, le duo à la tête du CICA, pour examiner le projet de plus près. Voici quelques points saillants de la discussion :
Q1 : Darren Sutherland : Pouvez-vous expliquer aux personnes qui ne le connaissent pas ce qu’est le Centre en infrastructure pour les communautés autochtones, surnommé le CICA?
Colin Rennie : Il y a quelques années, nous nous sommes rendu compte que quelques membres du corps professoral de la Faculté de génie travaillaient avec les communautés autochtones pour trouver des solutions à des problèmes d’infrastructure, comme le traitement de l’eau et la gestion des eaux usées. Nous avons constaté que tous ces problèmes d’infrastructure étaient liés, en quelque sorte. C’est alors que nous avons pensé créer un centre qui permettrait une approche intégrée de résolution des problèmes d’infrastructure dans les communautés autochtones.
Q2 : Si vous deviez vendre l’idée de la Boussole climatique nationale autochtone en quelques mots, comment la décririez-vous?
Joseph Wabegijig : La Boussole climatique nationale autochtone est un outil Web créé à l’intention des communautés autochtones et de leurs partenaires pour déterminer les risques climatiques auxquels elles sont exposées et favoriser leur résilience pour qu’elles puissent s’adapter aux changements climatiques.
Q3 : Pouvez-vous nous expliquer comment vous aviez prévu, au départ, de travailler avec les communautés autochtones?
Joseph Wabegijig : Je pense que la partie la plus importante du processus est de s’assurer que les usagères et usagers adopteront l’outil et s’en serviront pour centraliser leurs efforts d’adaptation aux changements climatiques afin qu’aucune communauté ne soit laissée pour compte.
Q4 : En quoi la Boussole se distingue-t-elle des autres outils?
Colin Rennie : Les autres plateformes de ce genre n’intègrent pas le processus de consultation des communautés, une approche qui aide pourtant à déterminer les aspects des changements climatiques qui posent des risques et la nature de ces risques. Ce qui est nouveau dans notre projet, c’est justement cet aspect de l’identification des risques et de leur atténuation.
« Ce qui est nouveau dans notre projet, c’est justement cet aspect de l’identification des risques et de leur atténuation. »
Colin Rennie
— Directeur intérimaire du Centre en infrastructure pour les communautés autochtones
Q5 : Pouvez-vous nommer quelques-unes des communautés ayant participé à la Boussole jusqu’à présent?
Joseph Wabegijig : Nous sommes entrés en contact avec plusieurs communautés, et des conseils tribaux de partout au Canada, le plus à l’est étant le Québec, mais nous avons aussi eu des discussions préliminaires avec des gens du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest, de la Colombie-Britannique et de différentes régions de l’Ontario.
Q6 : Quelles ont été les premières réactions? Y a-t-il eu des choses auxquelles vous ne vous attendiez pas?
Colin Rennie : En discutant, nous avons constaté l’importance des principes de PCAP, c’est-à-dire de propriété, de contrôle, d’accès et de possession. Alors, l’une des premières choses que nous avons faites a été d’établir un protocole ou des règles de fonctionnement. C’était important de s’en rendre compte dès le départ, car ces principes sont au cœur de l’outil. C’est aussi un exemple de la manière dont la participation communautaire a changé notre perception de l’outil. Pendant les premières phases du projet, nous avons travaillé en étroite collaboration avec Indigenous Tech.ai, notre partenaire de l’industrie.
PCAP® est une marque déposée du Centre de gouvernance de l’information des Premières Nations.
Joseph Wabegijig : J’ajouterais qu’il n’existe pas à l’heure actuelle d’outil en ligne reconnu à l’échelle nationale qui sert de point de référence ou de modèle pour permettre aux communautés autochtones d’automatiser et de simplifier le processus de recherche et les principes de PCAP.
Q7 : Comment travaillez-vous avec Indigenous Tech.ai?
Joseph Wabegijig : Nous avions une relation beaucoup plus technique portée sur l’IA. Lorsque nous avons collaboré avec cette entreprise pour préparer la présentation de notre projet dans le cadre du défi TD Prêts à agir, elle a fait un travail formidable pour intégrer la technologie tout en respectant le point de vue des Autochtones et en appliquant les principes de PCAP aux initiatives de recherche, un aspect qui a beaucoup de valeur aux yeux des communautés.
Colin Rennie : Il est important de mentionner que l’entreprise est détenue et contrôlée en majorité par des Autochtones.
Q8 : Quel est le son de cloche des communautés autochtones au sujet de la Boussole?
Joseph Wabegijig : De nombreuses communautés disposent de peu de ressources pour se préparer aux changements climatiques et sont donc soulagées parce que l’outil les aidera non seulement à centraliser l’information, mais plus important encore, à accroître la rapidité et l’efficacité de la planification. De plus, elles sont heureuses de pouvoir participer au processus de conception.
Colin Rennie : En général, les discussions portent sur les caractéristiques de l’outil et ce qu’il peut leur apporter. Nous avons par exemple parlé d’agriculture. Je n’avais jamais vraiment vu l’outil comme un possible moteur de développement économique, mais si nous arrivons à prédire quelles cultures seront les mieux adaptées aux conditions climatiques dans les prochaines années, la productivité des communautés autochtones n’en sera que meilleure.
Q9 : Y a-t-il des possibilités de collaboration à la Boussole ou au CICA pour les membres de la population étudiante et de la communauté de recherche?
Colin Rennie : Nous avons déjà formé une grande équipe, mais il y a de la place pour les personnes qui veulent collaborer avec les communautés autochtones, faire progresser le domaine des sciences climatiques et travailler sur les aspects techniques du développement de l’outil en tant que tel.
Pour conclure cette édition de notre série de panels Innovations uOttawa, Darren Sutherland a demandé aux conférenciers comment l’industrie et les autres parties prenantes qui aiment collaborer pouvaient faire leur part. Joseph Wabegijig encourage toutes les personnes intéressées à communiquer directement avec eux.
Que vous soyez partenaire de l’industrie, partenaire communautaire ou partie prenante, ou que vous apparteniez au secteur gouvernemental ou à celui des ONG, votre expertise est la bienvenue. La Boussole a pour but de cultiver la collaboration et les liens communautaires à l’échelle nationale, et d’assurer notre résilience face aux changements climatiques. La seule façon d’y arriver, c’est de travailler ensemble.
« Quand on voit le projet comme un rapprochement de nos communautés, il devient presque un aspect de la réconciliation, mais il représente aussi un effort collectif pour trouver une solution à un problème qui nous concerne tous et toutes », conclut Joseph.
« Il devient presque un aspect de la réconciliation, mais il représente aussi un effort collectif pour trouver une solution à un problème qui nous concerne tous et toutes. »
Joseph Wabegijig
— Coordonateur du Centre en infrastructure pour les communautés autochtones