La prédominance historique des hommes dans les STIM est encore une réalité, autant sur les bancs d’école que sur le marché du travail. Toutefois, la professeure Carole Yauk, du Département de biologie de l’Université d’Ottawa, croit qu’avec suffisamment d’encouragement, de ressources et de mentorat, les femmes peuvent mener une brillante carrière dans les STIM.
L’appui de mentores et mentors, de la famille et des collègues est déterminant pour leur succès. La professeure Yauk maintient que la clé, c’est le renforcement positif dès l’école secondaire et tout au long du parcours universitaire. Les femmes qui trouvent l’appui de modèles dans leur domaine sont plus susceptibles de persévérer dans ces disciplines. Hélas, il y a souvent bien peu de mentores en STIM, surtout en chimie et en physique. Devant ce manque de représentation féminine, beaucoup peuvent se sentir isolées. Voilà pourquoi les réseaux de mentorat sont si importants : ils aident les femmes à surmonter les obstacles, à demeurer dans ces champs d’études et à y faire carrière.
Fait encourageant : les mentors masculins sont nombreux à défendre l’égalité des genres en STIM. Témoignant de sa propre expérience, la professeure Yauk mentionne que plusieurs de ses mentors – superviseurs, collègues et alliés – l’ont aidée à réussir dans le milieu malgré le peu de représentation féminine au début de sa carrière. « J’encourage fortement mes collègues à être des féministes, quel que soit leur genre! J’ai été chanceuse que mes mentors, des hommes, en soient. Pour moi, leur soutien et leur encouragement ont été déterminants dans la poursuite d’études supérieures en science, puis d’une carrière en STIM », relate-t-elle.

« J’encourage fortement mes collègues à être des féministes, quel que soit leur genre! J’ai été chanceuse que mes mentors, des hommes, en soient. »
Professeure Carole Yauk, Département de biologie
Le réseautage est un autre facteur de réussite important pour les femmes en STIM. En tissant des liens avec d’autres scientifiques et professionnelles, elles peuvent échanger sur leur vécu et surmonter des difficultés courantes. Les colloques, les groupes professionnels et les discussions informelles sont des espaces sûrs où elles peuvent parler de leurs défis personnels et professionnels, comme la gestion de priorités concurrentes ou l’inégalité des genres.
À l’Université d’Ottawa, la professeure Yauk organise une rencontre mensuelle pour les femmes en biologie. Il s’y forme une communauté de soutien où parler de son expérience et défendre les femmes en STIM. Le groupe discute par exemple de problèmes de santé, de cas d’inégalité entre les genres et de la sous-représentation des femmes de couleur dans le milieu universitaire. Il y a encore beaucoup de chemin à faire avant que le corps professoral soit aussi diversifié que la population étudiante.
Le syndrome de l’imposteur constitue un écueil fréquemment rencontré chez les femmes en STIM. Les personnes qui en souffrent ont l’impression de ne pas mériter leurs réussites, ou sont peu enclines à se faire valoir, par manque d’assurance. La professeure Yauk suggère d’aborder ce syndrome sous un autre angle : un outil d’introspection pouvant aider les femmes à développer leur résilience, leurs compétences et leur assurance pour relever les défis.
La diversité dans les STIM n’est pas qu’une fin en soi, c’est aussi un réel avantage. Les femmes apportent des perspectives uniques, de la créativité et du leadership dans leur milieu de travail, atouts de plus en plus valorisés. Souvent généreuses de leur temps, elles ont tendance à se porter volontaires pour assumer des fonctions qui contribuent aux objectifs stratégiques de l’organisation (ex. : comités, tâches administratives). Ce travail est sous-apprécié mais essentiel, et son importance devrait être reconnue.
Les équipes scientifiques mixtes sont plus susceptibles d’atteindre des résultats marquants et inédits dans divers domaines que les équipes unisexes (Yang et coll., 2022). La diversité est source d’innovation et de résilience, qualités cruciales pour surmonter des défis de recherche, comme un manque de financement ou de ressources. « Conscient de ces avantages, le corps professoral s’emploie à mieux représenter la diversité de genre et à favoriser une excellente inclusivité dans notre environnement de recherche », affirme Alexandre Poulain, vice-doyen à la recherche et à l’infrastructure.
Pour surmonter les défis, les femmes peuvent faire part de leurs expériences personnelles à leurs pairs. Ces échanges les aident à normaliser leurs difficultés communes et les motivent beaucoup à poursuivre leur carrière en STIM. Par ailleurs, en saisissant les occasions de mentorat et de réseautage, les femmes peuvent apprendre à mieux se faire valoir, cultiver une mentalité de croissance et croire en leurs capacités. Avec l’appui d’alliés masculins comme d’alliées féminines, elles gagnent en résilience et persévèrent dans leur parcours d’études et de carrière. C’est ainsi qu’elles peuvent contribuer grandement au progrès scientifique.
Carole Yauk récompensée
La professeure Carole Yauk a reçu le prestigieux prix Alexander Hollander 2025 pour sa contribution exceptionnelle au domaine de la mutagénèse et de la génomique environnementales, en particulier en ce qui a trait aux polluants environnementaux et la santé humaine, décerné par la Environmental Mutagenesis and Genomics Society (EMGS). Avant de poursuivre ses recherches à l'Université d'Ottawa, elle a passé 17 ans à Santé Canada en tant que chercheuse scientifique, se concentrant sur la manière dont les polluants et les stress environnementaux induisent des mutations génétiques héréditaires dans les organismes. La professeure Yauk est un leader international reconnu pour avoir promu le développement du cadre de la voie des effets indésirables (AOP), qui décrit comment les substances toxiques contribuent aux effets sur la santé. Elle a siégé dans de nombreux comités prestigieux, tant au niveau local qu'international.