Invitée à la suite d’une rencontre à la Super Conférence de l’Association des bibliothèques de l’Ontario, la graffeuse originaire du Nipissing Ouest a l’habitude de travailler avec les communautés francophones afin de réaliser des œuvres murales qui reflètent leurs messages, leurs rêves et leurs désirs.
Celle que l’on a notamment pu voir dans la série documentaire Couleurs du Nord, sur les ondes de TFO, réalise des œuvres murales aux quatre coins du globe. Sa démarche artistique cherche à renverser les stéréotypes négatifs à l’égard du graffiti et à sensibiliser le public aux réalités des minorités visibles et invisibles.
Une collaboration communautaire et artistique axée sur la diversité
Le processus de création de Mique Michelle est inclusif : « Quand je parle de graffiti, c’est pour la communauté, c’est du “par et pour” elle. En tant que minorités francophones, s’il y a quelque chose qui est important pour nous, c’est bien le “par et pour” [la communauté]. Et c’est exactement ce que nous permettent le graffiti et le hip-hop. »
En juin 2024, Mique Michelle a rencontré une dizaine de participants francophones et francophiles de l’Université d’Ottawa. Cette consultation auprès de chercheuses, de leaders étudiantes, d’archivistes, de conseillers en francophonie et de représentants des médias du campus marquait le début de son processus de création.
Au cours de ces échanges, les membres de la communauté universitaire ont pu partager leurs idées et visions de la francophonie sur le campus tout en s’initiant aux principes du graffiti et du hip-hop.
Présente lors des consultations, Daphnée Veilleux-Michaud, commissaire aux affaires francophones du Syndicat étudiant de l’Université d’Ottawa (SÉUO), a exprimé son désir de voir une œuvre ayant un fort impact, particulièrement en contexte de bilinguisme : « Ce que j’espère vraiment, c’est que la murale représente l’entièreté de ce qu’est l’Université d’Ottawa et l’entièreté de sa communauté francophone. »
L’archiviste Marie Noël, a, quant à elle, rappelé l’importance de montrer la francophonie comme une plateforme de dialogue permettant de créer des liens entre les générations, et d'illustrer des combats qui se poursuivent désormais de manières différentes.
Danika Gourgon, étudiante au doctorat en histoire, a exprimé les aspirations d’inclusivité du groupe : « On essaie vraiment de montrer la diversité de la francophonie. »
Une murale riche en symboles de la francophonie
Dynamisée par ces discussions, Mique Michelle s’est ensuite attelée à la tâche pour réaliser deux murales au pavillon Morisset. La toute première œuvre, intitulée « French Kiss », orne désormais les murs de la Médiathèque, un espace situé au premier étage de la Bibliothèque Morisset.
Inspirée par la collection de macarons féministes conservés aux Archives des femmes (Archives et collections spéciales de la Bibliothèque), l’artiste a choisi de représenter le passé, le présent et l’avenir de la francophonie à l’aide d’un personnage vêtu d’un blouson recouvert d’écussons renvoyant chacun à une date marquante, un combat, un slogan ou un régionalisme.
Pour Mique, cette œuvre est en quelque sorte une déclaration d’amour à la francophonie, d’où le personnage aux lèvres en forme de trille : « La murale a comme objectif de donner un gros french d'amour, un bisou de fierté franco, et d’inciter à en découvrir plus sur la francophonie et son excellence. »
« La murale a comme objectif de donner un gros french d'amour, un bisou de fierté franco, et d’inciter à en découvrir plus sur la francophonie et son excellence. »
Mique Michelle
— Artiste franco-ontarienne
Adepte de la technique des « œufs de Pâques » (Easter eggs), la graffeuse aime peindre des œuvres touffues de références afin de captiver son public. Parmi les motifs représentés dans cette murale, on peut notamment remarquer : un clin d’œil aux drapeaux acadien et français, la forme du continent africain, un lys aux couleurs du drapeau de la fierté, ainsi que les dates « 1848 » (fondation de l’Université d’Ottawa), « 25 sept » (Jour des Franco-Ontariens), « 24 juin » (Saint-Jean-Baptiste et Fête nationale du Québec), « 20 mars » (Journée internationale de la Francophonie), et « 3 sept 1979 » (ouverture de l’École de la résistance de Penetanguishene). La murale comprend également une tresse de foin d’odeur (plante médicinale autochtone), une cassette du groupe CANO, des références à SOS Montfort et au Règlement 17, ou encore la devise franco-ontarienne « Nous sommes, nous serons ». Enfin, des expressions comme « Icitte on French » et « Lâche pas la patate! » ajoutent une touche de couleur locale à la langue française, tout en faisant un pied de nez à l’insécurité linguistique.
Des œuvres emblématiques pour les communautés autochtones et franco-canadiennes
La seconde murale, intitulée « Faire fleurir la francophonie », peut être admirée au niveau promenade (niveau 0) du pavillon Morisset, en face des Archives et collections spéciales de la Bibliothèque et du Centre de recherche sur les francophonies canadiennes (CRCCF). Cette grande œuvre florale contient plusieurs plantes à forte valeur symbolique pour les communautés autochtones et franco-canadiennes : le lys et le trille de l’Ontario, la gerbe de blé du drapeau franco-manitobain, la rose sauvage de l’Alberta, un lys bleu pour le Québec, de la sauge et des grains de tabac (plantes médicinales), mais aussi du thé du Labrador, des bleuets sauvages de Sudbury, des fleurs de trèfle, de l’ail des bois, du saule rouge et de l’asclépiade.
Pour la Bibliothécaire en chef et doyenne des Bibliothèques, Talia Chung, ces deux œuvres sont incontestablement très réussies. Outre leurs qualités esthétiques, elles permettent de réaffirmer le caractère fondamentalement bilingue et la mission francophone de l’Université d’Ottawa :
« Les murales peintes par Mique Michelle permettent à la Bibliothèque de mettre en valeur la richesse culturelle de notre communauté francophone tout en dynamisant nos espaces. Plus qu’une simple priorité stratégique, la francophonie demeure au cœur de notre mandat universitaire. C’est pourquoi je suis très contente que nous ayons pu réaliser ce projet fédérateur dans le cadre de l’Entente Canada-Ontario relative à l’enseignement dans la langue de la minorité et à l’enseignement de la seconde langue officielle. Le résultat final est vraiment saisissant et j’invite toute la communauté universitaire à venir profiter de ces œuvres d’art public! ».
L’invitation est donc lancée : rendez-vous à la Bibliothèque Morisset pour contempler ces œuvres en personne, et venez découvrir tous les « œufs de Pâques » francophones!
En savoir plus :
- Parcourez notre diagramme interactif consacré à la murale « French Kiss »
- Visitez le site web de Mique Michelle ou parcourez son compte Instagram