L'urgence d'agir sur le climat s'intensifie au Canada

Par Prof. Monica Gattinger et Nik Nanos

Directrice, ISSP et Présidente, Énergie positive, PDG, Nanos Research

Prof. Monica Gattinger et Nik Nanos
Énergie Positive
Vue en plongée du campus et du canal Rideau.
C'est la saison des élections et les partis se bousculent pour définir les enjeux et les termes du débat.

Publié originalement pour Maclean's, le 18 août 2021

C'est la saison des élections et les partis se bousculent pour définir les enjeux et les termes du débat. Bien que la pandémie fasse toujours la une des journaux, un nouveau sondage du programme Énergie positive de l'Université d'Ottawa et de Nanos Research suggère qu'un été de temps sauvage pourrait remettre le changement climatique sur la liste des priorités des Canadiens.

Depuis le début de la COVID-19, Énergie positive et Nanos demandent aux Canadiens s'ils pensent que c'est un bon ou un mauvais moment pour être ambitieux dans la lutte contre le changement climatique même s'il y a des coûts pour l'économie, en utilisant une échelle de zéro à 10.

Après quatre cycles de suivi, une ligne de tendance claire a émergé. Nos derniers résultats indiquent que près de deux Canadiens sur trois croient que c'est maintenant le meilleur moment pour être ambitieux en matière de changement climatique (scores de 7 à 10) plutôt qu'un bon moment (4-6, environ un sur sept) ou le pire moment ( 0-3, environ un sur cinq). Le changement au cours des 14 derniers mois a été assez prononcé. Les réponses étaient quelque peu polarisées lorsque nous avons posé la question pour la première fois l'année dernière, avec des nombres égaux répondant soit à 0, soit à 10 (17 % chacun). Lors du dernier tour de scrutin, nous observons une dépolarisation et une évolution vers un accord, avec près de deux fois plus de répondants affirmant que c'est maintenant le meilleur moment (36 %) et moins disant que c'est le pire (11 %).

Nous avons également suivi les raisons pour lesquelles les répondants ont donné les réponses qu'ils ont données. Comme nous l'avons souligné dans un article précédent, le sentiment d'urgence d'agir sur le changement climatique est à la hausse. Lorsque nous avons demandé pour la première fois aux Canadiens pourquoi ils disaient que c'était un bon ou un mauvais moment pour être ambitieux, la réponse la plus courante était : « Nous devons agir maintenant, le changement climatique ne peut pas attendre », avec environ un répondant sur cinq (21 % ) en disant cela. Lors du dernier tour de scrutin, ce chiffre a augmenté, plus de la moitié des personnes interrogées (53 %) citant l'urgence du problème. Parmi ceux qui ont dit que c'était le meilleur moment pour être ambitieux (7-10), le nombre était encore plus élevé, avec plus des trois quarts (77 %) disant que le problème ne pouvait pas attendre. En revanche, le nombre de répondants disant que nous devrions donner la priorité à la reprise économique ou à la réponse à la pandémie a diminué d'environ la moitié depuis juin 2020 (de 21 à 10 % et de 13 à 6 %, respectivement).

Nous avons également posé plusieurs questions qui ont mis en lumière le sentiment croissant d'urgence de lutter contre les changements climatiques. Beaucoup sont au cœur du mandat d'Énergie positive : l'acceptabilité sociale  dans la prise de décision énergétique à l'ère des changements climatiques. Les résultats donnent à réfléchir et offrent une pause aux décideurs qui tracent l'avenir énergétique et climatique du Canada.

Lorsqu'on leur demande ce qui mine le plus leur confiance que le Canada peut réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), les deux premières réponses sont révélatrices : les grandes entreprises, les intérêts de l'industrie pétrolière et le lobbying (13 %) et l'inaction du gouvernement, les promesses creuses et le manque d'application (12 %) cent). Viennent ensuite les provinces, les politiciens et les entreprises qui résistent ou sapent les efforts (7 pour cent). Malgré le fort appétit des Canadiens pour l'action climatique, le manque perçu d'action des entreprises et du gouvernement semble nuire à la confiance du public.

Lorsqu'on leur demande ce qui contribue le plus à leur confiance que le Canada peut réduire les émissions de GES, la réponse la plus élevée est frappante : environ un répondant sur quatre (23 %) a dit « rien » ou qu'il n'avait pas confiance. Cela a été suivi de loin par les gens qui ont pris des mesures et tenu les gouvernements pour responsables (15 %) et l'énergie verte (8 %). Ces résultats suggèrent que si de nombreux Canadiens sont cyniques, d'autres sont encouragés par la mobilisation civique croissante et les technologies énergétiques vertes.

Nous avons également demandé aux Canadiens de nous dire sur une échelle de 0 à 10 dans quelle mesure ils ont confiance dans les citoyens, les gouvernements et les entreprises qui prennent des mesures pour réduire les émissions. Les personnes interrogées font état d'un plus grand niveau de confiance dans les citoyens (score moyen de 5,4 sur 10) et les gouvernements (5,1 sur 10) pour agir que dans les entreprises (4,1 sur 10, 42 % des personnes interrogées n'ayant aucune confiance dans les entreprises pour changer leur comportement). Aucun secteur ne bénéficie de niveaux élevés de confiance du public, mais le faible score des entreprises combiné aux facteurs sapant la confiance du public mentionnés ci-dessus suggèrent que de nombreux Canadiens voient le secteur privé comme un obstacle plutôt qu'une solution.

Enfin, nous avons posé des questions sur l'importance actuelle et future du pétrole et du gaz dans l'économie canadienne. On s'entend pour dire que le pétrole et le gaz sont actuellement importants (note moyenne de 7,6 sur 10) et qu'ils continueront de l'être à l'avenir (note moyenne de 6,0 sur 10), mais il n'est pas clair si c'est parce que les Canadiens pensent que ce sera difficile de réduire la dépendance au pétrole et au gaz ou parce qu'ils considèrent la consommation de pétrole et de gaz comme compatible avec l'action climatique.

L’appétit des Canadiens pour une action climatique ambitieuse s’est accru tout au long de la pandémie, mais leur confiance dans la capacité du Canada à agir est faible. Ils croient qu'il existe de fortes forces opposées qui entravent notre capacité collective à réduire les émissions et sont particulièrement préoccupés par l'inaction des gouvernements et des entreprises. À l'approche des élections fédérales et au-delà, les dirigeants et les décideurs devraient en prendre note.

Source : Positive Energy/Nanos Research, sondage téléphonique hybride RDD à double cadre et sondage aléatoire en ligne, 30 juillet au 2 août 2021, n = 1002, précis à 3,1 points de pourcentage plus ou moins, 19 fois sur 20.