Par Michelle Read
Rédactrice attitrée
Historiquement, aucune maladie infectieuse ne s’était propagée aussi rapidement et à une si grande échelle planétaire que la COVID-19, mentionne le Dr Mark Walker, épidémiologiste et directeur intérimaire du Bureau de l’Internationalisation et de la santé mondiale à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa.
Bien que la mondialisation soit largement responsable de la pandémie, l’amélioration de la communication entre les personnes et les gouvernements est devenue l’une des forces du monde dans cette lutte.
« Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un effet de la mondialisation, mais du même coup, la mondialisation a fait place à la transparence entre les pays », a-t-il mentionné. « Lorsqu’une telle situation se reproduira dans les 10 prochaines années, nous serons beaucoup mieux préparés. »
À titre de scientifique principal à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa, de chef du Département d’obstétrique, de gynécologie et de soins aux nouveau-nés à L’Hôpital d’Ottawa, et de professeur à la Faculté de médecine avec nomination conjointe à l’École de gestion Telfer, le Dr Walker voit la crise de la COVID-19 sous différents angles.
Un flux continu d’information entre différents pays
Selon sa perspective de chercheur, il est impressionné de voir les scientifiques du monde entier se serrer les coudes pour découvrir les secrets et les faiblesses du nouveau coronavirus. Au fur et à mesure que les scientifiques font des découvertes, ils se font part de leurs travaux de recherche sur les vaccins, la science et les registres, dans un flux continu d’information. Les chercheurs sont très enthousiastes face à l’évolution rapide des percées en raison de l’échange rapide d’information, souvent même avant qu’elle ne soit imprimée.
« Fait incroyable, ils sont parvenus à séquencer le génome du virus en quelques jours seulement », indique le Dr Walker. « Il s’agit d’un simple principe d’éthique que de partager ces connaissances en cette période de lutte mondiale. »
Le gouvernement du Canada a promis un montant de près de 27 millions de dollars en financement de la recherche pour contribuer à la lutte dans cette urgence mondiale; à ce jour, plus de 2 millions de dollars ont été octroyés à l’Université d’Ottawa. Tout aussi intéressantes, mentionne le Dr Walker, sont les nombreuses subventions à venir des organismes de financement du Canada, notamment ceux qui appuient les partenariats multinationaux.
D’un point de vue de santé publique, les leçons tirées des malheurs des autres pays ont permis au Canada d’être proactif dans ses efforts pour « aplatir la courbe » de propagation, mentionne le Dr Walker.
« Nous pouvons agir uniquement en fonction de ce que nous savons du virus; information qui demeure limitée pour le moment. Et c’est triste à dire, mais nous devons apprendre également d’événements comme ceux qui se sont produits sur les paquebots de croisière en raison de la crise. »
L’observation de pays voisins améliore la capacité d’adaptation et de formation
Les traditions culturelles et les normes de la démocratie libérale peuvent rendre difficiles les interventions de santé publique comme la distanciation sociale. Ce n’est que lorsque le taux de mortalité a grimpé en flèche que l’Italie a mis fin aux services religieux. Au Canada, les mesures d’éloignement social ont débuté, et dans une certaine mesure, demeurent volontaires, bien qu’elles soient de plus en plus imposées par la loi.
L’expérience italienne a incité de nombreux établissements canadiens, dont la Faculté de médecine et l’Université d’Ottawa, à passer à un mode d’enseignement en ligne et à envoyer les étudiants à la maison sans attendre une directive du gouvernement en ce sens.
« Fermer une université est une décision très difficile. L’Université d’Ottawa et la Faculté de médecine ont fait preuve d’un leadership exceptionnel à cet égard, et je ressens une immense fierté envers notre établissement. En prenant cette décision, l’Université a sauvé des centaines de vies : ces jeunes seraient tombés malades et seraient retournés à la maison auprès de leurs grands-parents », mentionne le Dr Walker.
Dans un autre exemple d’adaptation rapide, le Centre de compétences et de simulation qui est un partenariat entre l’Université d’Ottawa et L’Hôpital d’Ottawa a recours à un environnement en ligne pour guider les professionnels de la santé au moyen de scénarios de simulation impliquant des interventions médicales chez des patients atteints de la COVID-19. La simulation est une force au Canada et à la Faculté. Selon le Dr Walker, le Centre fait « un excellent travail en communiquant de l’information aux professionnels de la santé qui sont à la maison et à l’étranger au moyen de la simulation, en publiant des vidéos sur des plateformes à libre accès et en publiant rapidement des ouvrages scientifiques. »
Améliorer notre réponse en comblant les lacunes
Bien que la pandémie ait permis d’exposer les nombreuses forces de nos membres et de nos établissements, elle a aussi exposé leurs faiblesses. Maintenant que la situation est devenue très réelle, le Dr Walker remarque que les récentes compressions dans les soins de santé ici et à l’étranger ont réduit notre capacité à intervenir. « Une angoisse profonde habite tous les travailleurs de la santé quant à la possibilité de ne pas avoir suffisamment d’équipement de protection individuelle; 10 % des Ontariens atteints de la COVID-19 œuvrent dans ce secteur », dit-il.
Remédier à ces faiblesses maintenant permettra d’améliorer la préparation aux catastrophes du monde entier et des systèmes de santé dans l’ensemble. Les leçons tirées de la Chine, de Singapour et de la Corée guident notre intervention face à la pandémie et notre préparation pour l’avenir, déclare le Dr Walker.
« Cette maladie accroît la pression sur le système de santé publique. Renforcer cette infrastructure pour relever ce défi contribuera à notre lutte contre d’autres maladies », dit-il.
De plus, la sous-traitance de la capacité de fabrication a engendré une situation où la production de fournitures médicales essentielles peut se limiter à un, ou quelques, pays. Par exemple, la Chine produirait environ la moitié de l’approvisionnement mondial de masques, les exportations ayant été pratiquement interrompues, au moment où ils ont été durement touchés par le virus.
« Nous devons diversifier nos sources d’approvisionnement, ou même créer notre propre chaîne d’approvisionnement », mentionne le Dr Walker, une opinion partagée par le premier ministre Trudeau, qui a récemment annoncé un montant de 2 milliards de dollars pour appuyer des solutions canadiennes. Chez Bauer Hockey à Montréal, la production est passée des patins à glace aux écrans faciaux. Certains des plus importants fabricants de pièces automobiles au Canada sont passés à la production de ventilateurs. L’industrie canadienne fait sa part, a déclaré Navdeep Bains, ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie.
Nous devons continuer de favoriser les relations internationales si nous voulons nous préparer en période de crise, insiste le Dr Walker. Mais la mondialisation doit se faire différemment. La première étape de la prévention de futures pandémies est de limiter les voyages.
« Le vecteur a été sans aucun doute les avions », dit-il. « La mondialisation doit être davantage virtuelle si nous voulons éviter ceci dans l’avenir. »
Visionner le webinaire du Dr Mark Walker, « COVID-19 Global Pandemic and Global Response », dans lequel il:
- explique ce qu’est la COVID-19 et les conséquences de la mondialisation sur sa propagation,
- décrit comment nous avons mobilisé nos ressources et nos partenariats mondiaux afin de nous préparer à la pandémie,
- démontre comment la communauté mondiale de scientifiques collaborera en vue de la mise au point de traitements et d’un vaccin.
Lien menant à l'enregistrement du webinaire (séance en anglais, via Adobe Connect) (une heure)