Cette éminente avocate, très respectée pour son expertise au croisement des technologies, du droit et de la politique, compte plus de 20 ans d’expérience dans le domaine de la protection de la vie privée et de la cybersécurité. C’est, dit-elle, son « profond attachement aux droits de la personne » qui l’a incitée à embrasser une carrière juridique.
« Le droit à la vie privée est un enjeu sociétal de premier plan qu’il nous faut redéfinir dans notre société moderne, affirme-t-elle. En effet, les technologies ont multiplié de façon exponentielle la capacité de collecte de données et, par conséquent, le risque d’atteinte à la vie privée. »
Diplômée de l’Université de Sherbrooke en 1977, Chantal Bernier a exercé diverses fonctions d’intérêt public étroitement liées à la protection des renseignements personnels, à la sécurité et à l’équité. Malgré l’évolution rapide des technologies, elle demeure fidèle à sa mission de défendre le droit à la vie privée et à l’autodétermination.
Les autorités tâchent de produire rapidement des lois et règlements pour réduire les risques inhérents aux nouvelles technologies, en particulier l’intelligence artificielle (IA), comme en témoigne le Projet de loi C-27 : Loi édictant la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs, la Loi sur le Tribunal de la protection des renseignements personnels et des données et la Loi sur l’intelligence artificielle et les données et apportant des modifications corrélatives et connexes à d’autres lois.
« La législation en la matière doit se fonder sur des principes et s’appliquer à toutes les technologies, note Chantal Bernier. Dans tous les cas, elle doit interdire l’utilisation et la communication de renseignements personnels sans le consentement explicite de la personne concernée. De cette façon, les lois s’appliquent à toutes les technologies sans jamais tomber en désuétude. »
Selon l’experte, en plus de poser des risques pour la cybersécurité, l’IA pose des problèmes éthiques en favorisant la discrimination et le manque d’équité. On sait que les femmes et d’autres groupes marginalisés sont sous-représentés et sous-estimés dans le domaine des technologies. Par conséquent, les préjugés à l’égard de ces groupes se reflètent dans le développement et le déploiement de l’IA et d’autres technologies, accentuant l’exclusion de ces personnes. Pour éviter les résultats tendancieux, Chantal Bernier affirme qu’il est « impératif d’empêcher que des éléments de données puissent orienter leur traitement. En outre, après leur déploiement, les programmes d’IA doivent faire l’objet d’une surveillance pour assurer une représentation équitable des groupes. »
La discrimination envers les femmes, qui a la peau dure dans le domaine des technologies depuis des décennies, a été amplifiée par l’avènement de l’IA et par l’omniprésence des technologies dans notre quotidien. Les femmes et les groupes marginalisés sont disproportionnellement visés par les menaces, le harcèlement et l’intimidation dans le cyberespace. Puisque la technologie offre aux internautes de nouveaux moyens de s’exprimer à grande échelle et dans l’anonymat, « on peut plus rapidement diffuser des messages haineux et faire un plus grand nombre de victimes », souligne l’experte.
« La technologie est trop complexe et ses capacités sont trop puissantes pour que nous puissions la contrôler, poursuit-elle. Nous devons prendre une réglementation rigoureuse, qui énonce clairement ce qui est permis et ce qui est interdit, et sensibiliser le grand public avec plus de transparence. »
D’un autre côté, les technologies ouvrent aussi des avenues prometteuses. Par exemple, l’application My Safetipin, développée en Inde, aide les femmes à trouver les lieux et les moyens de transport les plus sûrs. Les Afghanes contournent l’interdiction d’étudier grâce à des universitaires du monde entier qui ont accepté de leur offrir des cours en ligne. En 2021, une jeune Américaine a été délivrée de son ravisseur grâce aux signaux d’alerte qu’elle avait appris à faire sur TikTok et qu’elle a transmis depuis la voiture où elle était prisonnière à d’autres usagers de la route.
Dans ses nouvelles fonctions de Practicienne en droit à la vie privée en résidence, Chantal Bernier mettra son savoir au service de la communauté universitaire et de la société. Sa nomination s’inscrit dans les efforts de l’Université d’Ottawa pour rester à l’avant-garde dans ces domaines en constante évolution et faire profiter sa population étudiante de l’expertise et des ressources les plus avancées.
Soyez des nôtres le 5 avril pour sa première conférence à titre de Practicienne en droit à la vie privée en résidence : Les données pour le bien : La redéfinition des limites du droit à la vie privée et de l’intérêt public.