Une pionnière en médecine légale

Faculté de médecine
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Kona Williams receives her MD diploma from Dr. Senterman at a convocation ceremony
La première médecin légiste autochtone au Canada a trouvé sa voie en écoutant un cours magistral sur les modifications de cellules au moment où elle faisait ses premiers pas à l’école de médecine.

Photo de Kona Williams, qui reçoit son doctorat en médecine (M.D.) des mains de la Dre Mary Senterman, professeure à l’Université d’Ottawa, lors de la collation des grades en 2009.

Par Mike Foster

Lorsqu’elle a commencé ses études en médecine dans le cadre du Programme autochtone en 2005, Kona Williams (M.D. 2009) ne savait pas du tout dans quelle spécialité elle voulait faire carrière. C’est en assistant à un cours de la Dre Mary Senterman sur la métaplasie, la dysplasie et l’anaplasie, trois types de modification des cellules, que son choix est devenu clair.

« Ce cours a été une révélation. Je ne l’ai jamais oublié », se souvient la Dre Williams qui, à l’époque, ignorait tout de la pathologie.

Pendant ses quatre années à l’école de médecine, Kona Williams a commencé à découvrir cette spécialité dans des cours au choix donnés par la Dre Senterman. Elle a poussé plus loin son exploration lors d’une résidence de cinq ans en pathologie anatomique à la Faculté de médecine.

« La Dre Senterman m’a vraiment accrochée », résume-t-elle.

Après quatorze ans d’études universitaires, dont une année de résidence à l’Université de Toronto, la Dre Williams a été embauchée en janvier par le Service de médecine légale de l’Ontario, organisme basé à Toronto qui fournit aux corps policiers de l’Ontario, des services de médecine légale.

Photo de Kona Williams à l’Université de Toronto en compagnie d’autres résidents.

« En tant que médecin légiste de catégorie A, je suis en mesure de traiter tous les cas qui nous arrivent, des surdoses de routine aux morts pédiatriques, morts suspectes et homicides en passant par les accidents de voiture et les incendies, explique Kona Williams, première femme autochtone à exercer la médecine légale au Canada.

 « Ce que je vois est parfois perturbant et pourrait même être traumatisant pour les personnes qui n’ont pas suivi toutes ces années de formation, mentionne-t-elle. Mais je sais que j’ai un travail à accomplir. Mon travail n’est pas seulement de comprendre comment la personne est morte, mais aussi de donner des réponses à la famille, au public et parfois au tribunal. »

Miser sur l’éducation

Le père de Kona, Gordon Williams, est un Cri de la Première Nation Peguis au Manitoba et sa mère, Karen Jacobs-Williams, est une Mohawk de Kahnawake.

Gordon Williams, retraité ayant participé à la Commission de vérité et réconciliation comme membre du Comité des survivants des pensionnats indiens, a travaillé pour le ministère fédéral appelé aujourd’hui Affaires autochtones et du Nord Canada. Karen Jacobs-Williams a travaillé pour le même ministère et pour la défunte Fondation autochtone de guérison, organisme s’intéressant aux effets intergénérationnels des abus commis dans les pensionnats indiens.

La famille a vécu un peu partout avant de s’établir à Ottawa au moment où la jeune Kona était à l’école secondaire. Pour ses parents, l’éducation a toujours été une priorité.

« Mon père est allé dans un pensionnat indien et il tenait à ce que mon frère et moi ayons une bonne éducation pour faire ce qu’il n’avait pas pu faire, relate-t-elle. Même après avoir traversé toutes ces épreuves, il est allé à l’université et il a réussi à devenir ce qu’il est aujourd’hui. Je suis extrêmement fière de lui. Je sais que son parcours n’a pas été facile. »

Photo de Dre Kona Williams.

 

Attirée par le Programme autochtone, Kona Williams a choisi l’Université d’Ottawa pour poursuivre ses études en médecine après son baccalauréat spécialisé en sciences à l’Université Dalhousie. La grande valeur de ce programme est de nous permettre d’étudier avec d’autres membres des Premières Nations, souligne-t‑elle. J’ai ainsi profité d’un excellent réseau de soutien. »

Mis sur pied pour encourager les membres des Premières Nations, les Métis et les Inuits à poursuivre des études en médecine, le Programme autochtone de la Faculté de médecine réserve chaque année sept places aux candidats et aux candidats autochtones. Le programme comprend des activités sociales, l’accès aux aînés et du mentorat. Du contenu autochtone et des méthodes de guérison traditionnelles y ont été intégrés. Environ 60 Autochtones étudient actuellement dans le programme ou ont obtenu leur diplôme.

Pas pour tout le monde

Mary Senterman a adoré encadrer sa protégée au cours des années. Pendant ses années à l’Université d’Ottawa, l’étudiante douée a pris part à deux projets de recherche dont sont issus deux articles publiés dans des revues scientifiques. 

« La médecine légale est une branche très spécialisée de la pathologie. Ce n’est pas pour tout le monde, explique Mary Senterman. Je suis tellement fière de Kona. Je la considère comme ma fille d’adoption ».

Kona Williams s’est déjà occupée d’environ 100 cas depuis qu’elle occupe son nouveau poste. Certains  de ces cas étaient liés à des communautés des Premières Nations. La jeune Autochtone croit qu’elle apportera une perspective unique au travail de médecin légiste, et qu’elle pourrait assumer progressivement un rôle de liaison avec les communautés des Premières Nations.

« Malheureusement, il existe beaucoup de méfiance entre les communautés des Premières Nations et le système d’enquête sur les décès, selon la Dre Williams. Certains des décès se produisant dans les communautés ne sont pas signalés. En raison du manque de communication, les gens ne savent pas ce qui est arrivé à leurs proches. »

 

« Nous voulons éviter ce genre de situation. Nous voulons être en mesure d’aller chercher les informations dans des délais raisonnables, mais d’une manière respectueuse. Nous souhaitons bâtir des ponts. Je pense que c’est là que mon rôle se situe. »

La Dre Kona Williams espère que son parcours incitera d’autres étudiants autochtones à poursuivre des études en sciences et en médecine.

« Je pense que c’est important d’accrocher les jeunes et de leur montrer que je ne suis pas un être d’exception. Il faut leur montrer qu’ils n’ont pas à être des génies pour accomplir ce que j’ai fait. Je ne voudrais pas être encore la seule membre des Premières Nations dans la profession dans dix ans! »

 

Cette histoire a premièrement apparu dans le Tabaret de l’uOttawa.