« Les sanctions économiques, qui sont devenues un outil de plus en plus privilégié des relations internationales au cours des dernières décennies, sont aussi de plus en plus controversées », observe M. Martin. C’est notamment le cas des sanctions qui ne sont pas autorisées par le Conseil de sécurité des Nations Unies (sanctions dites « autonomes » ou « unilatérales »), et qui ont un impact grave et généralisé sur la population de l’État visé, ou qui visent des États tiers ou d’autres entités « innocentes » pour les dissuader d’interagir avec l’État visé (sanctions dites « secondaires »).
À l’instar d’autres États occidentaux et d’organisations régionales comme l’Union européenne, le Canada a élaboré de solides régimes de sanctions au cours de cette période, pour mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies (ONU), mais aussi pour s’engager dans une action autonome en réponse aux violations des droits de l’homme, à la corruption flagrante et à la prolifération nucléaire.
L’auteur constate que « Bien qu’il y ait eu récemment des discussions au Canada sur le bien-fondé et la pertinence de telles sanctions, ou même sur la nécessité pour le Canada d’être plus agressif dans son utilisation des sanctions, il y a eu relativement peu d’analyses sur les questions de droit international soulevées par le recours croissant aux sanctions économiques. Ce rapport s’efforce de fournir cette analyse. »
Il présente une analyse détaillée des régimes de droit international qui régissent les diverses formes de sanctions économiques, et évalue les possibles objections juridiques aux différents types de sanctions économiques. Puis, en conclusion, le rapport relève également une incohérence troublante entre l’objectif déclaré du Canada pour nombre de ces sanctions – c’est-à-dire de contraindre d’autres États à remédier aux violations généralisées des droits de l’homme sur leur territoire – et la possibilité que ces sanctions aggravent les privations et les souffrances des personnes que la politique vise à aider.
En outre, ces sanctions sont plus largement présentées comme un instrument efficace pour faire respecter et appliquer l’état de droit; pourtant, on hésite à remettre en question la légalité de certains aspects de ces régimes de sanctions économiques, et le fait qu’ils puissent miner l’état de droit international.
Comme M. Martin le mentionne dans ce rapport : « La possibilité qu’une politique [de sanctions économiques] puisse être contestée comme violant et sapant le régime juridique même qu’elle est censée défendre et promouvoir, crée évidemment des bases d’allégations d’irrationalité et d’hypocrisie – et en effet la politique canadienne de sanctions a été contestée aux Nations Unies sur cette base dans le passé. »
Le rapport conclut qu’il reste un certain nombre de questions non réglées concernant la légalité des sanctions économiques autonomes, et suggère d’user de prudence dans l’examen de la portée et de l’application de la politique canadienne en matière de sanctions économiques. Il préconise en outre que les décisions à cet égard s’inspirent non seulement des questions spécifiques de droit international que soulèvent les sanctions autonomes, mais aussi des principes plus généraux de la primauté du droit et des valeurs éthiques que le Canada défend depuis longtemps, tant au pays qu’à l’étranger.