Cette avancée ouvre de nouvelles possibilités intrigantes pour la détection, la prise de mesures et le routage des signaux optiques. En contrôlant l’absorption de la lumière dans les solides, on pourrait améliorer la rapidité et l’efficacité des systèmes de communication optique. Cette importante percée a fait l’objet d’une publication dans la prestigieuse revue Nature Communications.
Dans la vie quotidienne, la matière se rencontre sous quatre états : solide, liquide, gazeux et plasma. Les solides se subdivisent en deux types, amorphes ou cristallins, selon leur structure interne. Un solide cristallin est formé de particules arrangées de façon ordonnée en suivant un motif tridimensionnel qui se répète. En revanche, un solide amorphe, comme le caoutchouc, le plastique ou le verre, présente une structure aléatoire et désorganisée, sans motif défini.
Depuis toujours, on considère que cette absence de structure ordonnée signifie que les solides amorphes ne peuvent pas présenter de dichroïsme, propriété selon laquelle un matériau absorbe la lumière différemment en fonction de sa polarisation (la direction dans laquelle elle oscille). Toutefois, les dernières recherches du professeur Bhardwaj remettent cette idée en question. Il a montré que le dichroïsme intrinsèque peut en effet exister dans les solides amorphes.
Avec ses étudiants au doctorat, Ashish Jain et Jean-Luc Bégin, le professeur Bhardwaj a étudié la manière dont la lumière hélicoïdale de différentes polarisations interagit avec les échantillons de solides. Pour ce faire, l’équipe a mesuré la quantité de lumière absorbée par la matière. Elle a utilisé des faisceaux lumineux présentant des propriétés particulières, telles que des polarisations variables et des ensembles d’ondes hélicoïdales ayant un mouvement de rotation défini, afin d’étudier l’influence de ces facteurs sur l’absorption de la lumière dans les matériaux.
« La partie la plus difficile de cette découverte a été de défier les anciennes croyances en physique. Pendant des décennies, on a cru que les solides amorphes avaient des propriétés isotropes et que la phase optique de la lumière était insignifiante. Nous avons été confrontés au scepticisme et à d’innombrables contre-vérifications, mais nos résultats ont prouvé qu’un changement de paradigme était possible », explique le professeur Bhardwaj.
Un autre défi a été d’élaborer une théorie pour expliquer les résultats. L’équipe a rigoureusement testé ses modèles pour s’assurer qu’ils s’arrimaient bien aux résultats expérimentaux. « Tout le monde nous demandait si nous avions essayé ceci ou cela », se rappelle Ashish Jain. Après plus de deux ans d’expériences méthodiques et d’innombrables discussions, ils sont parvenus à élaborer un cadre théorique solide.
Malgré les difficultés, leur persévérance a porté ses fruits; elle a débouché sur un modèle à la fois qualitatif et partiellement quantitatif qui expliquait leurs observations. Ce modèle marque un tournant important dans la compréhension des interactions de la lumière asymétrique.
Grâce à ces travaux, il est maintenant possible de contrôler avec précision la quantité de lumière absorbée par un solide. Cela ouvre la voie à des avancées dans les dispositifs photoniques : commutateurs optiques plus rapides pour les communications, capteurs améliorés pour détecter les propriétés des matériaux et outils de mesure optique plus efficaces. Ces innovations pourraient aussi accroître l’efficacité de la transmission des données et mener à de nouvelles technologies de mesure qui utilisent différentes phases de la lumière.
Décision stratégique, la publication de cette découverte dans Nature Communications permet de rejoindre un large public. Grâce à son vaste lectorat et à sa grande visibilité, cette revue à accès libre maximise la portée des résultats de recherche. Elle suscite également des discussions susceptibles de faire évoluer les opinions au sein de la communauté scientifique.
Le travail des doctorants a été essentiel, preuve de leur rôle crucial dans l’avancement des connaissances scientifiques. Ceux-ci ont commencé leur doctorat en axant leurs recherches sur deux sujets distincts, mais leur intérêt commun pour la lumière hélicoïdale les a rapprochés. Ashish Jain a l’intention de travailler comme scientifique en entreprise dans le domaine de l’optique tout en continuant à collaborer avec le professeur Bhardwaj. De son côté, Jean-Luc Bégin va bénéficier d’une bourse postdoctorale pour effectuer des recherches avancées sur les gaz. Comme le fait remarquer ce dernier : « Nous allons continuer d’explorer ensemble de nouvelles idées. »
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