Jessica Sinclair
Rédactrice spécialisée en recherche
Au début de son doctorat en génétique humaine et moléculaire, Waël Maharsy travaillait au laboratoire de la Dre Mona Nemer, laquelle il viendrait à considérer comme son « modèle ». Penché sur un microscope, il s’agissait de la première de ses nombreuses études sur des souris, et il était à la recherche de signes de toxicité associée à la chimiothérapie dans des tissus sains.
« Nous tentions de déterminer si le traitement des souris par le mésylate d’imatinib, un médicament anticancéreux, provoquait des changements structuraux au niveau des poumons », raconte-t-il. Des études avaient récemment démontré que le médicament causait des lésions du muscle cardiaque.
Le travail consistait à examiner l’une après l’autre des lames sur lesquelles étaient déposés des échantillons de poumons. Chaque lame avait été traitée avec un colorant pour illustrer la disposition des cellules : le noyau cellulaire était coloré en violet foncé et le cytoplasme, en rose.
Une lame se distinguait visiblement des autres, non pas pour ce qu’elle révélait sur le plan scientifique, mais pour ses particularités esthétiques. En effet, une partie de l’image ressemblait étrangement à une carte de Saint-Valentin, avec un cœur rose entouré d’une bordure de dentelle, incrustée dans un réseau crocheté de filaments. Il s’est empressé de prendre une photo de cette lame pour la montrer à ses amis, tous d’accord pour dire qu’elle était tout à fait particulière.
« Dans cette image obtenue au microscope, on pouvait y voir une bronche en forme de cœur entourée d’alvéoles et de quelques vaisseaux sanguins », dit-il.
L’examen microscopique de Waël Maharsy n’avait révélé aucun changement structural des poumons, mais de nombreux changements au niveau du cœur.
Dix ans plus tard, en 2017, lorsque le Département de biochimie, microbiologie et immunologie de l’Université d’Ottawa a annoncé un concours d’illustrations scientifiques, le Dr Maharsy, maintenant associé de recherche, s’est souvenu de la touchante image qu’il avait conservée pendant toutes ces années. Il a repris la photo à une plus forte résolution, avec un facteur de grossissement de 20, et l’a cadrée afin que la bronche en forme de cœur se trouve au centre.
Il a présenté son image dans le cadre du concours et a remporté le premier prix!
Depuis la conférence de la Dre Nemer à Beyrouth, au Liban, en 2006 où le Dr Maharsy était étudiant à la maîtrise, celle-ci est devenue son mentor. Bien après avoir mis de côté la lame de la bronche en forme de cœur, le Dr Maharsy a terminé son doctorat en 2012, puis a continué de travailler dans le laboratoire de la Dre Nemer pour une formation postdoctorale de trois ans. Par la suite, il y est demeuré quatre autres années à titre d’associé de recherche avant de poursuivre d’autres intérêts l’été dernier. Mais il affirme que la Dre Nemer sera toujours pour lui « une source intarissable de connaissances, une grande motivatrice et une seconde mère attentionnée. »