Le sourire derrière le masque

Faculté de médecine
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Hui Yan et Jason Tran a coté d'un bonhomme de neige, tous portant des masques
Les étudiants en médecine Hui Yan et Jason Tran créent des portraits à apposer sur l’EPI afin de montrer le visage des travailleurs de la santé durant la pandémie.
par Kate Jaimet
Rédactrice principale

C’est en faisant du bénévolat dans la salle d’attente de l’unité des soins intensifs de l’hôpital Royal Victoria du Centre universitaire de santé McGill que Hui (Harriet) Yan, étudiante en médecine, s’est rendu compte pour la première fois de l’importance du contact humain.  

« Mon rôle de bénévole à l’hôpital n’avait rien de technique et n’impliquait pas de soins aux patients. Je tenais plutôt compagnie aux familles inquiètes, anxieuses et confuses qui attendaient des nouvelles de leurs proches », raconte Hui qui était alors étudiante à la maîtrise en neurosciences à l’Université McGill. « En tant que bénévole mon rôle était d’être une ressource amicale, quelqu’un à qui ils pouvaient se confier s’ils en avaient envie. J’ai donc constaté l’importance de l’interaction humaine en personne ».

En 2020, la pandémie de la COVID-19 a non seulement empêché Hui et ses collègues bénévoles dans le programme ICU Bridge de faire leur travail à l’unité des soins intensifs, mais a également rendu nécessaire pour les travailleurs de la santé de couvrir leur visage d’un masque et d’un écran.

Cherchant une façon de continuer à s’impliquer bénévolement à l’hôpital malgré la pandémie, l'équipe ICU Bridge est tombée sur un article au sujet des portraits portraits apposés sur des EPI; une initiative qui invite les travailleurs de la santé à apposer leur portrait sur l’équipement de protection individuelle qu’ils portent pour que leurs patients et collègues puissent découvrir le visage derrière le masque. Cette idée, une initiative de la photographe américaine Mary Beth Heffernan, a vu le jour lors de la crise du virus Ebola en Afrique, de 2014 à 2016.

« Le caractère étranger de l’équipement  de protection individuelle accentue le sentiment d’isolement chez les patients et contribue à la peur du virus Ebola. Ceci diminue alors la capacité des cliniciens à établir un lien de confiance et affectif avec les patients », notait Madame Heffernan sur son site Web. « Le portrait apposé sur l’équipement peut contribuer à atténuer la peur associée à l’ÉPI, favorisant ainsi un échange plus personnel entre le fournisseur de soins et le patient, et réduisant le stress chez le patient. »

Hui et les autres membres exécutifs de ICU Bridge ont alors communiqué avec des membres du personnel infirmier de l’unité des soins intensifs pour leur offrir de créer des portraits à apposer sur l’EPI. Rapidement, l’initiative est parvenue à  tout le personnel infirmier, les médecins, les inhalothérapeutes, les ergothérapeutes et même le personnel d’entretien. 

« Dès qu’ils ont commencé à porter leur portrait dans l’unité des soins intensifs, leurs collègues ont remarqué et demandé à avoir eux aussi leur portrait », a déclaré Mme Yan. « Ce fut une expérience tellement positive, non seulement dans leurs interactions avec les patients, mais aussi avec leurs collègues. »  

Des articles parus dans le Journal of Pain and Symptom Management et Journal of General Internal Medicinerapportaient des initiatives semblables dans des hôpitaux américains; les fournisseurs de soins de santé ayant trouvé de nombreux bénéfices au port d’un portrait d’ÉPI. L’un d’eux rapportait que « cela contribuait à avoir moins le sentiment de se retrouver en plein cœur d’une zone sinistrée. »

À l’automne 2020, Hui a commencé ses études en médecine à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa. À ce moment, elle était devenue l’un des membres exécutifs de PPE Portraits Canada, un organisme bénévole qui dérive du program ICU Bridge et qui est voué à la création de portraits pour les travailleurs de la santé canadiens. 

Grâce aux médias sociaux, elle a sollicité la collaboration de ses collègues étudiants en médecine de l’Université d’Ottawa, pour l’aider à mettre l’initiative sur pied à Ottawa. Jason Tran, étudiant de deuxième année en médecine, s’est joint à la cause.

« Je m’intéresse beaucoup aux arts, » a-t-il dit. « Cette [initiative] permet d’intégrer les arts et les sciences humaines; quelque chose qui doit se faire plus souvent en médecine. » 

Pour les deux étudiants, le plus grand défi pour démarrer le projet à Ottawa a été la logistique : promouvoir l’initiative, distribuer les portraits à différents sites hospitaliers et trouver des subventions pour couvrir les frais d’impression et de distribution. 

Jusqu’à présent, ils ont reçu 81 demandes de portraits à apposer sur l’EPI, principalement de résidents et d’étudiants de troisième et quatrième année en médecine et en ont livré 66.

« Bien que l’ÉPI soit essentiel, il nuit au contact humain », rapportait Hui. « Pour moi, le sourire sympathique d’une personne rappelle aux gens qu’un visage humain se cache derrière le masque. »

Les travailleurs de la santé de première ligne qui souhaitent commander, sans frais, un portrait à apposer sur l’EPI peuvent remplir le formulaire en ligne sur le site Web de PPE Portraits Canada.

MD student Hui Yan wearing a mask and holding up a headshot of herself

 

md student Jason tran wears a mask, while holding up a photo of himself