Comme ce grand événement avait dû être reporté à deux reprises (il avait initialement été prévu en février 2023), il était attendu de toutes et de tous avec beaucoup d’impatience.
La Faculté de droit de l’Université d’Ottawa a coutume de marquer d’une cérémonie la nomination de chaque juge à la Cour suprême du Canada depuis 2004. L’occasion permet entre autres de mettre en relief la proximité entre les deux institutions. Or, la juge O’Bonsawin ayant obtenu son LL.B. (1998) et son doctorat en droit (2022) de l’Université d’Ottawa, la cérémonie revêtait une importance toute particulière.
Dans son mot de bienvenue, Kristen Boon, doyenne Susan-et-Perry-Dellelce de la Section de common law, a tenu à souligner ce rapport bien spécial entre la juge et son alma mater : « Ce soir, nous célébrons l’une des nôtres : une diplômée de notre incomparable programme de common law en français, et titulaire d’un doctorat de surcroît. » Sur un ton plus personnel, la doyenne a profité de l’occasion pour rappeler que la juge O’Bonsawin avait rencontré son mari à sa première journée sur les bancs de la Faculté, peut-être même dans la salle où les gens étaient réunis.
Le rituel de purification par la fumée effectué par Gilbert Whiteduck, gardien du savoir autochtone à la Section de common law, s’est enchaîné par une cérémonie de remise d’une couverture étoilée. Dirigée par Viviane Michel, chef innu et ex-présidente de Femmes autochtones du Québec, cette cérémonie prêtait un hommage touchant aux traditions des Premiers Peuples. Dans un geste invitant au respect des identités et des cultures autochtones, des représentantes et représentants des communautés métisses, inuites et des Premières Nations se sont positionnés de part et d’autre de la juge O’Bonsawin et, fidèlement à leurs coutumes respectives, l’ont entourée d’une magnifique courtepointe colorée faite à la main.
Les couvertures revêtent une grande valeur symbolique et traditionnelle chez les Premières Nations, qui les associent à la culture, la naissance, la vie et la mort. Elles représentent tant leurs croyances que la lutte pour leur survie à travers les époques et le territoire. Les communautés des Premières Nations continuent d’utiliser ces précieuses couvertures dans leurs pratiques traditionnelles.
En l’absence de la doyenne de la Section de droit civil, Marie-Eve Sylvestre, qui n’a malheureusement pu prendre part à l’événement, la professeure et vice-doyenne à la recherche Jennifer Quaid a rappelé l’importance historique de la nomination de la juge O’Bonsawin.
« On ne saurait sous-estimer l’importance de cette nomination et de ce qu’elle représente pour ce pays, vingt-cinq ans après la fermeture de son dernier pensionnat autochtone, a-t-elle fait remarquer. Le droit et les institutions juridiques du Canada ont fortement contribué au maintien des structures coloniales et à l’application des politiques d’assimilation. Pendant des décennies, nos tribunaux étaient considérés comme hostiles aux peuples autochtones et complètement déconnectés de leurs réalités et de leurs ordres juridiques. »
David Charette, Ojibwe de la réserve non cédée de Wikwemikong, a entonné un puissant chant d’honneur pendant la cérémonie. Reconnu pour ses contributions aux arts visuels, à l’artisanat ainsi qu’au chant et au tambour traditionnels des Premières Nations, l’artiste bispirituel a su capter l’attention du public avec sa prestation parfaitement adaptée à l’occasion.
Dans son allocution, la juge O’Bonsawin a remercié la Faculté de lui avoir servi de tremplin pour son parcours en droit, affirmant que « c’est au sein du programme de common law en français [qu’elle a] reçu le soutien et le renforcement nécessaires pour devenir une juriste capable et respectée. »
Ses dernières paroles s’adressaient directement aux étudiantes et étudiants dans la salle : « Je vous encourage toutes et tous à poursuivre vos rêves. Votre parcours sera semé d’obstacles, mais vous avez tout ce qu’il vous faut pour les surmonter. La clé de la réussite, vous l’avez entre vos mains. »
Des leaders de l’Association des étudiantes et étudiants en droit, et de la Gouvernance des étudiant(e)s autochtones en droit, et le programme du Certificat en droit autochtone ont aussi présenté des offrandes à la juge au cours de la soirée. Leurs gestes, qui traduisaient toute l’admiration et tout le soutien de la population étudiante envers cette pionnière de leur propre faculté, ont apporté un soupçon de camaraderie à l’événement.
La Faculté était ravie d’accueillir cinq autres juges de la Cour suprême du Canada lors de ce grand événement qui, en plus de célébrer les réalisations exceptionnelles de Michelle O’Bonsawin, soulignait l’importance de la diversité et de la représentation au plus au tribunal du Canada.
Une cérémonie se tiendra au cours des prochains mois pour souhaiter également la bienvenue à la juge Mary Moreau, dernière en date à se joindre à la Cour suprême.