Divulgâcheur : le « franglais », ce n’est pas si mauvais

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Infographique démontrant certains chiffres tirés de la recherche

Dans les communautés bilingues de partout dans le monde, les phrases «mélangées» sont choses communes. La région de la capitale nationale n’y fait certainement pas exception, comme on peut le constater dans cet énoncé enregistré chez nous: «Il y avait une band, là, qui jouait de la musique steady, puis il y avait des games de ball, puis, euh, ils vendaient de l’ice cream, puis il y avait une grosse beach, le monde se baignaient.»

Presque toutes les personnes bilingues mélangent leurs langues, mais personne n’en est fier: même ceux qui le font eux-mêmes. La plupart des gens concernés croient que cela témoigne d’une piètre maîtrise de l’une des langues, ou même des deux. Ils considèrent que cela fragilise la langue, et pourrait mener à la création d’une nouvelle langue hybride, comme le «franglais» ou le «spanglish». Ces idées largement répandues ont la vie dure, particulièrement lorsqu’il est question de l’influence de l’anglais sur le français canadien. Mais y a-t-il vraiment matière à s’inquiéter?

La science dit non!

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Shana Poplack est une déboulonneuse de mythes linguistiques. Cette sociolinguiste de renommée internationale, professeure éminente de l’Université d’Ottawa et titulaire d’une Chaire de recherche du Canada, a passé 35 ans à tester scientifiquement ces croyances répandues. Les fruits de ces décennies de recherche viennent d’être regroupés dans un tout nouveau livre : Borrowing: Loanwords in the Speech Community and in the Grammar.

Dans son laboratoire de sociolinguistique, la chercheuse et son équipe analysent la langue parlée par les gens ordinaires lors de leurs interactions quotidiennes, et examinent les conversations bilingues tenues dans plus d’une douzaine de paires de langues différentes. Ils s’intéressent spécialement aux langues officielles du Canada, combinées entre elles et avec d’autres langues (comme l’anglais avec l’ukrainien ou le tamoul, ou encore le français avec le vietnamien ou l’arabe).

En effet, les recherches de la professeure Poplack ont renversé certaines des présomptions les plus communes sur le mélange des langues. Par exemple, on croit généralement que le français canadien est truffé d’anglicismes, et qu’une fois que ces anglicismes s’introduisent dans la langue, ils y restent. Mais ces deux présomptions sont fausses.

Voici d’autres découvertes surprenantes :

  • Intégrer des mots étrangers ne fragilise pas ni ne détruit l’intégrité de la langue réceptrice.
  • Le mélange de langues n’est pas aléatoire ni désordonné.
  • Le mélange de langues n’est pas le signe d’une maîtrise insuffisante de l’une ou l’autre des langues.
  • Le contact avec l’anglais n’a pas radicalement modifié le français canadien.
  • Les gens n’ont pas recours à une autre langue par paresse ou parce qu’ils n’arrivent pas à trouver le bon mot dans leur langue maternelle.

La plupart des résultats de recherche de Shana Poplack vont à l’encontre des idées reçues. Il faut savoir qu’ils sont appuyés par l’analyse quantitative systématique de plus de 43 000 phrases mélangées, faisant partie de centaines d’heures d’enregistrement de conversations avec près de 500 locuteurs bilingues.

Infographique démontrant certains chiffres tirés de la recherche

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