« Notre étude suggère que le Polyommatus icarus (P. icarus) pourrait se répandre puisqu’il préfère les zones urbaines », avance Stephanie Rivest, étudiante au doctorat à l’Université d’Ottawa et auteure principale de l’article « Anthropogenic disturbance promotes the abundance of a newly introduced butterfly, the European common blue (Polyommatus icarus; Lepidoptera: Lycaenidae), in Canada », paru dans la revue Canadian Journal of Zoology.
« Sa population peut atteindre des densités extrêmement élevées, et ses chenilles se développent sur une plante qu’on trouve partout au Canada. »
Un nouveau chez-soi
Espèce commune en Europe, le P. icarus a été découvert sur notre continent en 2005 près de Montréal, au Québec. Son apparition chez nous a donné à l’équipe de Stephanie Rivest une rare occasion d’étudier un insecte exotique aux premiers stades de sa colonisation et de surveiller de plus près la multiplication d’une espèce.
« Les espèces animales et végétales s’implantent aujourd’hui plus rapidement hors de leur domaine vital partout dans le monde, mais seulement quelques-unes deviennent envahissantes, c’est-à-dire répandues, abondantes et nuisibles à la biocénose », précise la chercheuse. « Voilà pourquoi il est si important d’étudier les espèces qui apparaissent afin de mieux comprendre et prévoir lesquelles ont un potentiel envahissant. »
Prédire la multiplication
« Nous avons découvert que le P. icarus est plus présent en zone urbaine et là où pousse la plante hôte privilégiée par ses chenilles, le lotier corniculé (Lotus corniculatus) », renchérit Stephanie Rivest. « Cette plante a été introduite en Amérique du Nord au milieu des années 1700, et on la trouve maintenant dans toutes les provinces canadiennes. »
« Notre étude révèle également que les populations de P. icarus peuvent atteindre des densités extrêmement élevées par rapport aux papillons indigènes, mais qu’elles rayonnent assez peu, les spécimens adultes ne volant pas très bien », explique la doctorante.
Sans être un as du vol, le papillon pourrait tout de même se répandre au Canada.
« Notre étude initiale du P. icarus nous amènera plus tard à modéliser l’aire de répartition prévue de l’espèce pour cerner d’autres facteurs potentiellement importants », ajoute Heather Kharouba, professeure agrégée au Département de biologie de l’Université d’Ottawa et responsable du laboratoire de l’établissement mis à contribution.
Une population grandissante
Quand l’étude s’est amorcée en 2017, on n’observait l’azuré commun (Polyommatus icarus) que dans le sud-ouest du Québec. C’est là que Stephanie Rivest et ses collègues ont mené leurs enquêtes de terrain. L’équipe a alors colligé de l’information sur les communautés de papillons et leur habitat à plusieurs endroits, et a plus tard mesuré la capacité de vol du P. icarus adulte. Pour ce faire, elle a marqué le plus grand nombre possible de spécimens de P. icarus à l’aide d’un marqueur permanent.
« Nous avons tracé une marque distincte sur l’aile de chacun des spécimens étudiés, ce qui nous permettra de mesurer la distance parcourue par ceux que nous récupérerons plus tard », relate Stephanie Rivest. « Nous avons capturé et marqué un nombre incroyable de spécimens, soit précisément 4629! »
L’azuré commun rayonne maintenant à l’extérieur du Québec.
« Depuis le début de notre étude, en 2017, nous relevons une augmentation du nombre d’observations de P. icarus dans les sites Web scientifiques grand public, comme eButterfly et iNaturalist », mentionne Stephanie Rivest. « Voilà qui porte à croire que l’aire de répartition du P. icarus s’est élargie, car on en répertorie maintenant des spécimens à Toronto, à plus de 400 km de notre région d’étude. »
« Nous encourageons le public à contribuer au recensement du P. icarus en communiquant sur le Web leurs observations de cette espèce de papillon facile à identifier. »
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Justine Boutet
Agente des relations médias
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