Le Groupe de travail canadien sur la transition équitable peut offrir des leçons pour une reprise verte

Par Brendan Frank

Associé de recherche principale, ISSP

Brendan Frank
Énergie Positive
FSS
Après avoir prêté serment, la ministre des Finances Chrystia Freeland a déclaré que « tous les Canadiens comprennent que le redémarrage de notre économie doit être vert ». Bien que Freeland ait raison de dire que les Canadiens sont plus favorables qu'improbables à cette approche, l'appui est loin d'être unanime.

Un sondage récent révèle des poches de forte opposition à la lutte contre le changement climatique pendant cette récession. C'est à prévoir; le plus grand obstacle qui empêche les Canadiens d'appuyer une action plus énergique contre les changements climatiques est l'inquiétude concernant l'économie. Compte tenu de la nature inégale et incertaine de la reprise économique - en particulier dans les provinces productrices d'énergie frappées par le doublé de la pandémie et la faiblesse des prix des produits de base - ces inquiétudes persisteront probablement pendant un certain temps.

Alors que nous attendons avec impatience le discours du Trône, les idées ne manquent pas pour aider à la reconstruction. Des groupes de travaildes commissionsdes conseils et des coalitions font leur apparition dans tout le pays, certains ayant pour mandat explicite d'accélérer une reprise verte. Mais beaucoup n'ont pas de mandat gouvernemental et de représentation pancanadienne ou se consacrent à la promotion d'un ensemble restreint d'intérêts. La question reste ouverte de savoir s'ils peuvent effectivement associer une action climatique accélérée et une revitalisation économique et dépolariser la conversation pour construire une vision plus inclusive de notre économie.

La recherche du projet Énergie positive de l’Université d’Ottawa, prévue plus tard ce mois-ci, peut offrir des leçons, alors que les dirigeants se concentrent sur des soutiens à plus long terme pour les travailleurs et les industries remodelés par COVID-19. Nous avons examiné le Groupe de travail sur la transition équitable pour les travailleurs et les collectivités de l'énergie au charbon au Canada, un organisme mandaté par le gouvernement fédéral qui a consulté les collectivités touchées par l'élimination nationale de l'électricité produite au charbon. Nous avons recherché des aspects des activités du groupe de travail qui pourraient aider à dépolariser le dialogue canadien sur le climat et l’énergie. En cours de route, nous avons découvert certains principes fondamentaux qui peuvent aider à garantir aux travailleurs, aux collectivités et aux entreprises que les efforts de relèvement peuvent être à la fois écologiques et inclusifs.

Tout d'abord, rencontrez directement les personnes que le groupe de travail essaie d'aider. Toute initiative visant à influencer l'élaboration des politiques - commandée ou non - devrait inclure des consultations dans le cadre de son mandat. La transition loin de l'énergie au charbon est un choix actif sur le type d'énergie que nous voulons alimenter notre société. Accélérer la transition vers une énergie à faibles émissions implique des choix similaires. Pour mettre en œuvre des changements éclairés et durables, les communautés doivent percevoir que les processus décisionnels sont équitables. Si vous ne faites pas partie du processus, vous êtes moins susceptible de croire que le processus est légitime. Si vous ne pensez pas que le processus est légitime, vous êtes beaucoup moins susceptible de faire confiance aux résultats.

Les consultations peuvent offrir une perspective sur les implications humaines des décisions politiques. Les résultats qui semblent optimaux sur le papier peuvent entrer en conflit avec les valeurs communautaires, les objectifs de développement économique ou même les objectifs climatiques. Ce n'est pas un problème technocratique. Des vies et des moyens de subsistance sont en jeu; ils ne peuvent pas être facilement réduits en nombres. Les groupes de travail devraient essayer d'entendre directement les gens et les communautés et utiliser leurs expériences pour créer une voie à suivre.

Deuxièmement, il est essentiel que tout groupe de travail soit considéré comme un intermédiaire honnête, libre de tout préjugé ou d'influence partisane. Cela devrait être un point d’accent et est particulièrement important dans les régions qui ne partagent pas les opinions politiques du gouvernement en place. L’enquête menée par Énergie positive a montré que lorsque les opinions sur les questions climatiques et énergétiques sont polarisées, c’est le plus souvent selon des principes partisans. Favoriser des conversations non partisanes peut améliorer la perception de la légitimité.

Troisièmement, le groupe effectuant la consultation doit être représentatif démographiquement des personnes et des communautés qu'il rencontre. Compte tenu des cultures régionales distinctes du Canada, ceux qui créent des groupes de travail, des groupes d’étude et des commissions devraient se demander si ces organes ressemblent aux groupes au nom desquels ils font des recommandations et prennent des décisions. Cela inclut la représentation géographique. Tout groupe cherchant à faire des recommandations au niveau fédéral devrait avoir une représentation de tous les secteurs et de partout au Canada, y compris les communautés autochtones. La collaboration avec les provinces est particulièrement importante. L'électricité et les ressources naturelles relèvent en grande partie de la compétence provinciale. Alors que nous repensons les industries et les emplois qui peuvent prospérer dans un monde limité en carbone, ces relations prendront de l'importance.

Les travaux du Groupe de travail sur la transition équitable peuvent offrir des leçons précieuses aux décideurs qui tentent de relancer l’économie canadienne. Les discussions autour de la reprise à long terme, en particulier dans les secteurs à forte intensité de carbone, pourraient se révéler source de division ou de polarisation. Lorsqu'il s'agit de favoriser un climat de coopération dans un contexte potentiellement polarisé, les décideurs devraient emprunter ce qui a fonctionné pour le groupe de travail sur la transition juste. Les recommandations élaborées en silo sont moins susceptibles d'être unificatrices et moins susceptibles de survivre sur le long terme. Solliciter une large contribution de groupes régionaux, politiques et démographiques diversifiés aidera à produire des résultats plus solides et politiquement durables.