Recherche communautaire à l’Université d’Ottawa : Aider la population étudiante immigrante et réfugiée à rester aux études

Par Université d'Ottawa

Cabinet du vice-recteur à la recherche et à l'innovation, CVRRI

Recherche et innovation
Société
Faculté d’éducation
La professeure Jess Whitley et des membres de l’Organisme communautaire des services aux immigrants d’Ottawa (OCISO) assis autour d'une table en train de discuter.
La professeure Jess Whitley (Université d’Ottawa) et les membres de l’Organisme communautaire des services aux immigrants d’Ottawa (OCISO) à un sommet sur la fréquentation scolaire organisé par le Partenariat canadien pour la fréquentation scolaire.
L’absentéisme scolaire a fortement augmenté depuis la pandémie. Dans un conseil scolaire de l’Ontario, le taux d’élèves du primaire manquant au moins 20 jours de classe est passé de 15 % en 2018-2019 à 33 % en 2022-2023.

Dans un conseil scolaire des Maritimes, le taux d’absentéisme chronique au secondaire s’est élevé à près de 70 % l’an dernier. Nombreuses sont les écoles qui ont de la difficulté à faire le suivi des motifs d’absence ou à surveiller efficacement la présence en ligne. 

Comme les jeunes personnes immigrantes et réfugiées sont aux prises avec des problèmes de santé mentale et des barrières systémiques aux multiples facettes, il est souvent difficile pour elles de fréquenter l’école assidûment. Même si le lien entre l’assiduité et la réussite à long terme est bien établi, les causes sous-jacentes de leur absentéisme demeurent largement inexplorées. 

C’est pourquoi Jess Whitley, professeure à la Faculté d’éducation et titulaire de la Chaire de recherche de l’Université sur l’inclusion, la santé mentale et l’assiduité scolaire, a établi un partenariat avec l’Organisme communautaire des services aux immigrants d’Ottawa (OCISO). L’OCISO possède une vaste expérience en services d’établissement et d’intégration pour les personnes immigrantes et réfugiées; il collabore avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et des conseils scolaires locaux, tandis que la professeure Whitley apporte des méthodes de recherche universitaire et une perspective fondée sur des données.  

Après sept ans de partenariat, leur travail est maintenant soutenu par une subvention de recherche communautaire de 10 000 $ de l’Université d’Ottawa. Ce nouveau programme de financement vise à combler le fossé entre les connaissances théoriques et l’application pratique. 

Recherche et connaissances communautaires : un partenariat essentiel

La nouvelle subvention aidera l’équipe à intégrer les agentes et agents de liaison multiculturelle (ALM) de l’OCISO à la collaboration. Entre autres services, les ALM guident les personnes nouvellement arrivées au Canada au sein du système d’éducation, font connaître les services communautaires aux élèves et aux parents, et créent un environnement accueillant en développant des compétences interculturelles chez les membres du personnel scolaire. Ces agentes et agents sont un lien vital entre les écoles et les familles nouvellement arrivées pour gérer les problèmes, comme les malentendus culturels et la stigmatisation entourant la santé mentale. 

La recherche de la professeure Whitley portera sur l’influence du travail des ALM sur la fréquentation scolaire et le bien-être des élèves, notamment les stratégies efficaces et les points à améliorer. Elle examinera également les obstacles plus importants, comme les politiques et l’accès limité aux ressources, qui rendent difficile pour les familles d’assurer une fréquentation constante.  

« Dans le cadre de leur travail, les ALM recueillent une grande quantité de données sur le bien-être et la fréquentation des élèves, mais n’ont pas les ressources pour les analyser en détail. Cette subvention nous aidera à créer des processus pour soutenir les travaux de recherche, améliorer les évaluations et renforcer le partage des connaissances au sein de l’OCISO et avec nos partenaires », explique Mario Teresa Garcia, directeur du programme des ALM. 

Jess Whitley
Jess Whitley, professeure titulaire à la Faculté d'éducation et titulaire de la chaire de recherche universitaire sur l'inclusion, la santé mentale et l'assiduité scolaire à l'Université d'Ottawa.

Réhabiliter le rôle de la famille pour réduire l’absentéisme

Les familles jouent un rôle essentiel dans la motivation des élèves; toutefois, de nombreux parents immigrants ou réfugiés se heurtent à des obstacles tels que des malentendus culturels, des barrières linguistiques et une méconnaissance du système scolaire. 

Les parents peuvent se sentir isolés, ce qui a une incidence sur l’assiduité de leurs enfants. 

« On ne saurait trop insister sur l’importance du rôle des familles, affirme la professeure Whitley. Lorsque les parents ou les tutrices et tuteurs se sentent aliénés du système scolaire, les enfants sont plus susceptibles de manquer l’école. Mobiliser les parents en tant que partenaires permet de tisser des liens et de créer un sens de responsabilité partagée pour la réussite des élèves. » 

Le projet vise à reconnaître le lien entre la famille et l’école tout en relevant les problèmes de santé mentale non reconnus ou stigmatisés. En intégrant un soutien en santé mentale dans cette dynamique, la recherche s’intéresse aux moyens d’outiller les familles pour qu’elles comprennent mieux le système d’éducation et puissent contrer l’absentéisme à la source. 

Le vécu, moteur d’intervention efficace

Cette initiative est axée sur le vécu des familles immigrantes et réfugiées. Selon la professeure de l’Université d’Ottawa, travailler avec l’OCISO a permis de révéler des complexités jusqu’à maintenant sous-estimées, comme l’effet des points de vue culturels sur l’assiduité. 

Dans certaines familles, les obligations familiales ou financières peuvent avoir préséance sur la fréquentation scolaire régulière en raison de pressions économiques ou culturelles. Par exemple, Amal devait rester à la maison pour s’occuper de ses jeunes frères et sœurs lorsque sa mère allait travailler. 

Ces renseignements ont amené l’équipe de Jess Whitley à formuler de nouvelles questions de recherche pour mieux saisir l’ensemble de la dynamique et des valeurs familiales en matière d’éducation. 

« Nous voulons trouver des solutions non seulement pour la communauté, mais avec elle, explique la professeure Whitley. Ce partenariat fait en sorte que les interventions sont culturellement adaptées, pérennes et profondément ancrées dans le vécu. »  

Obstacles et changements de politiques

L’absentéisme chronique est associé à des taux élevés de décrochage scolaire précoce, ce qui nuit à la santé mentale, à la stabilité financière et à la réussite des études au fil du temps. Il touche de manière disproportionnée les élèves marginalisés, ce qui aggrave les cycles d’exclusion et limite les possibilités. 

Il faut modifier les politiques pour améliorer la situation, mais les obstacles systémiques nous en empêchent souvent. Selon Jess Whitley, un manque de coordination entre des organismes gouvernementaux de différents niveaux fragmente les approches. 

« La recherche communautaire offre une perspective holistique qui tient compte d’un plus grand nombre de facteurs et de renseignements que les indicateurs conventionnels, soutient-elle. En répondant aux besoins locaux tout en contribuant aux solutions systémiques, nous pouvons faire en sorte que les interventions aient des retombées concrètes là où l’urgence se fait le plus sentir. »