Exploration des effets de l'antigravité sur le corps humain

Faculté de médecine
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astronaute en promenade spatiale
Avec un Canadien à bord de l'ISS, notre regard est rivé sur les étoiles, et la Faculté de médecine élabore plusieurs projets de recherche financés par l'ASC dans l'optique d'aider les voyageurs de l'espace ainsi que les habitants de la Terre à se déplacer.

Le mois dernier, la Faculté avait le regard tourné vers les étoiles alors que le Dr David Saint-Jacques de l’Agence spatiale canadienne (ASC) était en route vers la Station spatiale internationale dans le cadre de sa première mission. Même si aucun diplômé de l’Université d’Ottawa ne prenait place à bord, bon nombre de nos projets en cours sont conçus pour aider les voyageurs de l’espace et les habitants de la Terre et ce, grâce au financement de l’ASC.

L’étude MARROW

Même si un séjour de six mois sur la SSI peut sembler long de nos jours,  l’avenir des voyages dans l’espace passera par l’exploration de l’espace lointain et certains voyages pourraient se prolonger jusqu’à trois ans. Certains défis sont à prévoir, notamment l’importance de comprendre les effets de la microgravité sur le corps humain. Un groupe de scientifiques de l’Université d’Ottawa étudie spécifiquement la moelle osseuse, et le Dr David Saint-Jacques, le tout dernier astronaute de l’Agence spatiale canadienne à voyager dans l’espace, est le plus récent participant de l’étude.

La moelle osseuse est un organe vital puisqu’elle est à l’origine de la création de toutes les cellules sanguines. Selon l’hypothèse la plus répandue, lorsqu’une moins grande pression est exercée sur les os en microgravité, la production de cellules sanguines peut être affectée. Les chercheurs estiment que la modification de la proportion en matière de densité osseuse, teneur en graisse et en moelle productrice de cellules sanguines pourrait mener à une diminution de la production de sang, un affaiblissement des os, et une anémie provoquée par une diminution des globules rouges dans la circulation sanguine.

Dirigée par le Dr Guy Trudel – professeur et directeur du laboratoire osteoarticulaire de recherche appliquée à l’Université d’Ottawa, et physiatre au centre de réadaptation de l’Hôpital d’Ottawa – l’étude MARROW (réaction adipeuse de la moelle osseuse : rouge ou blanche?) est financée par l’ASC. L’étude MARROW cherche à comprendre comment remédier et prévenir la baisse de la teneur en moelle osseuse et de la numération globulaire chez les astronautes. Du même coup, l’équipe du Dr Trudel souhaite comprendre si les effets de la microgravité s’apparentent à  ceux ressentis par les personnes qui  sont alités ou immobiles.

« La perspective de jouer un rôle clé dans la santé de futurs voyageurs de l’espace est vraiment exaltante », dit le Dr Trudel. « Mais ce qui rend ce travail d’autant plus satisfaisant est de savoir qu’il pourrait également être bénéfique pour plusieurs personnes ici sur la Terre, y compris les patients que je vois chaque jour au Centre de réadaptation à l’Hôpital d’Ottawa. »

Depuis décembre 2015, les chercheurs de l’étude MARROW recueillent des échantillons de sang et d’haleine d’astronautes qui sont dans l’espace. Au cours de cette période, huit astronautes ont terminé l’étude et six autres en sont à différentes phases du projet. Le Dr Saint-Jacques, le 14e et dernier participant de l’étude, a passé du temps à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa il y a quelques années pour aider à adapter l’expérience pour l’espace. Il a également été formé par les chercheurs de l’étude MARROW sur la façon de prélever, de conditionner, et d’entreposer les échantillons.

« Les données que nous recueillons sont très précieuses; si nous devions perdre une mesure dans la chaîne de prélèvement, d’entreposage et de transport, il n’y a aucune possibilité de répéter la mesure », déclare le Dr Trudel. « Je suis certain que l’avenir de notre étude est entre de très bonnes mains avec le Dr Saint-Jacques. »

L’étude de cinq ans prendra fin d’ici la mi-2020.  

Le laboratoire du Dr Bernard Jasmin : microgravité et l’atrophie musculaire

À partir d’essais sur des sujets humains ou modèles animaux et d’études cellulaires, le chercheur principal, Dr Bernard Jasmin – doyen de la Faculté de médecine et professeur à l’Université d’Ottawa – et son équipe  mènent des recherches sur les mécanismes qui sont à l’origine de l’atrophie musculosquelettique. Le but ultime de l’équipe est de développer de nouveaux outils thérapeutiques qui pourraient limiter, remédier, ou même prévenir l’atrophie avant qu’elle ne se manifeste.

Lorsqu’un astronaute fait un séjour prolongé dans l’espace, la microgravité provoque l’atrophie musculosquelettique. Ce processus catabolique se produit lorsque les muscles sont moins sollicités, entraînant le corps à croire qu’il a besoin d’une moins grande masse musculaire. Par conséquent, les cellules musculaires existantes décomposent les protéines à un rythme plus rapide qu’elles ne sont reproduites, se traduisant ainsi par une perte du volume et de la teneur musculaires pour l’astronaute. 

L’atrophie musculaire est aussi un problème important pour les habitants de la Terre, notamment pour les personnes atteintes de maladies entraînant une fonte musculaire comme c’est le cas pour les différentes formes de dystrophie musculaire et les patients atteints d’une maladie comme le diabète, le SIDA et le cancer, ainsi que pour les patients  confinés à un alitement prolongé. 

Des études expérimentales d’alitement cherchent à découvrir si diverses combinaisons de  micronutriments et l’exercice peuvent avoir des effets bénéfiques sur le muscle squelettique après des périodes prolongées d’inactivité. Des études similaires sont effectuées alors que des sujets humains sont appelés à flotter dans l’eau sur un matelas de caoutchouc pour diverses périodes de temps pour imiter la microgravité. Ces essais sur des sujets humains sont réalisés en partenariat avec les collaborateurs de l’Université de Montpellier et l’étude portant sur l’alitement et les micronutriments est cofinancée par l’ASC, le Centre national d’études spatiales (CNES) et l’Agence spatiale européenne (ESA).

« Des collaborations internationales nous permettent de consolider des connaissances et expertises variées et d’en tirer parti », mentionne le Dr Jasmin. « Étant donné qu’il n’y a aucune frontière dans l’espace, il va donc de soi qu’une équipe internationale travaille sur un projet de cette envergure. » 

« De plus, ces collaborations internationales permettent à nos stagiaires de s’impliquer dans la recherche spatiale de pointe », ajoute-t-il.

Le savoir acquis grâce à ces études permettra non seulement de renseigner les professionnels des soins de santé du Canada sur les meilleurs protocoles pour contrer l’atrophie musculosquelettique en milieux cliniques, mais pourrait ultimement jouer un rôle clé pour l’avenir des voyages dans l’espace.

 

 

 

 

 

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