Célébration du Mois de l’histoire des Noirs : un entretien avec le Dr Kwadwo Kyeremanteng

Par David McFadden

Rédacteur scientifique, Université d'Ottawa

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Dans le cadre du Mois de l’histoire des Noirs, nous nous sommes entretenus avec l’un des grands leaders en soins de santé de notre communauté sur la façon d’éliminer les obstacles et d’insuffler le changement.

Le Dr Kwadwo Kyeremanteng est un homme fort occupé. Il est professeur agrégé à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa, chef du Département des soins critiques à L’Hôpital d’Ottawa et chercheur dans l’exploration de façons d’améliorer l’accès aux services de soins palliatifs. Il anime un balado, en plus d’être auteur, et conférencier. Il est le fondateur d’un groupe de recherche multidisciplinaire et un leader d’opinion qui intervient fréquemment dans les médias. Le Dr Kyeremanteng est aussi le père de trois garçons.

En plus de ses nombreux engagements, le Dr Kyeremanteng est déterminé à apporter des changements positifs et à contribuer à l’amélioration de la prestation des soins de santé au Canada. L’un des moyens les plus efficaces qu’il utilise pour ce faire consiste à défendre ardemment les principes d’équité, d’inclusion et de diversité en santé afin que chacun ait ce dont il a besoin pour s’épanouir.

Dans le cadre de la célébration du Mois de l’histoire des Noirs, nous nous sommes entretenus avec le Dr Kyeremanteng sur la nécessité d’éliminer les obstacles systémiques, l’importance cruciale du mentorat et d’autres sujets.

Q : Pour vous, que signifie le Mois de l’histoire des Noirs?

R : C’est un moment pour réfléchir à certaines préoccupations et à certains défis auxquels la culture noire a été confrontée au fil des années, des décennies et des siècles. C’est aussi, et surtout, le moment de célébrer les réussites et triomphes. C’est ce que j’apprécie le plus du Mois de l’histoire des Noirs. Tant de gens ont contribué au progrès dans leurs domaines respectifs, mais n’ont obtenu que très peu de reconnaissance ou d’éloges. C’est le moment de braquer les projecteurs sur leurs prouesses.

C’est aussi le moment de célébrer les gens qui ont abattu un travail titanesque de défense des droits afin que nous puissions avoir notre place à la table et faire valoir notre opinion dans nos domaines respectifs. Je crois que c’est pour tout cela que ce Mois revêt autant d’importance.

Kwadwo
Dr Kwadwo Kyeremanteng

Q : La recherche a démontré que la sous-représentation des groupes racialisés et minoritaires au sein des effectifs en santé entraîne des disparités en matière de santé et des résultats sous-optimaux pour les patients. Pouvez-vous nous parler de la meilleure façon de combler cet écart? Selon vous, où y a-t-il le plus matière à amélioration?

R : Oui, comme vous l’avez évoqué, nous avons incontestablement constaté des lacunes au niveau des soins en raison du manque d’une main-d’œuvre diversifiée. La solution est simple : nous devons nous assurer que notre main-d’œuvre et notre direction se caractérisent par un niveau de diversité qui représente adéquatement notre population. Et lorsqu’on préconise la diversité, on bénéficie alors d’une perspective accrue. Du même coup, on acquiert alors une vision plus globale des soins.

Il est important de faire de la diversité une priorité. Dans le domaine des affaires, par exemple, on constate que les entreprises diversifiées excellent. Je considère que la diversité est en quelque sorte un superpouvoir; c’est une façon de propulser votre organisation.

Je crois que nous devons prendre la diversité au sérieux et l’afficher clairement comme une priorité. Et, bien sûr, pour ce faire, nous devons adopter la bonne approche – il ne s’agit pas de cocher machinalement des cases. Nous devons veiller à ce que les personnes sélectionnées soient qualifiées et correctement encadrées. Ainsi, elles auront une chance d’exceller.

Q : Les discussions portant sur les questions raciales et l’équité en santé peuvent être difficiles pour certains. Parfois des informations fausses et des affirmations exagérées circulent au sujet de l’objectif de ces discussions. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi la mise en œuvre d’un système de soins de santé canadien plus équitable, diversifié et inclusif serait avantageux pour tous et ne ferait que renforcer le système de soins de santé du pays?

R : Je crois qu’il est important de reconnaître que certaines des préoccupations sont légitimes. Certains se demandent si les personnes sélectionnées ont vraiment les qualifications pour le poste, si elles offrent des soins inférieurs aux normes, etc. Je pense que ce genre de questions est tout à fait justifié; les décisions doivent être réfléchies et les personnes retenues doivent absolument être qualifiées.

L’un des principaux problèmes que nous tentons de résoudre est la présence d’obstacles systémiques qui empêchent beaucoup de personnes de s’épanouir. Par exemple, dans les écoles secondaires de l’Ontario, il existe différents volets d’études et les enseignants peuvent recommander le volet le plus approprié pour chacun de leurs élèves. Auparavant, les gens comme moi avaient tendance à être davantage orientés vers des études pour apprendre un métier plutôt que vers des études en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM). Nous tentons de surmonter ce genre d’obstacles afin d’atteindre un certain niveau d’équité.

Pour répondre à votre question à proprement parler, je dois dire que tout s’améliore lorsque vous disposez d’un groupe de travail plus diversifié. Lorsqu’une patientèle donnée, une communauté autochtone ou noire par exemple, établit des liens forts avec son prestataire de soins de santé ou son équipe de soins de santé, elle est alors plus engagée, se conforme davantage aux recommandations, ce qui améliore potentiellement sa santé. Ces patients n’engorgent pas les services d’urgence et de soins actifs. À mon avis, lorsque la diversité repose sur des choix réfléchis, nous sommes tous gagnants; nous en récoltons tous les bienfaits.

Q : Vous avez mentionné que durant vos années à l’école de médecine, vous n’aviez pas été encadré adéquatement et que vous avez eu de la difficulté à obtenir des conseils. Pouvez-vous nous parler un peu de la façon dont vous percevez votre rôle de mentor et de soutien de la prochaine génération de médecins noirs au Canada?

: Le mentorat est très important, et nous en avons fait une priorité. Nous avons créé notre propre groupe de mentorat, un organisme à but non lucratif fondé en 2020 appelé Black Med Collective. Notre objectif est de soutenir les jeunes Noirs avant qu’ils entreprennent leurs études en médecine. Non seulement nous leur fournissons des conseils sur la façon de se distinguer des autres candidats au moment de proposer leur candidature, mais nous leur offrons également des possibilités de recherche et de bénévolat, des occasions de se familiariser au milieu et des moyens de renforcer leur CV. C’est le genre de soutien dont j’aurais aimé bénéficier. En effet, ce soutien, et le sentiment que tout est possible sont précieux. Au cours de la dernière année, trois membres de notre organisme ont été admis à l’école de médecine. Notre tout premier mentoré a été admis dans quatre facultés de médecine, et il a commencé ses études à l’Université d’Ottawa cette année.

Le mentorat est donc quelque chose d’extrêmement important. Le programme de mentorat de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa s’adresse aux étudiants qui sont déjà admis à l’école de médecine, ce qui répond à un besoin important. Cependant, je voulais aussi soutenir les jeunes plus tôt dans leur cheminement d’apprentissage. Plusieurs d’entre eux ne croyaient pas avoir une chance d’être admis; je veux qu’ils comprennent qu’ils ont tout ce qu’il faut pour réussir.

Cela fait partie intégrante de ma devise : quand vous remarquez qu’il y a un problème, faites quelque chose. N’attendez pas d’avoir la permission, agissez et voyez ce qui adviendra.

Q : Quels conseils donneriez-vous aux jeunes étudiants noirs qui envisagent de faire carrière en médecine et d’y consacrer leur vie?

R : Tout d’abord, la médecine est un domaine formidable. Ensuite, vous avez tout ce qu’il faut pour réussir, et nous allons mettre à votre disposition les ressources dont vous avez besoin pour vous distinguer des autres candidats. Puis, le cheminement vers l’atteinte de votre objectif n’est pas toujours aussi simple que vous le souhaiteriez, mais rappelez-vous que nous sommes ici pour vous appuyer. Nous sommes de plus en plus nombreux à vous appuyer.

J’encourage fortement les jeunes à poursuivre leurs rêves. Si vous n’êtes pas certains de vouloir faire des études en médecine, mais que le cœur vous en dit, et si vous êtes prêts à faire les efforts nécessaires – lancez-vous à corps perdu. Et rappelez-vous qu’il y a toute une armée de personnes qui sont là pour vous appuyer.

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