Depuis une dizaine d’années, les chercheurs ont déterminé que le cerveau adulte continue de générer des neurones tout au long de la vie grâce à la présence de cellules souches neurales. Cependant, cette génération continue de neurones dans le cerveau adulte exige le maintien d’une population de cellules souches, qui dépendent d’un équilibre régulé de décisions en matière de destin cellulaire. La compréhension de la régulation par laquelle une population de cellules souches se maintient serait donc un bon moyen de prévenir la détérioration et le vieillissement de ce type de cellules.
Récemment, la Dre Ruth Slack, professeur, et la Dre Mireille Khacho, fellow postdoctorale, du Département de médecine cellulaire et moléculaire de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa ainsi que de l’Institut de recherche sur le cerveau (IRCuO) de l’Université d’Ottawa, ont fait une découverte importante en ce qui a trait au rôle fondamental que jouent les mitochondries dans les décisions sur le destin cellulaire des cellules souches. L’étude a récemment été publiée dans la revue Cell Stem Cell.
Les membres du laboratoire de la Dre Slack, en collaboration avec des chercheurs de l’Université Johns Hopkins et de l’Université du Québec à Trois-Rivières, ont examiné les mitochondries et les cellules souches. L’étude visait à mieux comprendre le processus par lequel le pool de cellules souches se maintient et se régénère dans le cerveau adulte, ainsi que le mécanisme sous-jacent du maintien des cellules souches. Les chercheurs voulaient notamment trouver une réponse à la question : qu’est-ce qui détermine la décision d’une cellule souche de se transformer en neurone ou de rester cellule souche? La réponse se trouve dans les mitochondries.
Les mitochondries sont les usines d’énergie des cellules. La théorie dans ce domaine était traditionnellement que les mitochondries ne fonctionnent pas dans les cellules souches. La Dre Mireille Khacho, auteure principale de l’étude, a constaté qu’au sein de la population de cellules souches, les mitochondries ont en fait la capacité de déterminer le destin cellulaire des cellules souches, une fonction qui n’avait jamais été attribuée à ces organites auparavant. Les chercheurs ont constaté que les mitochondries des cellules souches ont une certaine forme qui assure la régulation de leur identité. Lorsque cette forme se transforme, les cellules souches reçoivent à l’échelon interne un message qui active la formation de neurones. Le fait que ces usines d’énergie jouent un rôle en matière de destin cellulaire a été toute une surprise pour les chercheurs.
La préservation des cellules souches dépend d’une régulation des décisions en matière de destin cellulaire. Tout déséquilibre de cette régulation peut avoir des effets négatifs. « Comme les cellules souches sont très sensibles à ces changements », explique la Dre Slack, « les dérèglements ou les déséquilibres peuvent mener à un amenuisement du pool de cellules souches dans le cerveau adulte ». Ces changements jouent un rôle dans le vieillissement et certaines maladies, notamment des maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson, l’AVC et la maladie d’Alzheimer, ainsi que des troubles métaboliques.
L’étude de la Dre Slack est la première à examiner l’influence des mitochondries sur le maintien et la régénération du poll de cellules souches dans le cerveau.
« Jusqu’à maintenant », explique la Dre Mireille Khacho, « on avait tendance à expliquer les maladies neurodégénératives à partir d’anomalies se trouvant exclusivement dans les neurones. Cependant, nous avons montré que les cellules souches aussi peuvent comporter des anomalies, et que la cellule souche pourrait en fait être à l’origine de ces maladies neurodégénératives. »
L’équipe a effectué des épreuves dans différents modèles faisant appel à des perturbations des mitochondries dans les cellules souches. Ce qu’ils ont observé a été le point de départ de tout un nouveau domaine d’étude, car la perturbation entraînait une atteinte cognitive et une détérioration des résultats de tests d’apprentissage.
Ces conclusions pourraient avoir des répercussions importantes, car le maintien du pool de cellules souches est essentiel tout au long de la vie. Les chercheurs comprennent maintenant une partie des raisons pour lesquelles le nombre de cellules souches baisse parfois dans le cerveau adulte.
« Ces résultats nous permettent de poser tout un ensemble de questions nouvelles très stimulantes » ajoute la Dre Slack.
Le laboratoire de la Dre se concentre sur la régénération neurale, la recherche sur les voies de développement, et l’examen de cibles thérapeutiques potentielles. Pour de plus amples renseignements sur le laboratoire de la Dre Slack, visitez la page sur le site Web de la Faculté.
Pour lire l’étude complète, consultez le site Web de la revue Cell Stem Cell