Rôles et responsabilités

Santé et sécurité au travail en Ontario

Module 2.1 - Objectifs d’apprentissage

  • Connaître des lois et règlements applicables
  • Connaître des organismes provinciaux concernés
  • Connaître les éventuelles conséquences de l’inaction
  • Connaître le concept de diligence raisonnable

Module 2.2 - Législation ontarienne et canadienne

La législation ontarienne et canadienne relative à la santé et à la sécurité au travail repose sur divers textes juridiques, par exemple :

  • Loi sur la santé et la sécurité au travail
  • Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail
  • Code de prévention des incendies de l’Ontario
  • Code du bâtiment de l’Ontario
  • Code criminel du Canada
  • Loi sur les agents pathogènes humains et les toxines
  • Loi sur la protection de l'environnement
  • Loi sur le transport des marchandises dangereuses
  • Loi sur la protection et la promotion de la santé
  • Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires

Dans le présent atelier, nous nous pencherons surtout sur la Loi sur la santé et la sécurité au travail.

Les règlements pris en application d’une loi précisent certains processus et clarifient certains points de la loi. Par exemple, le Règlement 860 pris en application de la Loi sur la santé et la sécurité au travail établit les exigences relatives au Système d’information sur les matières dangereuses utilisées au travail (SIMDUT), le Règlement 273 établit les exigences relatives aux chantiers de construction, etc. On peut dire que la loi dicte la fin et que le règlement dicte les moyens.

 Une infraction à un règlement est une infraction à la loi en vertu de laquelle il est établi. Les dispositions d’un règlement peuvent être encore plus précises si elles exigent de se conformer à une norme établie, par exemple une norme de l’Association canadienne de normalisation (CSA). Les normes ne sont pas des lois à proprement parler, mais si un organisme de réglementation comme le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences indique dans un règlement qu’une norme s’applique, les dispositions de la norme font partie intégrante du règlement. Un bon exemple d’une telle situation est la norme CSA Z412, L’ergonomie au bureau — Une norme d’application pour l’ergonomie des postes de travail. Cette norme, conçue comme un document de référence, a été incorporée à la législation ontarienne, ce qui en fait la norme de référence applicable pour l’ergonomie au bureau. D’autres normes ont été incorporées à des lois, par exemple des normes sur l’équipement de protection individuelle, les chariots élévateurs, les robots, etc. Il est possible de consulter la liste des normes de la CSA mentionnées dans les lois de l’Ontario.

La Loi sur la santé et la sécurité au travail établit les devoirs des différentes parties du milieu du travail, vus dans l’atelier Sensibilisation des travailleurs à la santé et à la sécurité (employeur, superviseuses et superviseurs, travailleuses et travailleurs). Soulignons que ces devoirs sont à la base du système de responsabilité interne. Ainsi, chaque partie doit remplir les siens pour assurer un milieu de travail sain et sûr.

Il est important de noter que la législation établit les critères minimaux dans un champ d’application donné.

Bien que chaque élément de la législation soit indépendant, plusieurs lois se recoupent. Par exemple :

  • La Loi sur la santé et la sécurité au travail établit les exigences minimales en matière de santé et de sécurité au travail.
  • La Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail établit le cadre de gestion des indemnisations en Ontario.
  • Le Code de prévention des incendies de l’Ontario établit les exigences minimales en matière de protection et de sécurité incendie requises pour le maintien d’une norme acceptable.
  • Le Code du bâtiment de l’Ontario établit les exigences minimales pour a construction et la rénovation des bâtiments.
  • Le Code criminel du Canada encadre le droit pénal canadien. La pertinence de ces textes sera abordée plus loin.

Les bons termes, c’est important!

Il est important de comprendre la terminologie utilisée dans les lois et la portée de chaque terme. Par exemple, les termes ci-dessous sont souvent utilisés dans les lois, les règlements et les méthodes, et chacun a un sens bien particulier.

  • Doit, devra indique une exigence, une obligation.
  • Devrait indique une recommandation, un conseil (sans obligation).
  • Peut, pourrait indique une option (choix) autorisée en vertu de la loi ou du règlement.
  • Et indique une exigence ou une option supplémentaire.
  • Ou indique une exigence ou une option différente.

Souvent, le lectorat constatera que « doit » est plus courant dans les lois ou les méthodes, et « devrait » ou « pourrait », dans les guides.

Notons que les textes législatifs sont subdivisés (p. ex. parties, articles, paragraphes). Évidemment, nul n’est tenu de mémoriser le libellé des lois ou des règlements, mais il est important de connaître la structure de ces textes. Par exemple, la partie III de la Loi sur la santé et la sécurité au travail précise les devoirs des employeurs et d’autres personnes. L’article 25 porte sur les devoirs des employeurs, les paragraphes contenant des précisions à ce sujet. Aux termes de l’alinéa 25 (2) h), « l’employeur [...] prend toutes les précautions raisonnables dans les circonstances pour assurer la protection du travailleur ». Un renvoi à cet alinéa (fondamental pour le présent atelier) irait comme suit : Loi sur la santé et la sécurité au travail, partie III, alinéa 25 (2) (h).

Module 2.3 - Organismes de réglementation

La législation précise des exigences, et les organismes de réglementation font respecter ces exigences. Dans le présent atelier, nous présenterons deux de ces organismes.

Ministère du Travail, de l'Immigration, de la Formation et du Développement des compétences

Créé en 1919 pour élaborer et appliquer la législation sur le travail, le ministère du Travail, de l'Immigration, de la Formation et du Développement des compétences a pour mission de promouvoir des pratiques de travail sûres, équitables et harmonieuses qui sont indispensables au mieux-être social et économique de la population ontarienne. La santé et la sécurité au travail, les normes d’emploi et les relations de travail relèvent de sa compétence. Ses inspectrices et inspecteurs, qui appartiennent à la Division des opérations, sont chargés de faire respecter les exigences énoncées dans la Loi sur la santé et la sécurité au travail.

Certains incidents et accidents, particulièrement les plus graves (par exemple ceux qui causent des blessures graves ou des décès), doivent être déclarés au ministère du Travail, de l'Immigration, de la Formation et du Développement des compétences. Dans la plupart des cas, la déclaration doit être faite immédiatement, et c’est pourquoi ces événements doivent être signalés sans délai à l’Université. Autrement, l’Université s’expose à des ordonnances, à des amendes ou même à des poursuites en matière réglementaire. Dans l’atelier Sensibilisation des travailleurs à la santé et à la sécurité, on a vu que, lorsqu’une personne se blesse, il faut la secourir et communiquer avec le Service de la protection au poste 5411.

Le Bureau de la dirigeante principale de la gestion des risques se chargera des communications (rapports et liaison) avec le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences au nom de l’Université.

Abordons maintenant l’application de Loi sur la santé et la sécurité au travail et les peines prévues.

Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail

La Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) de l’Ontario est l’un des plus grands organismes d’assurance en Amérique du Nord, couvrant plus de cinq millions de personnes dans plus de 300 000 lieux de travail dans tout l’Ontario. La CSPAAT fournit des prestations pour perte de salaire, une couverture médicale et du soutien au retour au travail après une lésion ou une maladie reliée au travail. Elle est financée par les primes que paient les entreprises de l’Ontario (y compris l’Université d’Ottawa). Par ailleurs, elle fournit une assurance collective sans égard à la responsabilité et un accès à des renseignements sur la santé et la sécurité concernant les divers secteurs d’industrie. Ainsi, les travailleuses et travailleurs sont admissibles à certaines prestations ou indemnités s’ils sont blessés ou malades en raison de leur travail, et ils n’ont pas à faire personnellement des réclamations à leur employeur. Cette pratique a été instaurée voilà plus de 100 ans.

L’Université doit aviser la CSPAAT de tout incident ou accident en milieu de travail qui nécessite des soins médicaux ou entraîne une interruption du travail. Tout défaut de rapporter une lésion survenue au travail à la CSPAAT dans les délais prescrits et/ou de la manière prescrite donne lieu à une amende. Il est essentiel de rapporter tout incident ou accident, aussi mineur soit-il, à sa superviseuse ou son superviseur (et à l’Université), par les voies appropriées et dans les délais prescrits, afin que l’Université puisse se conformer aux exigences de la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail. Comme on l’a vu dans l’atelier Sensibilisation des travailleurs à la santé et à la sécurité, il faut remplir le formulaire de déclaration d’accident, d’incident, de maladie professionnelle ou d’accident évité de justesse et le transmettre dès que possible (au plus tard 24 heures après l’événement).

Il importe de noter que les signalements faits au Service de la protection ne constituent pas une déclaration à la CSPAAT. Le Service de la protection rédige des rapports pour ses propres dossiers et ne transmet pas à la CSPAAT de déclaration d’accident ou d’incident en milieu de travail. Par conséquent, les personnes concernées doivent consciencieusement et rapidement remplir et transmettre le formulaire de déclaration d’accident, d’incident, de maladie professionnelle ou d’accident évité de justesse.

Le secteur Santé et mieux-être des Ressources humaines se charge des communications (rapports et liaison) avec la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail. C’est également ce secteur qui gère le programme de retour au travail, dont l’objectif est de permettre aux personnes malades ou blessées de reprendre le travail en toute sécurité et dans les meilleurs délais.

Pour en savoir plus sur l’application de la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail et les peines, cliquer sur les titres ci-dessous.

Module 2.4 - Méthode de l'uOttawa 14-1

L’Université est allée encore plus loin et a établi la Méthode 14-1 – Système de responsabilité interne en matière de santé et de sécurité en application du Règlement 77 – Santé et sécurité au travail. Cette méthode définit les rôles et responsabilités des différents membres de la communauté universitaire à l’égard des questions de santé et de sécurité et explique le cadre de responsabilité de l’Université en matière de santé et de sécurité. Elle s’applique à tous les membres de la communauté universitaire.

Selon la méthode, il incombe à l’employeur et aux superviseuses et superviseurs de prendre toute précaution raisonnable selon les circonstances pour protéger la santé et la sécurité et prévenir les accidents, les incidents, les maladies professionnelles et les blessures en milieu de travail. C’est ce qu’on appelle faire preuve de « diligence raisonnable » (définie comme étant le degré de jugement, de soin, de prudence, de détermination et d’action auquel on peut raisonnablement s’attendre d’une personne dans certaines circonstances). 

Dans la méthode, les devoirs prescrits dans Loi sur la santé et la sécurité au travail sont étoffés et appliqués au contexte de l’Université. Cliquer sur les titres pour en savoir plus sur chaque groupe.

La méthode permet aux membres de la communauté universitaire de connaître leurs responsabilités en matière de santé et de sécurité, qui s’ajoutent aux responsabilités prescrites dans les lois de l’Ontario. En cas d’incertitude, il faut agir en s’appuyant sur la norme de diligence raisonnable.

Module 2.5 – Diligence raisonnable

Les infractions aux règlements, comme les règlements pris en application de la Loi sur la santé et la sécurité au travail, sont des infractions de responsabilité stricte. La seule défense possible est d’établir qu’il a fait preuve de diligence raisonnable dans l’exercice de ses pouvoirs, c’est-à-dire qu’elle a déployé tous les efforts raisonnables pour prévenir l’accident ou l’incident, mais que les conditions existantes étaient telles qu’aucune mesure raisonnable (ou, peut-être, prévisible) n’aurait pu empêcher l’accident ou l’incident de se produire ou en réduire la gravité. La preuve de diligence raisonnable est très difficile à établir et repose généralement sur l’existence et l’utilisation rigoureuse (et très bien documentée) de règlements, de programmes, de méthodes, de formations, de mécanismes de surveillance et de mesures. Si un maillon de la chaîne est faible, un individu (ou un employeur) ne pourra vraisemblablement pas prouver qu’il a fait preuve de diligence raisonnable dans les circonstances.

Pour déterminer s’il y a eu diligence raisonnable, il faut se poser les questions suivantes :

  • Une personne raisonnable peut-elle raisonnablement anticiper un incident ou un accident?
  • Quelles sont la nature et la gravité des préjudices potentiels pour les travailleuses et travailleurs?
  • Existe-t-il une possibilité de prévenir ou d’atténuer l’incident ou l’accident?
  • Qui est responsable de prévenir l’incident ou l’accident?

Si, en répondant à ces questions, on conclut qu’il était impossible de prévenir l’événement, on établit la base d’une défense fondée sur la diligence raisonnable. Bien entendu, il faut posséder des documents qui prouvent les efforts déployés. Voici des exemples de preuve d’exercice d’une diligence raisonnable :

  • Existence d’une politique avec preuve de révision régulière et de mise en œuvre
  • Instructions relatives au travail et preuve qu’elles ont été communiquées
  • Registre de formation
  • Procès-verbaux ou notes (officielles ou non officielles) des réunions
  • Inspection et observation sur le lieu de travail
  • Rapports d’incident ou d’accident et preuve des mesures correctives apportées
  • Journaux et registres d’inspection
  • Registres d’entretien et de réparation
  • Exercices d’urgence
  • Mesures d’application des méthodes et des pratiques locales

Normalement, tous les éléments de preuve ci-dessus sont nécessaires pour démontrer qu’on a fait preuve de diligence raisonnable. Il faut démontrer que l’on a exercé la diligence requise et raisonnable pour éviter l’événement. La diligence raisonnable peut se résumer à une simple question : qu’est-ce qu’une personne raisonnable aurait pu faire de plus, dans les circonstances? Si vraiment rien de plus n’aurait pu être fait, on pourra probablement prouver qu’on a exercé une diligence raisonnable, mais il faudra que les registres et les dossiers en fassent foi. Répétons-le, il est difficile de prouver que l’on a exercé une diligence raisonnable : on trouvera presque toujours qu’on aurait pu faire mieux.

Imaginons que la diligence raisonnable est une simple équation où :

  • x est ce qu’une personne raisonnable aurait fait dans des circonstances données;
  • y est ce qui a été fait dans ces circonstances.

Si x moins y est supérieur ou égal à 0, une personne accusée sera probablement condamnée. Et comme à l’école, un travail non remis vaut 0. Bref, une absence de preuve mène à une condamnation.

Voici la reproduction (autorisée) de la liste de vérification de la diligence raisonnable publiée sur le site du Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST). Aucune liste de vérification n’est parfaite, mais celle du CCHST donne une idée de la grande quantité de preuves qu’il faut rassembler pour étayer une défense fondée sur la diligence raisonnable.

Dispositions relatives aux devoirs généraux

Quelques mots sur l’alinéa 25 (2) h) de la LSST, qui traite des devoirs généraux de l’employeur. Personne ne peut tout prévoir. C’est pourquoi les lois sur la santé et la sécurité au travail comprennent des dispositions relatives aux devoirs généraux. Ces dispositions établissent les devoirs de celles et ceux qui dirigent les travaux, c’est-à-dire des employeurs et des superviseuses et superviseurs.

Devoirs de l’employeur

Alinéa 25 (2) h) – « l’employeur [...] prend toutes les précautions raisonnables dans les circonstances pour assurer la protection du travailleur ».

Devoirs de la superviseuse ou du superviseur

Alinéa 27 (2) c) – « le superviseur [...] prend toutes les précautions raisonnables dans les circonstances pour assurer la protection du travailleur ».

En l’absence d’une loi ou d’un règlement spécifique, ces dispositions s’appliquent. Pensons par exemple à l’ergonomie des postes de travail. En matière d’ergonomie, il existe évidemment des pratiques exemplaires et des lignes directrices (y compris la norme de la CSA dont il était question plus haut), mais aucune disposition de la Loi sur la santé et la sécurité au travail ne vise l’ergonomie proprement dite. Cela ne dispense toutefois pas les employeurs ou les superviseuses et superviseurs de s’assurer que les postes de travail sont adéquats. Ils demeurent tenus de protéger les travailleuses et travailleurs, mais ils peuvent définir eux-mêmes les mesures à prendre pour le faire correctement « dans les circonstances ».

Vous trouvez peut-être que cette disposition manque de précision ou de clarté. Ce n’est pas faux. Mais il est impossible pour une instance gouvernementale de prévoir tous les cas de figure et d’établir des exigences légales pour tous les types entreprises de toute la province. C’est pourquoi il incombe aux employeurs et aux superviseuses et superviseurs d’identifier les dangers, d’apprécier le risque, de maîtriser le risque et de s’assurer que les mesures sont efficaces.

Besoin d’aide?

Face à un contexte pour lequel il n’existe ni loi, ni guide, ni pratique déterminée, il faut se demander :

  1. Si les choses tournaient mal, quelles seraient les conséquences (p. ex. blessure ou maladie)?
  2. Est-ce que cet acte est passible d’une sanction (p. ex. ordonnance, poursuite ou amende)?
  3. Qu’est-ce qui pourrait être fait de plus pour prévenir une blessure ou une maladie?
  4. Comment déterminer les pratiques acceptables (règlement, norme, lignes directrices, points de référence, documentation, etc.)?

Il peut être difficile, particulièrement en recherche de pointe, de connaître toutes les ramifications d’une activité. Il est donc encore plus essentiel de faire un travail rigoureux d’identification des dangers, d’appréciation du risque et de mise en œuvre de mesures de maîtrise du risque. On n’est jamais trop prudents, surtout quand prudence accrue est synonyme de sécurité accrue. Il y a des ressources pour vous aider!

Module 2.6 – Responsabilité criminelle

La responsabilité criminelle a une portée plus grande que la responsabilité réglementaire. Les poursuites au criminel peuvent même s’ajouter aux poursuites liées aux infractions réglementaires.

Cas de la mine Westray (comté de Pictou, en Nouvelle-Écosse) – En 1992, une explosion est survenue à la mine, qui était alors en exploitation depuis à peine huit mois, entraînant le décès de 26 travailleurs. The Fift Estate et The Journal (CBC) ont coproduit The Last Shift, un documentaire sur la tragédie (en anglais seulement, contenu sensible et langage explicite).

À la suite de la tragédie, une enquête provinciale menée par le juge Peter Richard concluait que les événements de Westray étaient « le résultat d’une mosaïque complexe d’actes, d’omissions, d’erreurs, d’incompétence, d’apathie, de cynisme, de stupidité et de négligence » (The Westray Story: A Predictable Path to Disaster [traduction]). Toutes les tentatives de poursuite à l’égard de la compagnie et de ses têtes dirigeantes pour les actes qui ont mené à la mort des 26 mineurs ont échoué[1].

[1] Congrès du travail du Canada – Pleurons les morts : luttons pour les vivants.

D’importantes pressions de syndicats et d’activistes en faveur de la sécurité ont suivi et, après plusieurs projets de loi d’initiative parlementaire non aboutis, une cinquième tentative, en 2003, a mené à la modification du Code criminel du Canada, afin d’encadrer la responsabilité pénale des organisations.

Ces modifications sont inscrites dans l’article 217.1, qui stipule :

Obligation de la personne qui supervise un travail

217.1 Il incombe à quiconque dirige l’accomplissement d’un travail ou l’exécution d’une tâche ou est habilité à le faire de prendre les mesures voulues pour éviter qu’il n’en résulte de blessure corporelle pour autrui.

Cela signifie que les responsables, y compris les superviseuses et superviseurs, sont passibles de poursuites au criminel si leur conduite s’écarte de manière marquée de la conduite qu’aurait une personne raisonnable dans les mêmes circonstances. Il faut alors démontrer que la personne accusée a fait preuve d’une insouciance grave à l’endroit de la vie ou de la sécurité d’autrui. Ces dispositions visent à punir les personnes condamnées qui ont agi (ou n’ont pas agi) dans le cadre de leurs responsabilités en milieu de travail. Les chefs d’accusation sont du même ordre que pour les autres infractions graves. Les services de police sont les principaux intervenants, mais les organismes de réglementation (p. ex. le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences) s’impliquent généralement beaucoup dans les procédures.

Exemples d’application du Code criminel

Jusqu’à maintenant, peu d’entreprises ont fait l’objet de poursuites au criminel. On peut trouver de brefs résumés de cas où le Code criminel a été appliqué sur le site Web du CCHST. L’un des plus marquants est probablement l’événement survenu à Toronto le 24 décembre 2009. Six personnes travaillaient, au 13e étage d’un édifice, sur un échafaudage volant qui s’est effondré. Quatre ont fait une chute mortelle. Un travailleur a survécu à la chute, mais a subi des blessures graves qui ont changé sa vie à jamais. Le sixième travailleur, qui portait un harnais, a réussi à s’accrocher au câble de sécurité et a pu être amené sur un balcon voisin. À la suite des événements, la compagnie responsable (Metron Construction inc.) et son propriétaire ont fait face à des poursuites au criminel. L’entreprise a plaidé coupable à des accusations réduites; les accusations criminelles ont toutefois été maintenues à l’égard de celle-ci (condamnée à 750 000 $ d’amende) et du superviseur du projet (condamné à trois ans et demi de prison).

Un autre événement, qui rejoint davantage notre réalité (même s’il s’est produit aux États-Unis), est survenu à l’UCLA (en anglais seulement, contenu sensible et langage explicite).

Dans ce cas, le chercheur principal a été poursuivi sous quatre chefs d’accusation au criminel pour infraction au code du travail de la Californie. S’il avait été condamné, il aurait été passible d’une peine de prison de quatre ans et demi. Toutefois, une entente a été conclue et la poursuite a été abandonnée en 2018, après qu’un ensemble de conditions ont été respectées. Un cas similaire, y compris des accusations portées contre le chercheur principal, pourrait se produire au Canada. Par conséquent, il est crucial que les superviseuses et superviseurs identifient les dangers et analysent et évaluent les risques et mettent en œuvre des mesures de maîtrise du risque pour tous les projets.

Peines

Les personnes trouvées coupables d’actes criminels sont condamnées à des amendes, à une peine d’emprisonnement ou aux deux. La détermination des peines pour les infractions au Code criminel et pour les infractions réglementaires se fait selon des systèmes distincts et des échelles différentes. Bien que, dans le cas des poursuites qui ont trait à la santé et à la sécurité au travail, les accusations soient réduites à l’infraction la plus grave, les peines sont proportionnelles à la gravité des accusations. Les lignes directrices sur la détermination des peines offrent une ligne de conduite, mais il n’y a aucun maximum pour les amendes, et les personnes accusées font face à un risque réel d’être condamnées à une peine d’emprisonnement.