Le Canada de 1867 ne ressemblait pas au Canada d'aujourd'hui. C'était un petit pays de 3,4 millions (en 1867, mais 3,7 millions en 1871) d'habitants comprenant quatre provinces : l’Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick.

Canada politique de 1867

Malgré ses vastes étendues non exploitées, le Canada n'était plus un « archipel de colonies britanniques », il commençait à être un pays, mais celui-ci n'avait encore d'existence que dans l'Est, puisque 76 % des Canadiens vivaient en Ontario et au Québec, les autres dans les Maritimes.

La population canadienne se répartissait comme suit (selon les statistiques de 1871) :

ProvincePopulationPourcentage
Ontario1,620,85146.4%
Québec1,191,51634.1%
Nouveau-Brunswick285,5948.1%
Nouvelle-Écosse387,80011.1%
Total3,485,761100.0%
map of Canada in 1867
©Jacques Leclerc 2018

Évidemment, le Canada de 1867 ne ressemblait pas au Canada d'aujourd'hui, car il était beaucoup plus petit. Cependant, sur le territoire de ce qui est le Canada d'aujourd'hui, il existait d'autre colonies britanniques: à l'est Terre-Neuve (146 536) et l'Île-du-Prince-Édouard (94 021), à l'extrémité ouest la Colombie-Britannique (10 586) et, entre cette dernière et l'Ontario, l'immense territoire de la Terre de Rupert (à population indéterminée), qui couvrait ce qui correspond aujourd'hui au Manitoba, à la Saskatchewan, à l'Alberta, au Yukon, aux Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, ainsi qu'une partie de l'Ontario et du Québec.

map of canada in 1867
©Jacques Leclerc 2018

Terminologie : confédération ou fédération?

Depuis 1867, on a souvent appelé le Canada, dans sa dénomination longue, la Confédération canadienne. Or, officiellement, le Canada de 1867 avait plutôt choisi l'appellation de Dominion du Canada en parlant de l'« Union fédérale », puis l'expression Dominion du Canada a fini par tomber en désuétude. Par la suite, le mot Confédération s'est perpétué jusqu'à nos jours pour désigner le pays. Il n'en demeure pas moins que ce terme de Confédération n'a aucune valeur officielle ou juridique : on ne le retrouve pas dans la Constitution canadienne de 1867. Au 19e siècle, les termes de fédération et de confédération étaient employés comme synonymes.

Pour simplifier, on peut dire que le Dominion du Canada fut formé le 1 er juillet 1867 avec la confédération de quatre provinces (Ontario, Québec, Nouvelle-Écosse et Nouveau-Brunswick) de l'Amérique du Nord britannique pour former une Union fédérale. Le Canada de 1867 demeurait toujours une colonie britannique et le demeurera jusqu'en 1931 lors de la proclamation du Statut de Westminster (Londres).

En réalité, le Canada actuel est une fédération, non une confédération. Ce dernier terme désigne aujourd'hui une union de plusieurs États indépendants ayant délégué par traité certaines compétences gouvernementales à un gouvernement central; on parle ainsi de la Confédération helvétique (les cantons ayant conservé leur souveraineté politique) devenue depuis le 18 avril 1999 la Confédération suisse. Quant au terme de fédération, il renvoie à une union de plusieurs États associés formant un seul État fédéral tout en conservant deux niveaux de gouvernement. Il existe de nombreux exemples de fédération dans le monde : les États-Unis, le Mexique, le Brésil, l'Argentine, l'Allemagne, la Belgique, la Russie, l'Afrique du Sud, etc.

C'est aussi à partir de la Confédération que les habitants anglophones du Canada commencèrent à s'identifier par le mot anglais de Canadians, reléguant par le fait même le mot français Canadiens (qui désignait les Canadiens de langue française) en désuétude. De façon systématique, les Canadiens de langue française s'appelèrent Canadiens français (French Canadians) par opposition à Canadiens anglais (English Canadians).

Pour plus d’informations, veuillez consulter la section Fondements de ce site

Loi constitutionnelle de 1867 et la question linguistique

La Constitution de 1867 portait le nom officiel d’Acte de l'Amérique du Nord britannique. Elle avait été adoptée le 29 mars 1967 par le parlement de Westminster sous le nom de British North America Act 1867, 30-31 Victoria, c. 3 (U.K.). La Constitution est entrée en vigueur à midi, le 1er juillet 1867, en donnant au Canada le nom de Dominion du Canada. L'Acte de l'Amérique du Nord britannique fut rebaptisé en 1982 et devint la Loi constitutionnelle de 1867. Fait à noter, le Canada ne possède pas une constitution, c'est-à-dire une seule constitution, mais bien une trentaine de textes constitutionnels (pour les détails, voir la section Cadre législatif de ce site). Le texte constitutionnel de 1867 demeure aujourd'hui encore en vigueur et fait partie intégrante de ce qu'on appelle la Constitution canadienne. Le 1er juillet 1867, le Globe de Toronto saluait ainsi la naissance d'un nouveau Canada, blanc, anglais et protestant :

John Alexender Macdonald, George-Etienne Cartier, Geroge Brown

Nous saluons la naissance d'une nouvelle nation. Une Amérique anglaise unie, forte de quatre millions d'habitants, prend place aujourd'hui parmi les grandes nations du monde.

De son côté, John Alexander Macdonald, le premier premier ministre du Canada, exprima ainsi sa notion d'égalité entre les deux langues admises au sein de la Confédération :

Je suis en désaccord avec le point de vue exprimé en certains milieux selon lequel il faut tenter de quelque façon que ce soit d'opprimer une langue ou de la placer dans une position inférieure par rapport à une autre; toute tentative en ce sens serait vouée à l'échec, et même si c'était possible, cela serait insensé et mesquin.

Pour George-Étienne Cartier, la Constitution de 1867 devait accorder au Québec l'autonomie nécessaire pour protéger sa langue, sa tradition de droit civil et sa religion; pour George Brown, 1867 marqua la fin de la domination française au Canada et le début d'une nouvelle nationalité britannique; il avait déclaré lors de la conférence de Québec en 1864 : « Is it not wonderful? French canadianism entirely extinguished! » Autrement dit: « Est-ce que ce n'est pas merveilleux? Le canadianisme français est entièrement éteint! » Mais rien ne s'est passé comme prévu, la réalité souvent incontournable étant parfois différente des intentions.

La Loi constitutionnelle de 1867, toujours en vigueur, ne contient qu'un seul article à caractère linguistique : l'article 133 stipule que tout député a le droit d'utiliser l'anglais ou le français au Parlement du Canada et à la Législature de la province de Québec; de plus, dans toute plaidoirie devant les tribunaux fédéraux du Canada et devant tous les tribunaux du Québec, tout citoyen peut faire usage de l'une ou l'autre de ces deux langues. Voici comment est libellé l'article 133 :

Article 133

  1. Dans les chambres du Parlement du Canada et les chambres de la Législature de Québec, l'usage de la langue française ou de la langue anglaise, dans les débats, sera facultatif; mais, dans la rédaction des registres, procès-verbaux et journaux respectifs de ces chambres, l'usage de ces deux langues sera obligatoire. En outre, dans toute plaidoirie ou pièce de procédure devant les tribunaux du Canada établis sous l'autorité de la présente loi, ou émanant de ces tribunaux, et devant les tribunaux de Québec, ou émanant de ces derniers, il pourra être fait usage de l'une ou l'autre de ces langues.
  2. Les lois du Parlement du Canada et de la Législature de Québec devront être imprimées et publiées dans ces deux langues.

Il faut bien comprendre que cet article 133 n'établissait pas le bilinguisme officiel au Canada dans son entier; il rendait simplement possible l'usage de l'anglais et du français au Parlement fédéral, à la Législature du Québec, ainsi que dans les tribunaux de la province de Québec et dans ceux (à créer) du gouvernement fédéral. On peut même affirmer que le français et l'anglais ne furent pas reconnus comme langues officielles.

Au 19e siècle, la notion d'un pays bilingue en est à peine à ses premiers balbutiements et va à l'encontre de l'idée qu'on se faisait d'un pays fondé sur la nation, celle-ci étant perçue comme ayant une seule langue et une seule « race » (terme très en vogue à l'époque). Les Anglo-Canadiens d'alors ne pouvaient même pas concevoir qu'une nation puisse avoir deux langues officielles, même si une telle nation existait à ce moment-là, par exemple en Suisse. C'est pourquoi il ne pouvait être question de bilinguisme institutionnel, encore moins de bilinguisme officiel. Bien que la reconnaissance des deux langues aient été limitée à deux domaines précis (la législation et les tribunaux fédéraux), le français et l'anglais recevaient néanmoins une réelle consécration juridique, sans pour autant consacrer ni le français ni l'anglais comme langues officielles. En revanche, la Constitution de 1867 rendait le Québec, seul parmi les provinces d'origine, obligatoirement bilingue, sans que les deux langues ne reçoivent le statut de langues officielles.

En réalité, la Loi constitutionnelle de 1867 n'engageait au bilinguisme ni le gouvernement fédéral ni l'administration publique relevant de cette juridiction, ni le Québec. Il s'agissait simplement de ce que le juriste franco-ontarien, Gérald-Armand Beaudoin (1929-2008), a appelé « un embryon de bilinguisme officiel », car l'article 133 n'a jamais eu pour objectif d'imposer un cadre institutionnel à la langue. Bref, on dirait aujourd'hui que c'était une loi mal ficelée, mais le bilinguisme institutionnel était une denrée rare en 1867, pour ne pas dire inexistante. Seule la Suisse fédérale pratiquait un tel système, mais il est improbable que les rédacteurs de la Constitution, essentiellement John A. Macdonald, ait consulté la Constitution helvétique de l'époque (alors rédigée en allemand et en français). Ils ont dû, tout au plus, s'en tenir aux lois existantes dans les colonies britanniques où aucune n'était bilingue. Il ne faut donc pas se surprendre de cet « embryon de bilinguisme ». Ce n'était pas dans les moeurs de l'époque; Certains y ont vu, au contraire, une grande tolérance!

Il existait pourtant des pratiques de bilinguisme administratif, judiciaire, scolaire, etc., dans certains pays (Suisse, Belgique, Finlande, Italie, etc.), mais fort peu de dispositions relatives au bilinguisme enchâssées dans un texte juridique, c'est-à-dire une constitution ou une loi. Rappelons aussi que les négociateurs de la Constitution, ceux qu'on appelle les « Pères de la Confédération », avaient devant les yeux le seul modèle de la mère partie : le Royaume-Uni qui avait évincé sur son territoire toutes les langues minoritaires (gallois, écossais, irlandais, mannois) au profit de la langue unificatrice, l'anglais. Dans le cas du Canada, l'embryon de bilinguisme législatif et judiciaire était probablement perçu comme avancée presque révolutionnaire

How an Englishman develops an idea, for instance, bears little resemblance to how a Frenchman would do the same. The mentality, the way of thinking, the method is different. We can grasp the idea of a law in one language and express it but poorly in another. Unless the two tongues share a same spirit and the two peoples an identical intellectual process, any attempt at translation will be vain unless one first completely assimilates the legal notion to be transplanted, which in itself alters the essence, introduces new viewpoints, reorders both the details and the whole according to a new economy, and in the end presents a new conception of the law, with all the attendant changes to make it fit another manner of thinking, doing, and speaking. Any other method of borrowing shall assuredly lead to deplorable consequences.

In the 1980s, the federal government would find solutions to these problems by calling on two drafting committees, one English and the other French, and a third to reconcile the two versions.

Expansion territoriale (1867-1949) et ses conséquences linguistiques

Les quatre provinces fondatrices — Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick, Ontario et Québec — ont formé le noyau du Canada fédéral en 1867. Puis, en quelques années, le premier ministre de l'époque, sir John Alexander Macdonald, a acheté la Terre de Rupert et négocié l'entrée de trois autres provinces (Manitoba en 1870; Colombie-Britannique en 1871 et Île-du-Prince-Édouard en 1873), en plus de créer deux territoires (Territoires du Nord-Ouest en 1870 et Yukon en 1898). Au tournant du siècle (1905), l'Alberta et la Saskatchewan ont été créées à même les Territoires du Nord-Ouest. Les habitants de Terre-Neuve ont eu la possibilité de faire partie du Canada en 1869 et en 1896, mais ils y ont toujours renoncé jusqu'en 1949, alors qu'ils ont adhéré à la Confédération qui, rappelons-le, a toujours été une fédération.

map showing the date of admission to the federation for each province

Cette expansion territoriale au Canada n'est pas étrangère à la crainte qu'inspiraient les visées expansionnistes des États-Unis. L'année de la Confédération (1867), les États-Unis venaient d'acheter l'Alaska de la Russie pour 7,2 millions de dollars, ce qui pouvait donner envie aux Américains de relier le Nord et le Sud par la Colombie-Britannique. Le chemin de fer américain de l'Union Pacific Railway était achevé en 1864, ce qui faisait croître le peuplement du nord-ouest des États-Unis. Des marchands et des colons américains commençaient à entrevoir des possibilités d'expansion vers les vastes plaines canadiennes presque inhabitées. Depuis 1863, neuf nouveaux États avaient été créés, dont plusieurs en bordure de la frontière canadienne: le Minnesota en 1858, le Wisconsin en 1863, le Montana et l'État de Washington en 1889, l'Idaho en 1890. Or, tous ces événements rendaient les Américains bien suspects aux yeux des Canadiens qui craignaient une nouvelle montée de l'expansionnisme dans l'Ouest. Bref, il fallait prendre de vitesse les Américains et ouvrir de nouvelles terres à la colonisation.

Par ailleurs, l'expansion territoriale du Canada de 1867 a eu des conséquences linguistiques importantes. Elle a eu pour effet d'assurer l'extension de la langue anglaise sur le continent et de réduire, voire supprimer certains droits aux francophones, lesquels étaient pourtant reconnus dans la Constitution du Canada. Une chose est certaine, si la politique fédérale en matière linguistique était la non-intervention dans la mesure où elle ne s'en tenait qu'aux seules prescriptions constitutionnelles, certaines politiques provinciales tenteront, au contraire, de réduire ces droits et, dans bien des cas, réussiront pour un temps à les supprimer carrément. Bref, de la non-intervention, ces politiques passèrent à l'interdiction, sauf au Parlement canadien.

Rappelons qu'en 1900 la population du territoire canadien actuel s'élevait à 5,4 millions d'habitants. Durant les années qui suivirent, le Canada a vu les plus forts taux d'immigration du siècle. Par exemple, entre 1896 et 1914, quelque 1,1 million d'Européens sont venus s'installer au Canada et les deux tiers provenaient de la Grande-Bretagne. Plus de la moitié de ces immigrants (618 000) ont décidé d'habiter l'Ouest, alors que 172 000 immigrés américains s'y sont ajoutés. Un tel flot d'immigrants a modifié profondément la composition ethnique de la population canadienne. Les descendants des Britanniques et des Français ainsi que des autochtones ont vu leur proportion diminuer.

Aussi, il n'est pas surprenant que, à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, les Canadiens anglais de cette époque se montrèrent fort préoccupés d'assimiler les nouveaux groupes ethniques qui arrivaient en grand nombre au pays et qu'en conséquence ils refusèrent au Canadiens français, perçus comme d'autres non-anglophones, le droit à la dissidence scolaire. Autrement dit, les Canadiens français — comme les Amérindiens — étaient placés sur le même pied que les nombreux immigrants. Le Canada demeurait un pays anglais dans lequel on tolérait le bilinguisme au Parlement fédéral ainsi qu'au Québec, mais pas dans les autres provinces. En 1911, quelque 22 % de la population canadienne était née à l'étranger avec le résultat que la population canadienne cessera d'être massivement d'origine britannique pour devenir multiethnique. Les mentalités ne changeront que beaucoup plus tard.

Droits linguistiques reconnus par la Province

Les Franco-Manitobains constituaient à ce moment-là une portion importante de la population, soit plus de 40 %. Le recensement de 1871 dénombrait 5 700 Métis francophones, 4 000 Métis anglophones et 1 600 représentants de population blanche (Écossais et Canadiens français). Les francophones étaient donc en droit de s'attendre à une certaine protection linguistique; ils ont obtenu les mêmes droits linguistiques et confessionnels que les anglophones tant et aussi longtemps qu'ils ont formé une importante minorité.

L'article 22 de La loi de 1870 sur le Manitoba, une loi constitutionnelle, garantissait un système d'écoles publiques confessionnelles subventionnées par la Province :

Article 22

La Législature du Manitoba a, dans les limites et pour les besoins de la province, compétence exclusive pour légiférer en matière d'éducation, compte tenu des dispositions suivantes :

  1. Elle ne peut, par une disposition législative adoptée en cette matière, porter atteinte aux droits ou privilèges appartenant de droit ou selon la coutume dans la province, lors de l'adhésion de celle-ci à l'Union, à une catégorie de personnes relativement aux écoles confessionnelles.
  2. Est susceptible d'appel devant le gouverneur général en conseil toute mesure ou décision de la législature ou d'une autorité provinciale touchant les droits ou privilèges, en matière d'éducation, de la minorité protestante ou catholique romaine des sujets de la Reine.

Législation scolaire

  1. Faute par la province d'édicter les lois que le gouverneur général en conseil juge nécessaires à l'application du présent article, ou faute par l'autorité provinciale compétente de donner la suite voulue à la décision qu'il prend sur un appel interjeté au titre de cet article, le Parlement peut, pour autant que les circonstances de l'espèce l'exigent, prendre par voie législative toute mesure de redressement qui s'impose à cet égard.

De plus, la School Act du Manitoba de 1871 (ou Loi scolaire) prévoyait que le Board of Education devait fournir aux écoles de langue française tout le matériel didactique nécessaire (livres, cartes, etc.) en français. En 1878, la section catholique du Board of Education adopta des règlements au sujet de la langue d'enseignement dans les écoles catholiques du Manitoba; on précisait que la langue parlée par la majorité des contribuables d'un arrondissement sera celle enseignée à l'école.

L'article 2 de la Loi relative aux municipalités (Act concerning Municipalities) de 1873 stipulait que toute demande visant la création d'une municipalité devait être publiée en français et en anglais dans la Gazette du Manitoba. Une autre loi de 1875 relative aux municipalités de comté du Manitoba (Act respecting County Municipalities) prévoyait la publication des règlements et avis municipaux dans les deux langues. La loi électorale du Manitoba de 1875 prévoyait l'usage de l'anglais et du français dans les instructions aux électeurs, la proclamation des élections et la préparation des listes d'électeurs. Enfin, la Loi relative aux jurés et aux jurys (Act respecting Jurors and Juries) de 1876 précisait que, lors d'un procès en français, le tribunal pouvait ordonner la constitution d'un jury composé d'un nombre égal de jurés francophones et anglophones. En 1879, le caucus du Parti anglais suggéra d'abolir l'impression en français des documents officiels; la question fut débattue et adoptée en Chambre, mais le lieutenant-gouverneur, Joseph Cauchon, refusa de signer le projet de loi adopté par l'Assemblée. Ces mesures de protection ne devaient pas durer et, après la mort de Riel, les Franco-Manitobains commencèrent à subir des politiques d'interdiction linguistique. Il faut dire que la venue de nombreux colons anglophones de l'Ontario avait fait basculer le poids démographique en faveur de la majorité anglaise.

Yukon (1898)

Le territoire du Yukon fut séparé des Territoires du Nord-Ouest en 1898 en réponse à l'énorme augmentation de la population dans la région pendant la ruée vers l'or du Klondike. Toutefois, une grande partie de cette population quitta le territoire lorsque l'or s'est épuisé.

Le nom de Yukon est d'origine amérindienne et a d'abord été appliqué à la rivière. Le terme de Yukon provient de Yu-kun-ah, qui signifie « grande rivière ». Il a été noté pour la première fois en 1846 par John Bell (1799-1868), un employé de la Compagnie de la Baie d'Hudson, qui aurait désigné le cours d'eau par ce qu'il croyait être son nom amérindien. En 1886, Dawson City qui, était le site d'un camp de pêche indien, se transforma quatre ans plus tard dans le plus vaste centre urbain du Canada à l'ouest de Winnipeg, avec une population atteignant 40 000 personnes, constituée en grande partie de prospecteurs itinérants.

L'article 110 de la Loi sur les Territoires du Nord-Ouest demeura peu appliqué au Yukon. Les francophones perdirent en conséquence la plupart de leurs droits linguistiques.

Map of Canada in 1898

Politiques linguistiques des provinces fondatrices

Protéger les droits de la minorité linguistique n'était pas une question importante  au moment de la Confédération en 1867. Au mieux, les minorités étaient laissées à elles-mêmes; au pis, elles étaient interdites ou assimilées. Le monde occidental offrait peu d’exemples autres que la non-intervention ou l'assimilation. Pour les politiciens de l’Empire britannique et du Canada, avoir une vision plus généreuse aurait été, en effet, étonnant. Les Britanniques de cette époque n’étaient pas plus visionnaires que les autres peuples. Ils conservaient une vision colonialiste du monde, comme les Français, les Allemands, etc.