Ils sont persuadés que les véhicules connectés pourraient aider à prioriser les travaux de réparation des nids-de-poule, à aviser les premiers répondants en cas de collision et à trouver les itinéraires les plus rapides à l’heure de pointe.
Burak Kantarci, professeur agrégé à la Faculté de génie de l’Université d’Ottawa, et son équipe se consacrent à l’internet des objets et à l’analyse des mégadonnées. Ils constatent l’intérêt et la possibilité de se servir des capteurs visuels et numériques des véhicules connectés pour accroître la sécurité routière.
« Les véhicules connectés recèlent un énorme potentiel », affirme le professeur Kantarci. « Ils sont tous pourvus d’un dispositif de communication, d’un serveur de télédétection et d’une unité de stockage de données. Ce sont d’excellentes ressources pour améliorer le fonctionnement de notre infrastructure. »
Les nids-de-poule causent des ralentissements et endommagent les véhicules. Les chercheurs ont développé des algorithmes intelligents de collecte et d’analyse des données collectées par différents types de capteurs intégrés. Ces données peuvent aussi être utilisées pour repérer les nids-de-poule, déterminer ceux qu’il est le plus urgent de réparer, et communiquer avec les services municipaux. À l’heure actuelle, la Ville se fie aux résidents pour signaler les nids-de-poule, mais n’est pas en mesure de déterminer objectivement lesquels sont les plus dangereux ou perturbent le plus la circulation. Selon Burak Kantarci, l’analyse des données mégacollectées améliorerait la gestion de la réparation des nids-de-poule.
En outre, les capteurs dont sont pourvus les véhicules autonomes connectés peuvent détecter les collisions qui surviennent à proximité. Le professeur Kantarci et son équipe travaillent à l’analyse d’images d’accidents pour évaluer la gravité d’une collision au moyen de réseaux neuronaux profonds, en vue de déterminer la catégorie et le nombre de premiers répondants requis. Ils veulent appliquer leurs travaux actuels au développement de solutions intégrées d’analyse des photos prises par un véhicule.
« Lorsqu’il y a une collision, les policiers, les ambulanciers et les pompiers sont envoyés sur les lieux, même si, parfois, seule l’intervention des policiers est vraiment nécessaire », explique le professeur. « Si on pouvait déterminer qui devrait intervenir, on utiliserait moins de ressources et on éviterait beaucoup de ralentissements de la circulation. »
RÉSEAUX 5G
Collecter et prétraiter les données visuelles est très exigeant en ressources de communication et en capacité de traitement. Le professeur Kantarci indique que les nouveaux réseaux 5G accéléreront l’acquisition des données, ce qui rendra possible la prise de décisions instantanées et justes.
L’autre avantage de la mégacollecte de données est l’analyse en temps réel de la circulation, des conditions routières et de la météo. Ces données peuvent servir à déterminer le trajet le plus sécuritaire et le plus rapide pour sortir d’un embouteillage à l’heure de pointe ou à orienter les automobilistes en cas d’urgence (inondation majeure, par exemple). L’équipe du professeur Kantarci a mis au point un algorithme qui permet aux conducteurs d’ambulance de passer d’un itinéraire à l’autre, selon la circulation et l’état du patient.
Le défi principal de l’utilisation de ces données est de s’assurer que la puissance de traitement est suffisante. Les téraoctets de données recueillis de millions d’appareils connectés devront être stockés dans un nuage. Les données ne devront pas toutes être analysées en temps réel, et elles pourront être stockées pour un usage futur.
De plus, il faut tenir compte des impacts environnementaux et opérationnels. Le stockage, le traitement et la distribution de données font nécessairement appel aux centres de données, très énergivores. Burak Kantarci et son équipe ont également conçu des protocoles de communication écoénergétiques pour les systèmes géodistribués d’IdO.
« Il nous faudra toujours des centres de données, mais nous voulons une solution flexible, proche de l’utilisateur final, et économique », dit-il.
Visualiser les mégadonnées
Des chercheurs de la Faculté de génie de l’Université d’Ottawa arrivent à interpréter les données issues de pratiquement toutes les sources d’information.
Habituellement, les systèmes de visualisation comme le GPS sont conçus pour un certain type de données. Verena Kantere, professeure agrégée, et son équipe ont créé un système qui, grâce à des techniques et des algorithmes novateurs, permet de visualiser tout type de vastes ensembles de données interconnectées dans un graphique interactif.
La professeure explique que, pour utiliser la plupart des systèmes de visualisation, il faut charger les données sur un appareil. Par exemple, un utilisateur aurait de la difficulté à faire un gros plan sur les rues dans une carte des réseaux de transports provinciaux. L’information n’étant pas chargée sur l’appareil, le traitement serait lent. Pour de vastes ensembles de données, ces systèmes requièrent un volume astronomique de mémoire et reposent sur une infrastructure coûteuse inaccessible à de multiples usagers ou sur des machines aux capacités de traitement réduites.
Afin de traiter les grands volumes de données, d’autres systèmes font appel à des techniques d’échantillonnage et d’agrégation pour visualiser les informations qu’ils interprètent comme importantes ou visualiser un nombre limité d’éléments en se fondant sur les requêtes de l’utilisateur. Bien que ces systèmes aient peu d’exigences relatives aux ensembles de données, ils ne présentent qu’une information partielle à l’usager, ce qui nuit à la compréhension globale de l’information disponible.
« Dans bien des cas, les ensembles de données sont constitués de données interreliées, à l’instar des liens d’une page de Wikipédia », explique Verena Kantere. « Il est très difficile d’obtenir une interactivité efficace sans prétraiter les données. »
La solution est de prétraiter les données, puis de relier entre eux les éléments de données.
Mais il y a quand même un compromis à faire. Un programme de suivi visuel de la circulation de la ville d’Ottawa pourrait être précis et bien montrer la circulation dans chaque rue, mais ne serait pas rapide.
« Les systèmes les plus avancés ne peuvent offrir les deux», souligne la professeure. « Nous voulons voir jusqu’où il est possible d’aller. »
Cet article a été publié, en version originale anglaise, dans l'Ottawa Business Journal.