Une équipe d’étudiantes-chercheuses et d’étudiants-chercheurs de premier cycle s’est attaquée au problème des pénuries de médicaments, particulièrement préoccupant dans les pays en développement, en créant une plateforme de biofabrication baptisée Phytogene. À la fois écologique et abordable, cette solution remplace la fabrication de produits de synthèse à base de peptides par un système d’agriculture pharmaco-moléculaire.
Chapeauté par Victor Boddy et Teagan Thomas, un étudiant et une étudiante de quatrième année en biotechnologie et en sciences biomédicales, le projet visait à améliorer l’accès aux médicaments dans le monde entier, dans le contexte actuel de pénurie et d’inflation des coûts.
Une médaille d’or d’ingéniosité
Phytogene cultive des plants de Nicotiana benthamiana pour produire des médicaments comme des agonistes de récepteur du glucagon-like peptide-1 (GLP-1), une catégorie qui comprend le populaire Ozempic, conçu pour le traitement du diabète de type II et détourné à des fins de perte de poids. Cette approche novatrice pourrait considérablement réduire les émissions de gaz à effet de serre et les déchets chimiques produits par les méthodes pharmaceutiques traditionnelles.
Victor Boddy, chef de l’équipe, explique : « La récente pénurie d’Ozempic nous a inspiré le modèle de validation de principe d’un système d’expression des agonistes GLP-1 fonctionnels dans les plantes. Nous voulons qu’à l’avenir, les gens puissent cultiver eux-mêmes leurs propres médicaments et n’aient donc plus à se soucier des coûts, des assurances et de la disponibilité. »
L’équipe a présenté ses travaux à l’iGEM Grand Jamboree à Paris, aux côtés de plus de 430 équipes du monde entier. Elle a ramené une médaille d’or et s’est classée parmi les cinq premières équipes du volet de biofabrication.
Teagan Thomas, coresponsable du projet, souligne le potentiel de la plateforme : « Phytogene propose une solution écologique à la grave pénurie de médicaments, fondée sur une approche originale et durable de la biotechnologie. Grâce au soutien de sociétés de capital-risque et aux conseils de scientifiques, nous aurons la chance de poursuivre son développement en vue de la commercialiser. »
L’entrepreneuriat social en action
L’équipe a publié une trousse d’outils d’agriculture pharmaco-moléculaire en libre accès dans le registre d’éléments d’iGEM, pour en faire profiter la communauté de recherche. Cette trousse comprend des outils génétiques pour le dépistage rapide de localisations infracellulaires dans les plantes et divers modèles d’expression dans de multiples types cellulaires.

Lancé à la fin de 2023, ce projet collaboratif a été porté par 23 étudiantes et étudiants de premier cycle de différentes facultés de l’Université d’Ottawa, avec les conseils d’Adam Damry, professeur adjoint au Département de chimie et sciences biomoléculaires, et d’Allyson Maclean, professeure agrégée au Département de biologie. L’équipe a réalisé ses travaux au laboratoire bioGARAGE, en collaboration avec d’autres laboratoires universitaires.
Bien qu’il soit très prometteur, le système n’en est encore qu’à la phase d’essais. « L’extrait n’a pas été testé sur des sujets humains », précise Victor Boddy. L’équipe travaille actuellement à l’optimisation des protocoles afin de pouvoir tester l’activité de ces composés. « Nous analysons les taux sanguins de glucose et d’insuline pour évaluer la réponse, et nous réaliserons des tests de bioactivité pour mesurer l’efficacité du médicament sur des cellules humaines », poursuit Teagan Thomas.
La plateforme Phytogene représente une solution d’avenir pour réduire les pénuries de médicaments et les incidences sur l’environnement de la production pharmaceutique. En exploitant le pouvoir des plantes transgéniques, cette nouvelle approche pourrait bien révolutionner l’industrie biopharmaceutique et améliorer l’accès aux traitements pour les populations du monde entier.
Pour en savoir plus sur Phytogene, visitez le site iGEM de l’Université d’Ottawa.