Dire que la Dre Mona Nemer a traversé une période très chargée serait un euphémisme. Depuis près de cinq ans, l’éminente chercheuse en santé cardiovasculaire et professeure à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa est la conseillère scientifique en chef du Canada, faisant bénéficier de son avis d’experte le premier ministre et d’autres décideurs fédéraux sur un éventail étourdissant de sujets.
La Dre Nemer et une équipe resserrée ont non seulement dû repenser entièrement ce poste en 2017 (le premier conseiller scientifique en chef du Canada a été nommé en 2004, et le poste a été supprimé en 2008), mais, au cours de mandat, la chercheuse a vu éclore la pandémie de COVID-19, qui a transformé la vie de tous et qui est loin d’être terminé.
« Je suis particulièrement fière du travail que nous avons réussi à accomplir pendant la pandémie », dit-elle. « Il faut savoir que le mandat du bureau et le rôle de la conseillère scientifique en chef n’étaient pas bien définis en ce qui a trait aux situations d’urgence. Néanmoins, nous avons été très proactifs et avons vraiment réussi à établir des liens qui nous ont permis d’éclairer les prises de décision et, bien sûr, les priorités scientifiques du pays en matière de recherche sur la pandémie. »
Son second mandat en tant que scientifique en chef du Canada s’achèvera à la fin du mois de septembre. Ses connaissances, son esprit réfléchi et sa capacité à vulgariser les données ont fait d’elle une référence pour les décideurs. Elle a également conseillé les fonctionnaires fédéraux sur les moyens de rendre les données scientifiques du gouvernement pleinement accessibles au public.
« Je crois profondément à la science ouverte et à la transparence, ainsi qu’à la nécessité de ne pas sous-estimer le public », déclare la Dre Nemer, née et élevée au Liban. « Je pense que les gens ont fait preuve d’une grande résilience, qu’ils ont démontré un grand intérêt pour la science et exprimé le désir de la comprendre. Je pense donc que nous devons poursuivre ce dialogue avec eux et poursuivre ce travail. »
Il est certain que le grand public a été sensibilisé à la manière dont le processus scientifique fondé sur les données probantes fonctionne réellement dans le cadre des complexités et des incertitudes de la pandémie actuelle de COVID-19. Pour la première fois, de nombreuses personnes ont pu comprendre et apprécié ce qu’est réellement la science : un processus dynamique et en évolution constante.
Néanmoins, au milieu de la crise, s’est développé également un réseau de désinformation, qui prospère en raison du fait que la population cherche des réponses définitives à propos de phénomènes scientifiques en pleine évolution. Les épidémiologistes de salon, les conspirationnistes et les robots diffuseurs de fausses informations sont passés à la vitesse supérieure. Pour certaines personnes peu familiarisées avec le processus scientifique, le virus en constante mutation et les orientations changeantes de la santé publique ont alimenté la méfiance envers la science et l’expertise en général.
La Dre Nemer souligne que la pandémie de COVID-19 a clairement montré l’importance de la maîtrise de certaines notions en science, et elle fournit aussi de nombreux enseignements pour aborder efficacement d’autres sujets scientifiques majeurs susceptibles d’être politisés, comme le changement climatique.
Pour acquérir une certaine culture scientifique, il n’y pas à connaître les subtilités de la biologie ou la terminologie de la physique ou de la chimie, explique-t-elle. « Non, la culture scientifique consiste avant tout à comprendre le processus scientifique, les principes et les fondements de ce qu’est une publication crédible ou une source crédible. »
Reconnaître la crédibilité et l’expertise est essentiel lors de l’évaluation de l’information, en particulier lorsqu’il s’agit d’interprétation et d’extrapolation.
« Nous avons vu de nombreuses personnes, de vrais spécialistes que je félicite sincèrement, faire un travail remarquable en termes de communication publique. Mais nous avons également vu des personnes, des spécialistes autoproclamés, qui ont fourni leur interprétation de la science, leur interprétation des soins. Et c’était très déroutant », déplore-t-elle. « Je pense que nous devrons poursuivre ce dialogue avec le public, continuer à partager les informations et expliquer comment on distingue les experts des non-experts. »
Bien qu’elle ait vécu de nombreuses expériences dans le cadre de ses fonctions de conseillère, elle est particulièrement fière du rôle clé qu’elle a joué dans l’élaboration d’un « modèle de politique sur l’intégrité scientifique » pour aider les scientifiques des ministères et les employés fédéraux à agir de la bonne façon. Ce modèle de politique garantit également que les scientifiques fédéraux du Canada sont libres de parler ouvertement de leur travail et que cette liberté est à l’abri de toute ingérence.
« Les gens sous-estiment peut-être à quel point c’est important », soutient la Dre Nemer à propos de cette politique pionnière. « Mais aujourd’hui, les États-Unis sont en train de faire ce que nous avons fait avant eux. Nous avons réussi à mettre tout cela en place en un temps record. »
Le soutien à la science au Canada continue de se heurter à des difficultés. Le dernier budget fédéral ne prévoit aucune augmentation pour les IRSC et les autres organismes de financement de la recherche. Interrogée sur cette décision budgétaire, la conseillère scientifique en chef du pays l’a qualifiée de « décevante ».
« Je dois dire que je suis préoccupée par la diminution de notre soutien à la science en termes de PIB. Et aussi de notre classement par rapport aux autres nations. Ainsi, même si nous maintenions le même niveau d’investissement et de soutien à la recherche, si d’autres pays augmentent encore leur soutien, cela signifie que nous prenons du retard. »
La Dre Nemer, ancienne vice-rectrice à la recherche de l’Université d’Ottawa, note qu’il existe un mythe persistant qui veut que, la recherche fondamentale étant déjà bien soutenue, c’est vers l’innovation que les investissements du gouvernement doivent être dirigés en priorité. La recherche fondamentale est le travail visant à comprendre les principes fondamentaux de la science.
« Mais on ne peut dissocier l’innovation de la recherche fondamentale », dit-elle. « Pour commencer, ce sont les futurs innovateurs, les futurs travailleurs et les futures entreprises innovantes qui sont formés dans les laboratoires de recherche fondamentale. Il doit donc s’agir d’un continuum. Vous ne pouvez pas dire « j’ai suffisamment investi dans la recherche fondamentale, maintenant j’investis dans l’innovation ». Cette façon persistante d’investir et de penser ne nous aide pas. »
Tournée vers l’avenir, elle estime qu’il faut faire preuve de pédagogie auprès des politiciens et des hauts fonctionnaires canadiens pour qu’ils comprennent la nécessité de la recherche fondamentale pour stimuler les innovations qui pourraient déboucher sur une commercialisation. « Nous ne sommes pas encore parvenus à cette étape de la réflexion. Cela prend du temps, les gens bougent et les politiciens vont et viennent. Nous devons nous inscrire dans une perspective à long terme. »
La Dre Nemer espère qu’un successeur poursuivra cet important travail de conseil.
« J’ai bien sûr été très, très honorée d’être choisie pour mettre en place le bureau de la conseillère scientifique en chef, qui, je l’espère vivement, deviendra incontournable dans le paysage politique canadien. Vous savez, c’est un poste qui, à mon avis, est très important pour le pays. »
Prochaine étape pour la chercheuse de l’Université d’Ottawa, reconnue pour ses importantes découvertes en biologie cardiaque, maintenant qu’elle est devenue la conseillère scientifique du premier ministre Justin Trudeau : Il est probable qu'elle retourne à son laboratoire à la faculté de médecine.
« Deux années exclusivement consacrées à la COVID-19 par la communauté des chercheurs ont laissé beaucoup de place aux autres grandes maladies humaines. Alors oui, ce serait bien de retourner travailler sur le cœur », dit-elle en souriant.
Le vendredi 17 juin 2022
Symposium du TRMC
9 h 30 à 12 h 00
Campus RGN, 451, rue Smyth
Coût : Gratuit
Inscrivez-vous dès maintenant
Cérémonie d’investiture du TRMC
MAITRESSE DE CÉRÉMONIE : Dre Mona Nemer
Conseillère scientifique en chef du Canada
Réception : 17 h
Début de la programmation : 18 h
Centre Shaw, 55, promenade Colonel By, Ottawa
Soirée élégante (port de la cravate noire facultatif)
Commanditez une table | Billet individuel (325 $/personne)
La Faculté de médecine et la Faculté des sciences de la santé de l’Université d’Ottawa sont ravies d’être les hôtes du symposium et de la cérémonie d’investiture du Temple de la renommée médicale canadienne 2022.
Nous vous invitons à vous joindre à nous, ainsi qu’à des chefs de file en santé de partout au Canada, pour rendre hommage aux lauréats exceptionnels. Si les circonstances le permettent, l’événement aura lieu en présentiel à Ottawa. Sinon, il se déroulera en mode virtuel. Nous vous invitons à vous joindre au symposium et (ou) à la cérémonie pour célébrer et apprendre de ces experts en santé.
COPRÉSIDENTS HONORAIRES :
Dre Annette O’Connor | Lauréate 2020 du TRMC
Professeure émérite, École des sciences infirmières, Université d’Ottawa
Dr Antoine Hakim | Lauréat 2013 du TRMC
Scientifique principal émérite, Programme de neuroscience, Université d’Ottawa et Institut de recherche de l’hôpital d’Ottawa