Prendre soin des sans-abri au temps de la COVID-19, et après

Faculté de médecine
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Six étudiants brandissant des pancartes disant «Soutenir les refuges en Ontario pendant COVID -19»
Cliniciens, chercheurs et étudiants de la Faculté de médecine tournent leur attention vers les personnes les plus vulnérables durant la pandémie, et tirent d’importants enseignements de cette expérience.

Par Michelle Read
Rédactrice

Restez à la maison, lavez-vous les mains, respectez les deux mètres de distance… ce sont des mesures préventives relativement simples pour se protéger de la COVID-19. Mais que faire lorsque vous n’avez pas de foyer, pas toujours accès à de l’eau et du savon, et que vous dormez dans un lit de camp à deux pieds d’une autre personne?

Santé publique Ottawa a établi que les personnes vivant dans des refuges sont particulièrement à risque de contracter la COVID-19, compte tenu de leurs conditions de vie. C’est pourquoi elles ont été testées en priorité peu après l’apparition de cette nouvelle menace pour la santé.

En plein cœur de la pandémie actuelle, plusieurs professeurs et étudiants de la Faculté de médecine ont dirigé leur attention vers les soins aux personnes les plus vulnérables de la société. En tant que grande université dotée d’une école de médecine axée sur la recherche, l’Université d’Ottawa dispose d’abondantes ressources qui, appliquées de manière réfléchie, peuvent faire une énorme différence dans le contexte actuel de COVID-19.

« Il s’agit de réorienter nos activités et nos ressources adéquatement pour réagir avec célérité », explique la Dre Claire Kendall, nouvelle doyenne adjointe de la responsabilité sociale à la Faculté. « Notre principale responsabilité consiste à travailler directement avec les collectivités afin de connaître leur état de santé et leurs besoins, et pouvoir ainsi établir et renforcer les bons partenariats ».

Tests de dépistage de la COVID-19 dans les rues et les refuges

Le Dr Jeffrey Turnbull, ancien vice-doyen à l’éducation médicale de l’Université d’Ottawa et actuel professeur au Département de médecine, travaille depuis plus de 20 ans auprès des populations vulnérables à l’Ottawa Inner City Health (OICH).

Directeur médical de l’OICH depuis 2017, le Dr Turnbull dirige un programme destiné à offrir des services aux personnes vulnérables directement dans la rue au moyen d’une camionnette. L’objectif de ce programme a récemment été réorienté vers le dépistage de la COVID-19 chez les sans-abri. Selon le Dr Turnbull, l’abondance du personnel de l’Université d’Ottawa offre un énorme potentiel de ressources.

« La recherche des contacts et les tests poseront d’énormes problèmes. Notre personnel qualifié peut en faire beaucoup, et a déjà apporté une grande contribution », a-t-il expliqué récemment. Il a ajouté que les sans-abri sont confrontés à des défis singuliers.

« Les consignes destinées à assurer notre sécurité ne s’appliquent pas à eux; ils se sentent exclus des conseils de santé publique ».

La Dre Kendall, elle-même bénévole dans le cadre du projet, convient que le fait de travailler directement avec les personnes marginalisées offre la possibilité de mieux connaître leurs besoins.

« C’est l’occasion de leur demander s’ils ont besoin de notre aide et, surtout, comment nous pouvons les aider », dit-elle. « Et, par la même occasion, nous établissons une confiance et des relations avec la santé publique et d’autres groupes communautaires ».

Sensibiliser les leaders de demain

« Même avant que la COVID-19 ne frappe, le programme d’études médicales de la Faculté était en train d’évoluer de manière à répondre de façon plus directe aux besoins de la collectivité », explique la Dre Kendall. La pandémie nous confirme que c’était un choix avisé.

« Nous nous efforçons de faire en sorte que nos étudiants soient intégrés dans la collectivité, ce qui leur permet de collaborer en équipes pour s’occuper des populations marginalisées », dit-elle.

Suzanne Boroumand, étudiante en médecine, a créé un fonds de secours et une campagne de sensibilisation aux refuges des sans-abri en Ontario en période de COVID-19; 59 étudiants en médecine se sont regroupés pour sensibiliser le public aux difficultés des populations vulnérables pendant la pandémie.

« Nous amenons les gens à réfléchir aux besoins des personnes qui n’ont pas les produits de première nécessité ou les systèmes de soutien nécessaires », explique Mme Boroumand. « Les fonds amassés aideront les refuges, qui n’acceptent plus les dons non monétaires tels que la nourriture, le linge et les articles de toilette, sur lesquels ils pouvaient compter auparavant. »

Afin d’éclairer l’élaboration du programme d’études, la Faculté va au-delà de la simple évaluation des compétences des apprenants. Le but ultime, nous dit la Dre Kendall, est d’évaluer les effets de la mise en œuvre de notre programme sur nos collectivités et sur notre système de santé.

Valeur de la recherche

La responsabilité sociale fait également partie de l’enseignement et de la recherche aux études supérieures et postdoctorales.

« Les organismes subventionnaires demandent aux chercheurs d’examiner dans quelle mesure leurs recherches sont pertinentes pour la population. Comment puis-je inclure les patients dans mes activités de recherche de sorte que leurs points de vue y occupent une place centrale? » déclare la Dre Kendall.

Le Dr Doug Gruner, médecin de famille et professeur agrégé au Département de médecine familiale, affirme que des données solides sont essentielles pour présenter des arguments importants en faveur des droits et des besoins des populations vulnérables. Ces données sont produites par des chercheurs comme les Dres Claire Kendall et Smita Pakhalé, qui étudient les effets de la COVID-19, dont l’isolement social et les difficultés économiques, sur les personnes marginalisées.

« La recherche est un aspect important de la défense des droits », a récemment déclaré le Dr Doug Gruner.

La COVID-19 met en évidence les problèmes systémiques qui sous-tendent les inégalités de la population en matière de santé, et pas seulement en période de pandémie. Cela nous donne, du moins, l’occasion de renforcer davantage le soutien aux populations vulnérables dans leur quotidien, au-delà de la crise.

« Je suis optimiste et enthousiasme. Il y a un grand nombre d’enseignements que nous pouvons tirer de cette crise qui nous permettront de créer une société meilleure », a déclaré le Dr Gruner.

 

Photo principale : Cinquante neuf étudiants en médecine se sont regroupés pour sensibiliser le public aux difficultés des populations vulnérables pendant la pandémie. De gauche à droite: Kaitlin Endres, Ieta Shams, Mojgan Rezaaifar, Suzanne Boroumand, Ashkan Jahangirnia, Panteha Babelmorad.

Un homme allongé sur un banc à l'extérieur