Le diplômé de l’Université d’Ottawa et chroniqueur santé du Globe and Mail a discuté de la pandémie et de la réponse du Canada dans le cadre de la Série de conférences Alex-Trebek
La pandémie de COVID-19 est le sujet d’une vie pour le journaliste santé de renom André Picard (B.Admin. 1986), qui a expliqué à un auditoire virtuel de la Série de conférences Alex-Trebek que la culture canadienne a possiblement été le facteur le plus déterminant de notre réaction à cette crise.
Le journaliste était invité en tant que diplômé à cet événement animé par Colleen Flood pour parler des aspects sociaux de la pandémie. Cette discussion d’une heure a porté sur les réussites et les échecs du Canada face au virus depuis son émergence à Wuhan, en Chine, il y a environ un an.
D’après André Picard, lui et d’autres journalistes sont en quelque sorte des « traducteurs » au Globe and Mail, journal qui analyse et résume pour le public ce que disent les scientifiques et les autorités sanitaires – un genre de « journalisme d’intérêt public ».
« C’est le sujet de toute une vie. Nous sommes les seules personnes sur Terre qui bénéficient de la situation, étrangement. Le pays traverse une période bien particulière, et j’y joue un certain rôle », a expliqué le diplômé, selon qui le gouvernement gère la crise d’une manière typiquement canadienne.
« Cela reflète le tempérament canadien. La culture compte pour beaucoup, et culturellement parlant, le Canada est très prudent et préfère ne pas se précipiter. Notre pays, comme la plupart des autres, n’a pas pris cette crise au sérieux dès le début. Ce qui est arrivé en Italie aurait dû sonner l’alarme. Or, nous nous sommes permis de rester longtemps dans l’inaction. »
La pandémie a mis au jour des problèmes de longue date que nous ne devons plus ignorer : l’itinérance, le traitement effroyable de nos personnes âgées, et le manque de soutien pour les travailleuses et travailleurs racisés dans des emplois mal payés.
« Notre pire échec? Les soins aux personnes âgées. Nous devons les repenser complètement », a déploré André Picard, en faisant allusion aux 12 000 personnes âgées tuées par la COVID-19. Les précautions exemplaires prises dans les hôpitaux tranchaient radicalement avec les mesures en place dans les foyers de soins de longue durée, où les personnes âgées, le personnel et les soignantes et soignants ont dû se débrouiller sans ressources adéquates. André Picard croit que cela a aussi mis en évidence les conséquences sexsospécifiques de la pandémie, les femmes constituant la plus grande partie de l’effectif dans les lieux de travail les plus touchés.
« D’un autre côté, la pandémie nous offre l’occasion de remédier à des situations révélées d’une manière horrible. Les soins de santé devraient désormais figurer au centre de toutes les politiques », a soutenu le journaliste, dont le prochain livre traitera de l’état des soins de longue durée au pays.
Au moment où la population canadienne se prépare à se confiner à Noël, André Picard pense que les autorités sanitaires doivent redoubler de créativité et d’ingéniosité pour faire comprendre aux gens les sacrifices qu’impliquera ce confinement. La Colombie-Britannique est un bel exemple d’administration qui laisse les responsables de la santé publique – et non les personnalités politiques – orienter le dialogue.
« Il faut que la santé publique lance un message de sympathie et d’empathie, un peu comme en temps de guerre. Ce sera une période de sacrifices churchillienne jusqu’à ce qu’on voie la lumière au bout du tunnel », a affirmé le journaliste. « Sautons les fêtes juste cette fois-ci; ça en vaudra la peine. Nous devons tout donner. L’heure n’est pas à la mollesse, à la politesse canadienne. »
À l’approche du vaccin, André Picard a relevé plusieurs effets positifs de cette expérience, comme la transformation des milieux de travail et le réaménagement des villes. Mais ce sont les technologies numériques en santé qui lui donnent le plus d’espoir.
« L’une des meilleures choses issues de la pandémie est l’avancement des technologies numériques de la santé. On a fait l’équivalent de décennies de progrès en quelques mois », a-t-il souligné. « Cela me préoccupe depuis des dizaines d’années. Pourquoi ne pas reproduire nos réussites avec plus d’ardeur? Pourquoi ne pas faire fond sur les réussites en santé au Canada? »
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