Une équipe de recherche de l’Université d’Ottawa met en lumière le potentiel de nanostructures métalliques

Média
Salle de presse
Représentation artistique d’une métasurface consistant en un réseau rectangulaire de nanostructures d’or rectangulaires générant des résonances plasmoniques de surface.
Un article publié récemment dans Nature Communications par une équipe de recherche de l’Université d’Ottawa déboulonne un vieux mythe voulant que les métaux soient inutiles en photonique (la science et la technologie de la lumière), ce qui devrait mener à de nombreuses applications en nanophotonique.

« Nous avons obtenu des résonances exceptionnelles dans un réseau périodique de nanoparticules métalliques, avec un facteur de qualité (facteur Q) dix fois plus grand que dans les recherches antérieures », rapporte l’auteure principale, Ksenia Dolgaleva, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en photonique intégrée (niveau 2) et professeure agrégée à l’École de science informatique et de génie électrique (SIGE) de l’Université d’Ottawa.

« C’est bien connu : lorsqu’ils interagissent avec la lumière, les métaux occasionnent beaucoup de pertes; ils dissipent l’énergie électrique. C’est pourquoi ils sont peu utilisés en optique et en photonique. Or, nous avons obtenu des résonances au facteur de qualité ultra-élevé dans une métasurface (surface structurée artificiellement) formée d’un réseau de nanoparticules métalliques intégré dans un substrat de verre plat. Comme ces résonances peuvent servir à manipuler efficacement la lumière et à améliorer l’interaction lumière-matière, nos résultats montrent l’utilité des métaux en photonique. »

« D’autres chercheurs avaient déjà tenté de réduire les pertes pour profiter des propriétés intéressantes des réseaux de nanoparticules métalliques », observe le co-premier auteur de l’étude Md Saad Bin-Alam, doctorant à l’École de science informatique et de génie électrique (SIGE) de l’Université d’Ottawa.

« Leurs tentatives n’ont cependant pas entraîné d’augmentation significative du facteur de qualité de la résonance des réseaux. C’est en utilisant une combinaison de techniques plutôt qu’une approche unique que nous avons réussi à établir un nouveau record en multipliant le facteur de qualité multiplié par dix pour un réseau de nanoparticules métalliques (métasurface). »

Selon les chercheurs, les surfaces structurées (ou métasurfaces) sont très prometteuses pour diverses applications en nanophotonique où il est impossible d’utiliser des matériaux naturels classiquement utilisés comme substrats. Capteurs, nanolasers, guidage et façonnage de faisceaux lumineux ne sont que quelques exemples de ces nombreuses applications.

« Les métasurfaces faites de nanoparticules de métaux nobles – l’or ou l’argent, par exemple – présentent des avantages uniques par rapport aux nanoparticules non métalliques. Elles peuvent confiner et contrôler la lumière dans un volume aux dimensions nanométriques inférieures au quart de sa longueur d’onde (moins de 100 nm, alors que le diamètre d’un cheveu est supérieur à 10 000 nm) », explique Md Saad Bin-Alam.

« Ce qui rend les nanoparticules métalliques particulièrement intéressantes par rapport aux autres, c’est que la lumière n’y est pas confinée, piégée à l’intérieur, mais plutôt concentrée près de la surface. On appelle ce phénomène “résonance de plasmon de surface localisé”, ou LSPR (de l’anglais “localized surface plasmon resonance”). Cette caractéristique rend les nanoparticules métalliques très supérieures à leurs équivalents diélectriques, parce que de telles résonances de surface pourraient servir à détecter des organismes ou des molécules en médecine ou en chimie. Comme elles peuvent aussi constituer le mécanisme de rétroaction à l’origine de l’effet laser, on pourrait les utiliser pour fabriquer un minuscule laser nanométrique aux nombreuses applications en nanophotonique, comme le LIDAR (détection et télémétrie par ondes lumineuses) pour la détection d’objets en champ lointain. »

L’efficacité de ces applications dépendrait toutefois des facteurs de qualité de la résonance.

« Malheureusement, étant donné les pertes par absorption et par rayonnement élevées dans les nanoparticules métalliques, les facteurs Q des LSPR sont très faibles », rapporte Orad Reshef, co-premier auteur et postdoctorant au Département de physique de l’Université d’Ottawa.

« Il y a plus d’une décennie, des chercheurs ont trouvé une façon de réduire les pertes par absorption en disposant soigneusement les nanoparticules en réseau, révélant ainsi une “résonance de réseau” (ou SLR, pour “surface lattice resonance”). Au début, les facteurs Q rapportés pour les SLR atteignaient à peine quelques centaines. Même si c’était supérieur aux facteurs Q des LSPR, ce n’était pas encore très impressionnant, ni très efficace. C’est ainsi qu’est né le mythe voulant que les métaux soient inutiles pour des applications pratiques. »

C’est ce mythe que le groupe a pu déboulonner en menant des recherches au Complexe de recherche avancée de l’Université d’Ottawa de 2017 à 2020.

« Nous avons d’abord modélisé numériquement une métasurface de nanoparticules d’or, et nous avons eu la surprise d’obtenir des facteurs de qualité de l’ordre de plusieurs milliers », explique Md Saad Bin-Alam, qui a conçu la structure de la métasurface.

« Aucune étude expérimentale ne rapportait de facteur Q aussi élevé; nous avons donc décidé d’en analyser l’origine et de tenter de le reproduire. Nous avons obtenu un facteur Q pour la SLR de près de 2 400, c’est-à-dire plus de dix fois le maximum rapporté antérieurement. »

L’équipe a alors réalisé que les métaux leur réservaient encore de nombreuses surprises.

« Nos recherches ont montré que les nanostructures métalliques (plasmoniques) recelaient encore de nombreux mystères, conclut Orad Reshef, l’artisan de la métasurface expérimentale. Nos travaux ont mis fin à la croyance vieille d’une décennie, selon laquelle ces structures n’étaient pas adaptées à des applications optiques concrètes en raison des pertes élevées. Nous avons montré qu’en préparant adéquatement la nanostructure et en menant soigneusement l’expérience, il était possible d’améliorer grandement les résultats. »

L’article, intitulé « Ultra-high-Q resonances in plasmonic metasurfaces », est publié dans Nature Communications. Les chercheurs principaux, Md Saad Bin-Alam et Orad Reshef, ont reçu l’aide de Yaryna Mamchur pour mener l’expérience et de Mikko Huttunen pour la modélisation numérique. Les professeurs Ksenia Dolgaleva et Robert W. Boyd supervisaient conjointement la recherche, en collaboration avec le professeur Jean-Michel Ménard et Iridian Spectral Technologies. Les autres coauteurs, Zahirul Alam et Jeremy Upham, ont participé à la rédaction de l’article. M. Alam a également contribué au montage expérimental.

Pour les demandes médias :
Justine Boutet
Agente de relations médias
Université d’Ottawa
Tél. : 613‑762‑2908
[email protected]