Les impacts du changement climatique sont bien documentés. Récemment, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a publié un rapport spécial avertissant que le réchauffement de la planète de plus 1,5 degré mènera à un changement irréversible du système climatique et entraînera une intensification des sécheresses, des inondations, des vagues de chaleur et d'autres catastrophes liées au climat.
La COP26 est considérée comme la dernière occasion d'éviter ce scénario dramatique. Jusqu'à présent, des engagements ambitieux ont été pris. Plus de 100 pays, dont le Canada, se sont engagés à mettre fin à la déforestation avant 2030; plus de 40 pays ont accepté d'éliminer progressivement le charbon de leurs activités industrielles. Mais, dans chacun de ces accords internationaux, certains acteurs importants ont refusé d'y adhérer.
On pourrait facilement blâmer la résistance de participer à ces ententes de ces pays comme étant le résultat du capitalisme et de l'égoïsme, mais la vérité c’est que les répercussions de ces mesures bien intentionnées sur les secteurs social, économique ou même environnemental sont peu visibles. Par exemple, les plans « d'économie verte » créeront de nouveaux emplois, mais davantage dans les pays développés que dans les pays en voie de développement. Par ailleurs, les hausses des prix de l'énergie peuvent compromettre la sécurité alimentaire, l'accès à l'eau et la santé des personnes démunies.
La réalisation des objectifs de développement durable (ODD) dans les pays les plus vulnérables est en jeu. Ces ODD sont le modèle à suivre pour parvenir à un meilleur avenir, plus durable, pour tous. Au cœur des ODD se trouve la reconnaissance du fait que l'action dans un domaine aura une incidence sur les résultats dans d'autres, et que le développement doit équilibrer la durabilité sociale, économique et environnementale. L'approche holistique est à favoriser pour parvenir à un développement durable pour tous.
Ceci ne s’agit pas d’une prise de position contre les engagements pour atteindre zéro émission nette. Nous constatons déjà les effets négatifs du changement climatique et nous ne voulons certainement pas subir le scénario du réchauffement encore plus sévère. Il s'agit simplement d'une mise en garde contre les turbulences sociales et économiques qui surviendront lors de la transition vers des émissions nettes nulles. Il est important de penser à l'avenir et de mettre en place des mécanismes pour anticiper et s'adapter à ces turbulences.
La décarbonatation n'est rentable qu’à long terme dans un monde caractérisé par le court-termisme. Il pourrait y avoir (ironiquement) un besoin de financement pour aider à s'adapter à une économie décarbonée et maintenir les réalisations actuelles vers les ODD, similaire au financement qui existe déjà pour s'adapter aux impacts du changement climatique.
En conclusion, oui, nous devons passer rapidement à une économie décarbonée. Cependant, comme nous vivons dans un monde complexe où tous les secteurs (alimentation, eau, énergie, environnement, sécurité) sont étroitement liés, nous devons nous attendre à ce que la transition soit difficile, du moins pour une partie de l'humanité. À court terme, certains pays verront une régression de leurs indicateurs relatifs aux ODD et certains des gouvernements qui ont pris des engagements à Glasgow pourraient ne pas survivre aux prochaines élections. Reconnaître ces difficultés potentielles et faire preuve d'une forte volonté de les aborder conduira à de meilleurs engagements mondiaux.
Prof. Seidou a gagné plusieurs prix pour son excellente recherche en gestion des ressources en eau et adaptation au changement climatique.