Entités juridiques concernées

Grande-Bretagne et « Province de Québec »

Statut juridique

Abrogée

Situation contextuelle

La Proclamation royale de 1763 délimitait les frontières de la nouvelle colonie, la « Province of Quebec » (province de Québec): les anciennes frontières du Canada français s'étendaient de l'Acadie jusqu'aux Grands Lacs et la vallée de l'Ohio; la Proclamation prévoyait la convocation de l'Assemblée législative pour l'adoption des lois.

Intérêt linguistique

Les lois de la Grande-Bretagne s'appliquaient tant dans les affaires civiles que criminelles, en autant que le permettaient les lois britanniques, c'est-à-dire en anglais. Néanmoins, les Canadiens conservaient la liberté de pratiquer leur religion catholique, autrement dit en français.

Dispositions linguistiques

Aucune

Texte complet

Proclamation royale de 1763

Texte dans lequel sont définies les limites géographiques de la Province de Québec et l'organisation des pouvoirs qui lui sont dévolus.

Ce texte est rédigé selon la graphie de l'époque.

PROCLAMATION PAR LE ROI GEORGE R.

Attendu que Nous avons accordé Notre considération royale aux riches et considérables, acquisitions d'Amérique assurées à Notre couronne par le dernier traité de paix définitif, conclu à Paris, le 10 février dernier et désirant faire bénéficier avec tout l'empressement désirable Nos sujets bien-aimés, aussi bien ceux du royaume que ceux de Nos colonies en Amérique, des grands profits et avantages qu'ils peuvent en retirer pour le commerce, les manufactures et la navigation, Nous avons cru opportun, de l'avis de Notre Conseil privé, de publier Notre présente proclamation royale pour annoncer et déclarer à tous Nos sujets bien-aimés que Nous avions, de l'avis de Notredit Conseil privé, par Nos lettres patentes sous le grand sceau de la Grande-Bretagne, établi dans les contrées et les îles qui Nous ont été cédées et assurées par ledit traité, quatre gouvernements séparés et distincts, savoir: ceux de Québec, de la Floride Orientale, de la Floride Occidentale et de Grenade, dont les bornes sont données ci-après.

ARTICLE 1er

-Le gouvernement de Québec, sera borné sur la côte du Labrador par la rivière Saint-Jean et de là par une ligne s'étendant de la source de cette rivière à travers le lac Saint-Jean jusqu'à l'extrémité sud du lac Nipissin, traversant de ce dernier endroit, le fleuve Saint-Laurent et le lac Champlain par 45 degrés de latitude nord, pour longer les terres hautes qui séparent les rivières qui se déversent dans ledit fleuve Saint-Laurent de celles qui se jettent dans la mer, s'étendre ensuite le long de la côte nord de la baie de Chaleurs et de la côte du golfe Saint-Laurent jusqu'au cap Rozière, puis traverser de là l'embouchure du fleuve Saint-Laurent en passant par l'extrémité ouest de l'île d'Anticosti et se terminer ensuite à ladite rivière Saint-Jean.

ARTICLE 2

-Le gouvernement de la Floride Orientale sera borné à l'ouest par le golfe du Mexique et la rivière Apalachicola; au nord, par une ligne s'étendant de l'endroit de cette rivière ou se rencontrent les rivières Chatahouchee et Flint, jusqu'à la source de la rivière Sainte-Marie, et par le cours de cette dernière jusqu'à l'océan; au sud et à l'est, par le golfe de la Floride et l'océan Atlantique, y compris toutes les îles situées en deça de six lieues de la côte.

ARTICLE 3

-Le gouvernement de la Floride Occidentale sera borné au sud par le golfe du Mexique y compris toutes les îles situées en deçà de six lieues de la côte, entre la rivière Apalachicola et le lac Pontchartrain; à l'ouest, par le lac Pontchartrain, le lac Mauripas et la rivière Mississipi; au nord, par une ligne s'étendant vers l'est, d'un endroit de la rivière Mississipi situe à 31 degrés de latitude nord, jusqu'à la rivière Apalachicola, ou Chatahouchee et à l'est de ladite rivière.

ARTICLE 4

-Le gouvernement de Grenade comprenant l'île de ce nom avec les Grenadines et les îles Dominique, Saint-Vincent et Tabago. Et afin d'étendre jusqu'à la côte du Labrador et aux îles adjacentes, la pêche ouverte et libre accordée à Nos sujets et d'en favoriser le développement dans ces endroits, Nous avons cru opportun, de l'avis de Notre Conseil privé, de placer toute cette côte depuis la rivière Saint-Jean jusqu'au détroit d'Hudson ainsi que les îles d'Anticosti et Madeleine et toutes les autres petites îles disséminées le long de ladite côte, sous le contrôle et l'inspection de notre gouverneur de Terre-Neuve.

Nous avons aussi, de l'avis de Notre Conseil privé, cru opportun d'annexer l'île Saint-Jean et l'île du Cap-Breton ou île Royale, ainsi que les îles de moindre dimension situées dans leurs environs, au gouvernement de la Nouvelle-Écosse.

Nous avons également, de l'avis de Notre Conseil privé, annexé à Notre province de Georgie, toutes les terres situées entre les rivières Alatamaha et Sainte-Marie.

Et attendu qu'il est à propos de faire connaître à Nos sujets Notre sollicitude paternelle à l'égard des libertés et des propriétés de ceux qui habitent comme de ceux qui habiteront ces nouveaux gouvernements, afin que des établissements s'y forment rapidement, Nous avons cru opportun de publier et de déclarer par Notre présente proclamation, que nous avons par les lettres patentes revêtues de notre grand sceau de la Grande-Bretagne, en vertu desquelles lesdits gouvernements sont Constitués, donné le pouvoir et l'autorité aux gouverneurs de nos colonies respectives, d'ordonner et de convoquer, de l'avis et du consentement de notre Conseil dans leurs gouvernements respectifs, des que l'état et les conditions des colonies le permettront, des assemblées générales de la manière prescrite et suivie dans les colonies et les provinces d'Amérique placées sous notre gouvernement immédiat; que nous avons aussi accordé auxdits gouverneurs le pouvoir de faire, avec le consentement de nosdits conseils et des représentants du peuple qui devront être convoqués tel que susmentionné, de décréter et de sanctionner des lois, des statuts et des ordonnances pour assurer la paix publique, le bon ordre ainsi que le bon gouvernement desdites colonies, de leurs populations et de leurs habitants, conformément autant que possible aux lois d'Angleterre et aux règlements et restrictions en usage dans les autres colonies. Dans l'intervalle et jusqu'à ce que ces assemblées puissent être convoquées, tous ceux qui habitent ou qui iront habiter nosdites colonies peuvent se confier en Notre protection royale et compter Nos efforts pour leur assurer les bienfaits des lois de Notre royaume d'Angleterre; à cette fin Nous avons donné aux gouverneurs de Nos colonies sous Notre grand sceau, le pouvoir de créer et d'établir, de l'avis de Nosdits conseils, des tribunaux civils et des cours de justice publique dans Nosdites colonies pour entendre et juger toutes les causes aussi bien criminelles que civiles, suivant la loi et l'équité, conformément autant que possible aux lois anglaises; cependant, toute personne ayant raison de croire qu'elle a été lésée en matière civile par suite des jugements rendus par lesdites cours, aura la liberté d'en appeler à Nous siégeant en Notre Conseil privé conformément aux délais et aux restrictions prescrits en pareil cas.

Nous avons également jugé opportun, de l'avis de Notredit Conseil privé, d'accorder aux gouverneurs et aux conseils de Nos trois nouvelles colonies sur le continent, le pouvoir et l'autorité de s'entendre et de conclure des arrangements avec les habitants de Nosdites nouvelles colonies et tous ceux qui iront s'y établir, au sujet des terres des habitations et de toute propriété dont Nous pourrons hériter et qu'il est ou sera en Notre pouvoir de disposer, et de leur en faire la concession, conformément aux termes, aux redevances, aux corvées et aux tributs modérés établis et requis dans les autres colonies, ainsi qu'aux autres conditions qu'il Nous paraîtra nécessaire et expédient d'imposer pour l'avantage des acquéreurs et le progrès et l'établissement de Nosdites colonies.

Attendu que Nous désirons reconnaître et louer en toute occasion, la brave conduite des officiers et des soldats de Nos armées et leur décerner des récompenses, Nous enjoignons aux gouverneurs de Nosdites colonies et à tous les gouverneurs de nos diverses provinces sur le continent de l'Amérique du Nord et Nous leur accordons le pouvoir de concéder gratuitement aux officiers réformés qui ont servi dans l'Amérique du Nord pendant la dernière guerre et aux soldats qui ont été ou seront licencies en Amérique, lesquels résident actuellement dans ce pays et qui en feront personnellement la demande, les quantités de terre ci-après pour lesquelles une redevance égale à celle payée pour des terres situées dans la même province ne sera exigible qu'a l'expiration de dix années; lesquelles terres seront en outre sujettes aux mêmes conditions de culture et d'amélioration que les autres dans la même province:

A tous ceux qui ont obtenu le grade d'officier supérieur, 5000 acres.

A chaque capitaine, 3000 acres.

A chaque officier subalterne ou d'état major, 2000 acres.

A chaque sous-officier, 200 acres.

A chaque soldat, 50 acres.

Nous enjoignons aux gouverneurs et aux commandants en chef de toutes Nos colonies sur le continent de l'Amérique du Nord, et Nous les autorisons de concéder aux mêmes conditions la même quantité de terre aux officiers réformés de Notre marine, d'un rang équivalent, qui ont servi sur Nos vaisseaux de guerre dans l'Amérique du Nord lors de la réduction de Louisbourg et de Québec, pendant la dernière guerre, et qui s'adresseront personnellement à Nos gouverneurs pour obtenir des concessions.

Attendu qu'il est juste, raisonnable et essentiel pour Notre intérêt et la sécurité de Nos colonies de prendre des mesures pour assurer aux nations ou tribus sauvages qui sont en relations avec Nous et qui vivent sous Notre protection, la possession entière et paisible des parties de Nos possessions et territoires qui ont été ni concédées ni achetées et ont été réservées pour ces tribus ou quelques-unes d'entre elles comme territoires de chasse, Nous déclarons par conséquent de l'avis de Notre Conseil privé, que c'est Notre volonté et Notre plaisir et nous enjoignons à tout gouverneur et à tout commandant en chef de Nos colonies de Québec, de la Floride Orientale et de la Floride Occidentale, de n'accorder sous aucun prétexte des permis d'arpentage ni aucun titre de propriété sur les terres situées au-delà des limites de leur gouvernement respectif, conformément à la délimitation contenue dans leur commission. Nous enjoignons pour la même raison à tout gouverneur et à tout commandant en chef de toutes Nos autres colonies ou de Nos autres plantations en Amérique, de n'accorder présentement et jusqu'à ce que Nous ayons fait connaître Nos intentions futures, aucun permis d'arpentage ni aucun titre de propriété sur les terres situées au-delà de la tête ou source de toutes les rivières qui vont de l'ouest et du nord-ouest se jeter dans l'océan Atlantique ni sur celles qui ont été ni cédées ni achetées par Nous, tel que susmentionné, et ont été réservées pour les tribus sauvages susdites ou quelques-unes d'entre elles.

Nous déclarons de plus que c'est Notre plaisir royal ainsi que Notre volonté de réserver pour le présent, sous Notre souveraineté, Notre protection et Notre autorité, pour l'usage desdits sauvages, toutes les terres et tous les territoires non compris dans les limites de Nos trois gouvernements ni dans les limites du territoire concédé à la Compagnie de la baie d'Hudson, ainsi que toutes les terres et tous les territoires situés à l'ouest des sources des rivières qui de l'ouest et du nord-ouest vont se jeter dans la mer.

Nous défendons aussi strictement par la présente à tous Nos sujets, sous peine de s'attirer Notre déplaisir, d'acheter ou posséder aucune terre ci-dessus réservée, ou d'y former aucun établissement, sans avoir au préalable obtenu Notre permission spéciale et une licence à ce sujet.

Et Nous enjoignons et ordonnons strictement à tous ceux qui en connaissance de cause ou par inadvertance, se sont établis sur des terres situées dans les limites des contrées décrites ci-dessus ou sur toute autre terre qui n'ayant pas été cédées ou achetées par Nous se trouve également réservée pour lesdits sauvages, de quitter immédiatement leurs établissements.

Attendu qu'il s'est commis des fraudes et des abus dans les achats de terres des sauvages au préjudice de Nos intérêts et au grand mécontentement de ces derniers, et afin d'empêcher qu'il ne se commette de telles irrégularités à l'avenir et de convaincre les sauvages de Notre esprit de justice et de Notre résolution bien arrêtée de faire disparaître tout sujet de mécontentement, Nous déclarons de l'avis de Notre Conseil privé, qu'il est strictement défendu à qui que ce soit d'acheter des sauvages, des terres qui leur sont réservées dans les parties de Nos colonies, ou Nous avons cru à propos de permettre des établissements; cependant si quelques-uns des sauvages, un jour ou l'autre, devenaient enclins à se départir desdites terres, elles ne pourront être achetées que pour Nous, en Notre nom, à une réunion publique ou à une assemblée des sauvages qui devra être convoquée à cette fin par le gouverneur ou le commandant en chef de la colonie, dans laquelle elles se trouvent situées; en outre, si ces terres sont situées dans les limites de territoires administrés par leurs propriétaires, elles ne seront alors achetées que pour l'usage et au nom des propriétaires, conformément aux directions et aux instructions que Nous croirons ou qu'ils croiront à propos de donner à ce sujet; de plus Nous déclarons et signifions de l'avis de Notre Conseil privé que Nous accordons à tous Nos sujets le privilège de commerce ouvert et libre, à condition que tous ceux qui auront l'intention de commercer avec lesdits sauvages se munissent de licence à cette fin, du gouverneur ou du commandant en chef de celle de Nos colonies dans laquelle ils résident, et qu'ils fournissent des garanties d'observer les règlements que Nous croirons en tout temps, à propos d'imposer Nous mêmes ou par l'intermédiaire de Nos commissaires nommés à cette fin, en vue d'assurer le progrès dudit commerce.

Nous autorisons par la présente les gouverneurs et les commandants en chef de toutes Nos colonies respectivement, aussi bien ceux qui relèvent de Notre autorité immédiate que ceux qui relèvent de l'autorité et de la direction des propriétaires, d'accorder ces licences gratuitement sans omettre d'y insérer une condition par laquelle toute licence sera déclarée nulle et la protection qu'elle confèrera enlevée, si le porteur refuse ou néglige d'observer les règlements que Nous croirons à propos de prescrire. Et de plus Nous ordonnons et enjoignons à tous les officiers militaires et à ceux chargés de l'administration et de la direction des affaires des sauvages, dans les limites des territoires réservés à l'usage desdits sauvages, de saisir et d'arrêter tous ceux sur qui pèsera une accusation de trahison, de non-révélation d'attentat, de meurtre, de félonie ou de délits de tout genre et qui, pour échapper aux atteintes de la justice, auront cherche un refuge dans lesdits territoires, et de les renvoyer sous bonne escorte dans la colonie où le crime dont ils seront accusés aura été commis et pour lequel ils devront subir leur procès.

Donnée à Notre Cour, à Saint-James, le septième jour d'octobre mil sept cent soixante trois, la troisième année de Notre Règne.

DIEU SAUVE LE ROI

Texte de la proclamation reproduit sur le site web des Affaires indiennes et du Nord Canada