Stratégie canadienne pour l’hydrogène : apprendre avec des transitions énergétiques passées

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Énergie Positive

Par Peter Tertzakian

Membre du conseil consultatif d'Énergie positive, Directeur adjoint, ARC Energy Research Institute

peter tertzakian
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Le 19 janvier 2021, l'ISSP a organisé un panel intitulé Hydrogen and Canada’s Energy Future: Opportunities, Challenges, Next Steps. Ce blog est une adaptation des propos de l’auteur.

Les mots d’ouverture de la nouvelle stratégie canadienne pour l’hydrogène déclarent: « Depuis plus d’un siècle, les esprits les plus brillants de notre pays travaillent sur la technologie pour transformer la promesse invisible de l’hydrogène en solutions tangibles. » C'est avec un mélange d'optimisme et de pragmatisme que je dis que la promesse de l'hydrogène peut enfin se réaliser.

Il est facile d’être enthousiasmé par les transitions énergétiques perturbatrices, mais elles ne fonctionnent pas toujours. J'ai étudié ces transitions, dont beaucoup offrent des leçons sur la manière de replacer la promesse de l'hydrogène dans son contexte. Par exemple, dans mon musée de l’énergie, j’ai un numéro de 1971 de Sciences populaires présentant une voiture électrique «révolutionnaire» qui ressemble étrangement à la Model 3 de Tesla et qui présente plusieurs des mêmes paramètres de performance. Maintenant, avec Elon Musk et Tesla, nous sommes enfin à un point d'inflexion pour les véhicules électriques après de faux départs dans les années 1970, 1990 et 2000. Quelles ont été les conditions qui ont finalement permis que cela se produise? Plus important encore, quelles conditions étaient absentes dans le passé qui empêchaient l'adoption de véhicules électriques? (Pour voir ce numéro de Science populaire, visitez mon projet Energyphile.)

L'hydrogène a également connu plusieurs cycles de promesses non tenues. La dernière vague d'excitation de l'hydrogène a eu lieu vers 2000, et il existe de nombreux parallèles avec notre moment présent. Les stocks d'hydrogène montaient en flèche. Certains des noms sont même identiques. Il y a 20 ans, bon nombre de ces actions surfaient sur la vague du Web 2.0, ce qui rappelle la poussée technologique actuelle. Alors, qu'est-ce qui peut expliquer l'échec de l'hydrogène dans les années 2000? Quelles conditions étaient absentes?

Thomas Edison a identifié une condition cruciale du succès lorsqu'il a demandé: «Qu'est-ce qui vient en premier, l'ampoule ou la grille?» La réponse est une ampoule commerciale entièrement fonctionnelle. Si vous regardez de nombreuses transitions énergétiques réussies, l'application a fait ses preuves en premier, avant que l'investissement et l'infrastructure ne suivent. Cela est particulièrement vrai pour l'hydrogène, qui nécessitera une quantité importante de nouvelles infrastructures. À cet égard, l'hydrogène se distingue des autres technologies émergentes à faibles émissions, qui sont pour la plupart plug and play. Les VE et les batteries peuvent fonctionner avec notre réseau électrique existant;vous pouvez brancher le vent et le solaire et débrancher le charbon à l'avant.

Bien entendu, la technologie de l'hydrogène elle-même ne suffit pas. La solution n'est pas non plus de jeter de l'argent dessus. L'investissement peut être éphémère. Si les attentes sont trop élevées, les investisseurs perdront de l'argent. Si les investisseurs perdent de l'argent, ils ne reviennent pas avant longtemps. Les marchés publics peuvent être votre meilleur ami ou ils peuvent être un cauchemar.

La construction d'infrastructures d'hydrogène exigera également une stabilité politique et une cohérence politique et réglementaire. Je pense que le gouvernement est sur la bonne voie et que nos organismes de réglementation positionnent le défi correctement, mais les entreprises doivent savoir que les politiques de soutien dureront tout au long d'un cycle d'investissement complet.

La technologie et l'innovation ne sont pas les facteurs limitatifs de l'hydrogène. Là où la stratégie de l'hydrogène fait défaut, là où nous avons besoin d'une conversation et d'une compréhension plus approfondies, c'est du côté financier. Une idée clé qui fait défaut dans la stratégie canadienne de l’hydrogène est le développement d’un marché du commerce de l’hydrogène plus mature. Si vous regardez tous les autres produits énergétiques - pétrole, gaz, produits pétroliers et électricité - ils ont chacun un marché commercial pleinement opérationnel et transparent. Pour que l'hydrogène se propage dans le courant dominant, un marché pleinement opérationnel sur l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement est nécessaire. Cela ne veut pas dire que cela ne peut pas arriver, mais nous ne sommes pas encore proches.

La stratégie de l’hydrogène du Canada offre une excellente matière à réflexion, mais comme le rapport lui-même l’indique, ce n’est qu’un appel à l’action. Il est maintenant temps de réfléchir à la manière dont nous allons exécuter les détails et de nous assurer de mettre les bœufs avant la charrette. Je suis optimiste que nous ayons beaucoup plus de conditions nécessaires qu’il y a 20 ans. En passant plus de temps à comprendre les défis restants, nous pouvons faire de la promesse invisible une réalité.

Energyphile est un projet explorant le passé, le présent et l'avenir des transitions énergétiques. Explorez le musée de Peter et lisez les histoires sur energyphile.org.