L’Institut de l’héritage des entreprises familiales de Telfer : pour préparer la relève à reprendre le flambeau

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Logan Roy, le patriarche dans la série Succession, a tort de ne pas y croire : faute de bien préparer la nouvelle génération à reprendre le flambeau, les entreprises familiales risquent de s’écrouler.


Déjà complexe, l’organisation de la relève d’une entreprise familiale l’est encore plus dans le contexte pandémique. Plus de 60 % des entreprises familiales changeront de mains au cours des dix prochaines années. Or, jusqu’à aujourd’hui, il existait peu de ressources pour les guider dans cette difficile transition. L’École de gestion Telfer de l’Université d’Ottawa a mis sur pied l’Institut de l’héritage des entreprises familiales, un laboratoire d’idées d’un nouveau genre au service de ces acteurs essentiels de l’économie canadienne.

Doté de la mission d’outiller la relève des entreprises familiales, l’Institut s’emploiera à inculquer aux futurs leaders des connaissances et des pratiques fondamentales. Des programmes sur mesure, comme le certificat en propriété responsable, aideront ces personnes dans leur développement personnel et professionnel, afin qu’elles puissent réussir dans le ou les rôles qu’elles seront appelées à jouer dans l’entreprise familiale : personne de confiance, propriétaire responsable, futur membre de la direction ou encore gardienne ou gardien du patrimoine familial.

Premier directeur de l’Institut, le professeur Peter Jaskiewicz a coécrit le récent livre Enabling Next Generation Legacies: 35 Questions that Next Generation Members in Enterprising Families Ask avec Sabine Rau, professeure invitée à Telfer. L’ouvrage souligne l’importance pour l’économie de maintenir les entreprises familiales aux mains de la famille : « La reprise économique mondiale dépendra de manière disproportionnée de la capacité des entreprises familiales à gérer efficacement les transitions avec les nouvelles générations. Celles-ci englobent 60 % de la main-d’œuvre mondiale, représentent les deux tiers des entreprises dans le monde et sont responsables de plus de 66 % du PIB mondial. »

Le professeur Jaskiewicz nous a parlé du rôle que l’Institut jouera auprès des entreprises familiales canadiennes.

Quelle place l’Institut de l’héritage des entreprises familiales occupera-t-il dans le monde des affaires au Canada?
Nous aspirons à en faire le meilleur institut de recherche au monde pour les entreprises familiales, ainsi qu’à transmettre notre savoir aux membres de la nouvelle génération. En raison du caractère personnel de leurs besoins, de nombreuses entreprises familiales hésitent à demander de l’aide. Or, leurs problèmes n’en sont pas moins importants. Nous voulons leur tendre la main.

Contrairement aux grandes sociétés, qui peuvent compter sur leurs lobbys, les entreprises familiales ont peu d’appuis. Elles se sentent parfois abandonnées, alors qu’elles forment les deux tiers de notre économie. Si on leur enseigne les pratiques exemplaires et qu’on les aide à préparer la relève, on fait plus que soutenir des familles ou des entreprises : c’est toute la société qui en bénéficie.

Quels avantages y a-t-il à former les prochains leaders d’entreprises familiales?
Dans le cadre de nos recherches, nous déterminons les pratiques exemplaires. Par exemple, les parents qui savent que leurs enfants sont compétents et souhaitent prendre la relève sont plus motivés à faire de grands efforts pour que leur entreprise soit parfaitement prête au moment de la transition. Alors qu’elles devraient normalement économiser en prévision de leur retraite, ces personnes investissent de grosses sommes pour stimuler leurs affaires, soucieuses de transmettre à la nouvelle génération une entreprise florissante. Ce bond en avant donne un élan à la relève pour propulser l’entreprise vers de nouveaux sommets.

Au contraire, des parents qui doutent des capacités et de la volonté de leurs enfants investiront beaucoup moins dans l’entreprise avant leur retraite, et la relève aura de grandes difficultés à reprendre les affaires. Il arrive que les membres de la nouvelle génération, ne sentant aucun soutien de la part des parents, poursuivent une autre carrière. Dans d’autres cas, les enfants sont compétents et motivés, mais les parents ne s’en rendent pas compte. La communication intergénérationnelle est essentielle : si les parents n’y croient pas, ils investiront moins, au risque de laisser en héritage une entreprise boiteuse. En somme, la réussite de la transition passe par l’élaboration de plans de développement en concertation avec la relève, la communication suivie et la confiance mutuelle. Diffuser les meilleures pratiques et former les leaders de demain, c’est la raison d’être de l’Institut.

La série télé Succession offre un point de vue de l’intérieur de la relève d’une entreprise familiale. Mais dans la réalité, est-ce aussi brutal?
J’ai rencontré des familles qui se conduisent de la sorte, où la passation du pouvoir des parents aux enfants prend des airs de tragédie grecque. Nous essayons de les sortir de cette spirale infernale. La clé réside habituellement dans la formation de la nouvelle génération, notamment en matière de gestion des conflits et des relations difficiles, pour redresser la situation et amorcer enfin un dialogue franc sur le rôle des enfants dans l’entreprise familiale.

À l’Institut, nous incluons également les parents dans le processus. Il arrive, par exemple, que des enfants éprouvent une certaine culpabilité d’hériter d’une telle richesse sans avoir rien fait pour la mériter.  Or, il ne viendrait pas à l’esprit des parents d’aborder ces questions, en général. Par conséquent, les membres de la nouvelle génération se sentent souvent incompris, ignorés, voire exclus. Nous demandons quels sont les problèmes et nous leur expliquons qu’ils doivent être pris au sérieux, que les deux générations doivent communiquer pour résoudre leurs différends. Car il y a souvent entre elles un fossé qu’il faut combler pour rétablir une relation de confiance.

Quelles sont les conséquences de la COVID-19 sur la relève des entreprises familiales?
La COVID-19 a accéléré la transition. Bon nombre de chefs d’entreprise d’un certain âge qui travaillent dans des milieux où les contacts sont inévitables souhaitent prendre leur retraite plus tôt que prévu, afin de se protéger contre le virus. La nouvelle génération, quant à elle, maîtrise les nouvelles technologies, un atout devenu essentiel depuis le début de la pandémie, et qui le restera. Cette situation a modifié l’équilibre des pouvoirs et rapproché les familles. Dans bien des cas, les parents vieillissants doivent bien reconnaître qu’ils ont trop longtemps négligé de moderniser leur entreprise et d’en organiser la relève. En outre, de nombreuses familles ont resserré leurs liens, mues par la nécessité de se soutenir mutuellement. Si la crise a eu l’effet inverse sur certaines familles, la majorité en sont aujourd’hui renforcées.

Qu’est-ce qui motive votre intérêt pour la relève des entreprises familiales?
Ma famille était propriétaire d’une entreprise internationale. Mais après le décès soudain de mon oncle, plusieurs clans se sont entre-déchirés. En fin de compte, l’entreprise a été liquidée. Parce que personne n’était là pour les guider, les membres de ma famille se sont retrouvés sans emploi et ont coupé les ponts. Je voulais comprendre ce qu’il s’était passé, ce qui m’a mené au doctorat spécialisé en entreprises familiales. Depuis quelques décennies, de nombreuses recherches universitaires s’intéressent aux difficultés particulières des entreprises familiales. Il est temps que notre société et notre économie le reconnaissent, et qu’on s’attelle à définir les pratiques exemplaires et les solutions pour maintenir les entreprises familiales en santé, durablement.

L’Institut de l’héritage des entreprises familiales compte plusieurs collaboratrices et collaborateurs aux côtés du professeur Peter Jaskiewicz : Evelyn Micelotta, boursière professorale Desmarais et professeure agrégée en entreprises familiales à l’École de gestion Telfer, Ramzi Fathallah, professeur adjoint en entrepreneuriat et entreprises familiales à l’École de gestion Telfer, Sabine Rau, professeure invitée à Telfer, et James Combs, professeur invité à l’Université d’Ottawa.


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