Apporter l'aide aux moins privilégiés grâce à la recherche sur l’hépatite C

Faculté de médecine
Chisom Okwor, assis sur un banc, lit le livre Born a Crime par Trevor Noah
Une admiratrice de Trevor Noah, Chisom Okwor, étudiante à la maîtrise en sciences, utilise la recherche scientifique pour lutter contre les inégalités en matière de santé.
Par Saif Dababneh et Emran Alnahhas
Rédacteurs invités

En lisant le livre Born a crime de l’humoriste Trevor Noah, qui raconte son enfance en Afrique du Sud, dans un milieu touché par la ségrégation raciale, Chisom Okwor, une étudiante nigériane au deuxième cycle, fut frappée d’inspiration. À l’image de Trevor Noah, qui a choisi de se servir de la comédie et de la narration pour mettre en lumière les inégalités, Chisom, étudiante au Département de biochimie, microbiologie et immunologie, souhaitait tirer profit de la science pour faire de même. Elle s’est tournée vers les maladies infectieuses caractérisées par des résultats inéquitables en matière de santé, plus précisément le virus de l’hépatite C (VHC).

Le VHC est la principale cause du cancer du foie. Selon les données recueillies par l’Agence de la santé publique du Canada, en2017 ce sont 11 592 cas d’hépatite C qui ont été signalés à l’échelle nationale,correspondant ainsi à31,7 personnes par 100 000 habitants.

Bien que des traitements susceptibles de sauver des vies existent depuis les années 1990, leVHC continue d’affecter de manière disproportionnée les groupes minoritaires, notamment les consommateurs de drogues par injection, les détenus fédéraux et les populations de personnes nées à l’étranger.Chisom est déterminée à remettre en cause le statu quo et à multiplier les efforts pour parvenir à des résultats équitables en matière de santé.

Chisom n’aurait pu espérer mieux que les installations de pointe sur les maladies infectieuses de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa,la supervision de ses travaux de maîtrise par le Dr Seung-Hwan Lee, professeur agrégé au Département de biochimie, microbiologie et immunologie et chef de file en recherche sur le VHC, une collaboration avec le Dr Curtis Cooper,directeur du Programme régional de lutte contre l’hépatite virale de L’Hôpital d’Ottawa et professeur agrégé au Département de médecine,et l’appui généreux du Réseau Canadien sur l’Hépatite C pour commencer à pipetter sa vision en réalité.

Plongeant dans ses études de maîtrise, Chisom a cherché à établir la cause immunologique de mauvais résultats cliniques chez les patients infectés par le VHC et présentant de graves lésions hépatiques. Comparativement aux patients présentant des lésions hépatiques moins sérieuses, ces patients étaient plus à risque de cancer primitif du foie et d’autres infections virales.

« [Ces patients] ont un système immunitaire affaibli ou leur réponse immunitaire est beaucoup moins efficace que chez ceux qui ont moins de lésions hépatiques », explique Chisom.

Récemment, Chisom et ses collègues ont publié un document qui met en lumière ce problème. En analysant les cellules immunitaires des échantillons de patients, ils ont découvert que la dysrégulation immunitaire chez les patients présentant de graves lésions hépatiques était associée à un taux plus élevé de récepteurs inhibiteurs. Ces récepteurs ont été décelés à la surface des cellules immunitaires connues sous le nom de cellules T et cellules tueuses naturelles (NK), essentielles dans l’élimination des cellules cancéreuses dans le corps. Cette découverte constitue une base solide pour le développement de traitements ciblés visant à améliorer la fonction immunitaire chez ces patients.

Chisom faisait remarquer que même si la recherche est loin d’être terminée, « le fait de pouvoir aider ces populations est pour elle l’un des plus grands avantages de ces travaux sur le VHC».Son dévouement, et ses conclusions scientifiques translationnelles, lui ont mérité le prix de la meilleure présentation orale lors de la Journée virtuelle de la recherche 2020 de la Faculté de médecine.

Chisom doit son succès à l’appui continu de ses parents, au Dr Lee, superviseur de sa maîtrise, et à la Dre Ewurabena Simpson, hématologue et oncologue noire au CHEO et professeure adjointe au Départementde pédiatrie qui a supervisé ses travaux de recherche de premier cycle et qui est pour elle un modèle.

En réfléchissant à l’importance de la présence de professionnels noirs dans sa propre expérience universitaire, Chisom est reconnaissante de pouvoir à son tour servir de mentore pour de jeunes étudiants noirs. « Je veux qu’ils sachent que des gens comme eux font des choses comme ça », dit-elle.

Comme l’a si bien dit Trevor Noah :« On dit aux gens d’aller au bout de leurs rêves, mais on ne peut rêver qu’à ce que l’on peut imaginer, et cette imagination est parfois limitée par nos origines».En tant que professionnelle de la santé,Chisom espère poursuivre son travail visant l’atteinte de meilleurs résultats pour tous les membres de la société et inspirer la prochaine génération de médecins et scientifiques, notamment les femmes de couleur. 


Saif Dababneh et Emran Alnahhas sont des étudiants du programme de baccalauréat ès sciences spécialisé en médecine moléculaire et translationnelle. Initialement, elles ont écrit cet article pour leur cours en communication scientifique dans le cadre d’une série dressant le profil de chercheurs de la Faculté de médecine.

Le cours a été élaboré et enseigné par Dre Kristin Baetz, doyenne adjointe intérimaire, recherche et projets spéciaux et professeure au Département de biochimie,microbiologie et immunologie, afin de permettre aux étudiants de transmettre des sciences complexes à un public profane - une compétence essentielle lors de présentations, de demandes de subventions, de résumés d'articles de recherche et de communications générales dans le domaine des sciences biomédicales.

MedPoint publiera des articles tirés de cette série tout au long de l’année 2021.

Un diagram du foie affligé par l'hépatite C