Par David McFadden
Rédacteur scientifique
Peu de temps après que les autorités de santé publique ont informé les résidents de la capitale la plus nordique du Canada de ne pas boire l’eau potable en raison d’une contamination par des hydrocarbures, le Dr Yipeng Ge a découvert à quel point il est pénible de transporter de l’eau potable sur des terrains accidentés.
« Le simple fait de remplir deux grosses bouteilles d’eau à la rivière et de les ramener en empruntant une colline très abrupte, est une lourde tâche, » mentionne le Dr Ge, un diplômé de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa (MD 2020) et maintenant un résident à cet endroit.
Tout comme les autres résidents d’Iqaluit, la capitale du Nunavut où un état d’urgence a été déclaré le 12 octobre à la suite de la contamination de l’approvisionnement en eau potable par des hydrocarbures, le Dr Ge devait faire bouillir son eau glaciale de la rivière Sylvia Grinnell afin d’avoir une source sûre d’eau potable dans les premiers jours de la crise de contamination.
Le Dr Ge a droit à un cours intensif sur les inégalités multidimensionnelles du quotidien dans une communauté majoritairement autochtone dans le Nord du Canada, une vaste région qui représente environ 40 pour cent de la superficie totale du pays. Grâce à sa formation à l’Université d’Ottawa, il évalue la crise sous un angle de santé publique et mondiale, où un médecin peut jouer le rôle de fournisseur de soins et porte-parole de l’équité en matière de santé et de justice sociale.
« L’aspect vraiment intéressant au sujet de cette crise de l’eau est qu’il ne s’agit pas d’un incident isolé. Ce n’est que la pointe de l’iceberg lorsqu’il s’agit des lacunes dans les infrastructures dans le Nord, » ajoute-t-il.
C’est précisément le genre de choses qui a attiré le Dr Ge à la Faculté de médecine en premier lieu. Il a commencé à s’intéresser à une carrière en médecine après avoir constaté les inégalités en matière de santé qui touchent les communautés autochtones.
Il passe actuellement deux mois à faire des stages à l’Hôpital général Qikiqtani d’Iqaluit, une toute petite capitale de 8 000 résidents, dont plus de la moitié sont Inuit. Cela fait partie de son programme de résidence de cinq ans en santé publique et médecine préventive, notamment en médecine familiale à l’Université d’Ottawa et ses hôpitaux et agences de santé publique affiliés.
Tout comme d’autres médecins résidents, le Dr Ge perfectionne maintenant ses compétences dans la discipline qu’il a choisie. Il affirme que c’est un « honneur et un privilège » d’apprendre et de travailler à Iqaluit pendant cette période difficile, de voir comment les membres de la communauté se sont unis et se sont occupés de leurs voisins vulnérables.
« Chacun s’implique pour le bien-être collectif, » mentionne-t-il.
L’Hôpital général Qikiqtani a été forcé de fermer sa salle d’opération, car il était impossible de stériliser les instruments sans eau potable. C’est le seul hôpital de la région de Baffin, une région de plus d’un million de kilomètres carrés.
« Lorsque vous devez annuler toutes les chirurgies, c’est une triste situation, » dit-il. « Selon moi, ce n’est pas un niveau de soins qui serait accepté dans le Sud du pays, mais qui existe actuellement en raison de la crise de l’eau. »
Après avoir reçu l’approbation de l’équipe de direction de l’Université d’Ottawa, le Dr Ge s’est servi de ses comptes de réseaux sociaux pour mettre au premier plan les aspects de la crise. Il a récemment fait l’objet d’un reportage à la CBC et a été cité dans le Washington Post. Il mentionne que le fait d’être une source pour les journalistes, et donc le public, est une chose qu’il prend au sérieux.
« La capacité à livrer ce genre de messages est une aptitude importante que doivent posséder les médecins en santé publique, » mentionne-t-il.
Alors que la crise de l’eau à Iqaluit fait les grands titres à l’échelle nationale, les problèmes d’approvisionnement et un manque déplorable d’infrastructures d’eau potable ne constituent pas de nouveaux problèmes pour les communautés inuites. Même si le gouvernement du Canada avait fait le serment de corriger tous les problèmes associés à la qualité de l’eau potable dans les communautés des Premières Nations avant mars 2021, les problèmes persistent encore.
Et le Dr Ge souligne qu’un accès fiable à de l’eau potable n’est pas le seul problème. Parmi les inégalités que l’on constate, notons que plusieurs communautés n’ont toujours pas accès à des soins de santé et un logement adéquats alors qu’elles sont confrontées à une insécurité alimentaire chronique.
« Cette expérience m’a vraiment permis de comprendre que j’ai choisi le parcours tout indiqué pour moi, » dit-il, « et pourquoi ces enjeux sont si importants. »
Tous les crédits photo : Dre Yipeng Ge
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